USA : Les démocrates accusent le DoJ de bloquer la plainte d'un lanceur d'alerte

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Usa: les democrates accusent le doj de bloquer la plainte d'un lanceur d'alerte[reuters.com]
(Crédits : Kevin Lamarque)

par Mark Hosenball et Jonathan Landay

WASHINGTON (Reuters) - Le président de la commission du Renseignement à la Chambre des représentants, contrôlée par les démocrates, a accusé jeudi le département américain de la Justice d'empêcher des responsables des services de renseignement de fournir au Congrès la plainte d'un lanceur d'alerte qui concernerait des communications entre Donald Trump et un dirigeant étranger.

Adam Schiff, qui préside la commission du Renseignement, a accusé l'administration Trump de bloquer une demande du Congrès après avoir reçu une audience à huis clos de l'inspecteur général du renseignement, Michael Atkinson.

Le Washington Post, citant deux anciens responsables, a révélé l'existence d'une plainte d'un lanceur d'alerte qui concernerait une promesse non spécifiée faite par Donald Trump à un dirigeant étranger lors d'un appel téléphonique.

Une source proche du dossier, qui s'exprimait sous le sceau de l'anonymat, a déclaré à Reuters que la plainte alléguait des "actes multiples" de la part de Trump en plus de l'appel téléphonique.

Cette querelle est la dernière en date de la lutte de pouvoir que se livrent les parlementaires démocrates - qui enquêtent sur les transactions commerciales et les actions du président - et l'administration Trump, qui s'oppose à leur démarches visant à obtenir des documents, des archives et des témoignages de la Maison blanche et de hauts responsables des agences de renseignement.

Reuters n'a pas pu confirmer les détails de la plainte du lanceur d'alerte.

Selon de nouvelles informations du Washington Post publiées jeudi, Donald Trump se serait entretenu au téléphone avec le président ukrainien Vladimir Zelenski quelques semaines avant la plainte du lanceur d'alerte.

Interrogé par CNN à propos de ces révélations, l'avocat de Trump, Rudy Giuliani, a répondu: "Si cette information était vraie, cela ne changerait rien (...) Si le président des Etats-Unis dit au président de l'Ukraine 'enquêtez sur la corruption dans votre pays qui a eu une incidence sur nos élections de 2016', n'est-ce pas ce qu'il est censé faire ?"

Une source au sein du Congrès a affirmé que les sénateurs n'avaient pas été informés du pays d'origine de l'interlocuteur du président dans la plainte.

"FAKE NEWS", DIT TRUMP

"J'ignore si la Maison blanche est impliquée directement car nous ne pouvons pas obtenir une réponse à cette question, mais nous savons qu'ils prétendent qu'un privilège peut s'appliquer", a dit Adam Schiff aux journalistes.

Le différend a éclaté après que l'inspecteur général du renseignement a informé la commission, dans une lettre datée du 9 septembre, qu'il avait reçu une plainte d'un lanceur d'alerte le 9 août qu'il a estimée urgente et crédible et que les règles exigent de ce fait sa transmission au Congrès.

Mais dans une lettre adressée le 13 septembre aux commissions du Renseignement à la Chambre des représentants et au Sénat, le directeur par intérim du renseignement national, Joseph Maguire, a conclu que la plainte ne correspondait pas aux "critères d'urgence" après avoir consulté le département de la Justice.

En raison de ces conclusions, Atkinson n'a pas été en mesure de fournir de détails sur la plainte lors de son audition au Congrès, ont déclaré des parlementaires.

Selon Adam Schiff, le département de la Justice a mal interprété la loi en empêchant Maguire de divulguer le contenu de la plainte.

Un autre démocrate de la commission va plus loin en accusant l'Attorney General, William Barr, de vouloir protéger le président.

"La tâche de M. Barr et du département de la Justice est de protéger le président (...) Et peu importe si cela enfreint les lois", a-t-il dit aux journalistes.

CNN a rapporté jeudi que la Maison blanche et le département de la Justice avaient demandé à Maguire de ne pas transmettre de copie de la plainte au Congrès.

Donald Trump a nié en bloc les accusations, les qualifiant de "Fake News".

"Pratiquement à chaque fois que je parle au téléphone avec un dirigeant étranger, je comprends qu'il peut y avoir beaucoup de personnes de différentes agences américaines qui écoutent, sans parler de celles de l'autre pays", écrit-il sur Twitter.

"Sachant tout cela, quelqu'un est-il assez stupide pour croire que je dirais quelque chose d'inapproprié avec un dirigeant étranger lors d'un appel qui pourrait être aussi 'densément peuplé'?", ajoute-t-il.

AUDITION DE MAGUIRE LA SEMAINE PROCHAINE

La semaine dernière, le président de la commission du Renseignement à la Chambre avait émis une assignation à comparaître visant Maguire pour qu'il transmette la plainte.

Adam Schiff a déclaré jeudi que la commission pourrait être obligée d'aller devant les tribunaux pour forcer l'administration à divulguer le contenu de la plainte.

"J'espère que le directeur par intérim du renseignement national reviendra sur sa décision car je crois comprendre que, conformément à la loi, il peut nous fournir ces informations et que, conformément à la loi, il est tenu de nous les fournir", a-t-il souligné.

Maguire sera auditionné par la commission du Renseignement la semaine prochaine.

(avec Makini Brice et Lisa Lambert; Arthur Connan pour le service français)