Déploiement russe à Kobané, Trump lève les sanctions contre la Turquie

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Syrie: les turcs ecraseront les kurdes s'ils refusent de se retirer, avertit le kremlin[reuters.com]
(Crédits : Huseyin Aldemir)

MOSCOU/ANKARA/WASHINGTON (Reuters) - La police militaire russe a commencé mercredi à se déployer dans le nord-est de la Syrie, dans la ville-symbole de Kobané où les Kurdes étaient parvenus à repousser une offensive du groupe Etat islamique en 2015, au lendemain d'un accord entre Moscou et Ankara visant à mettre fin à l'offensive kurde.

Le Kremlin a dans le même temps haussé le ton contre les combattants kurdes syriens des Unités de protection du peuple (YPG), les prévenant qu'ils seraient "taillés en pièces" par l'armée turque s'ils ne quittaient pas "volontairement" la zone frontalière dans les prochains jours.

Le détachement de la police militaire russe arrivé à Kobané doit superviser, en coordination avec les forces du président syrien Bachar al Assad, le retrait des miliciens kurdes de la "zone de sécurité" qu'Ankara compte établir jusqu'à environ 30 kilomètres de la frontière en territoire syrien.

La ville située à la frontière syro-turque a été désertée par les soldats américains, qui y constituaient une force de dissuasion, après la décision de Donald Trump de retirer ses troupes du nord-est de la Syrie à la veille de l'offensive turque, le 9 octobre.

Aux termes de l'accord conclu mardi à Sotchi entre Recep Tayyip Erdogan et Vladimir Poutine, des garde-frontières syriens devaient reprendre le contrôle des points de passage à partir de ce mercredi.

Puis, dans six jours, les armées russe et turque devraient commencer à mener des patrouilles conjointes dans une bande de 10 km de profondeur en territoire syrien pour vérifier que plus aucun combattant kurde n'y est stationné.

LEVÉE DES SANCTIONS AMÉRICAINES

Le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, s'est entretenu par vidéoconférence avec le commandant des Forces démocratiques syriennes (FDS) pour l'informer notamment que Moscou renforcerait les effectifs de la police militaire russe près de la frontière russo-turque, rapporte mercredi Interfax.

Mardi, le général Mazloum, avait assuré dans une lettre adressée au vice-président américain Mike Pence que leur retrait était terminé, ce dont la Turquie a dit prendre acte.

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a néanmoins mis en garde les YPG mercredi contre toute violation de l'accord de Sotchi. Si les forces kurdes ne se retirent pas, les soldats russes et syriens quitteront la zone frontalière et "tous les groupes kurdes restants seront alors taillés en pièces par l'armée turque", a-t-il dit.

Dmitri Peskov a aussi ironisé sur les garanties réclamées par les Etats-Unis qui ont "préféré abandonner les Kurdes à la frontière et les ont pratiquement forcés à combattre les Turcs".

Donald Trump a annoncé la levée des sanctions américaines contre la Turquie qui, a-t-il dit à la Maison blanche, l'a assuré de la permanence du cessez-le-feu.

Il a précisé avoir donné instruction à son secrétaire au Trésor Steven Mnuchin de lever les sanctions imposées mi-octobre. Elles seront rétablies "s'il se produit quelque chose qui nous déplaît", a prévenu le président américain.

L'ambassadrice américaine auprès de l'Otan, dont les ministres de la Défense, turc compris, se réuniront vendredi à Bruxelles, a demandé mercredi l'ouverture d'une enquête pour déterminer si des crimes de guerre ont été commis par l'armée turque et ses alliés pendant leur offensive.

L'émissaire américain pour la Syrie, James Jeffrey, a déclaré mercredi que les troupes américaines avaient des preuves de crimes de guerre commis par les supplétifs syriens de l'armée turque pendant l'offensive turque, mais pas de "preuves étendues de nettoyage ethnique".

(Andrew Osborn et Ece Toksabay, avec Maxime Rodionov à Moscou, Patricia Zengerle à Washington, Sophie Louet, Jean-Philippe Lefief et Tangi Salaün pour le service français)