L'ancien président égyptien Hosni Moubarak est mort

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L'ancien president egyptien hosni moubarak est mort[reuters.com]
(Crédits : Amr Dalsh)

par Nadine Awadalla et Mahmoud Mourad

LE CAIRE (Reuters) - L'ancien président égyptien Hosni Moubarak, emporté par les soulèvements populaires du "printemps arabe" en 2011 après 30 années au pouvoir, est mort mardi à l'âge de 91 ans.

Allié des pays occidentaux dans la lutte contre l'islamisme politique, incarné en Egypte par les Frères musulmans, Hosni Moubarak a, sur le plan intérieur, réprimé les oppositions et s'est montré incapable de faire décoller l'économie égyptienne, sur fond d'accusations de corruption, jusqu'à sa mise à l'écart par ses pairs militaires en février 2011 face à la contestation de centaines de milliers de jeunes rassemblés sur la place Tahrir du Caire.

Il est mort après plusieurs semaines passées en soins intensifs à la suite d'une intervention chirurgicale.

La présidence et l'armée égyptiennes ont salué la mémoire d'un héros pour son rôle dans la Guerre du Kippour en 1973 et cet ancien chef d'état-major de l'armée de l'air aura droit aux honneurs militaires.

La télévision d'Etat, en annonçant sa mort, a néanmoins émis des critiques sur sa gestion du pays, en rappelant notamment les projets coûteux de villes nouvelles en plein désert sans "vision globale".

Pour Timothy Kaldas, chercheur associé au Tahrir Institute for Middle East Policy, cette couverture médiatique semble destinée à mettre en avant la corruption des années Moubarak pour éviter toute nostalgie au sein de la population.

Arrivé au pouvoir après l'assassinat d'Anouar al Sadate par un commando islamiste en 1981, Hosni Moubarak avait été arrêté deux mois après sa chute, puis condamné à la réclusion à perpétuité pour la mort de 239 manifestants durant cette "Révolution du Nil".

Il a alors passé plusieurs années en prison ou dans des hôpitaux militaires, jusqu'à sa libération en 2017 après l'annulation de cette condamnation.

L'ancien "raïs" a néanmoins été aussi jugé coupable en 2015, avec ses deux fils, de détournement de fonds publics, ce qui leur a valu une peine de trois ans de prison.

INSTABILITÉ

Au fil de ses années au pouvoir, Hosni Moubarak est parvenu à se poser en seul garant de la stabilité de l'Egypte, au point de refuser de désigner un successeur, ne laissant à ses concitoyens qu'une alternative: lui ou le chaos.

Son renversement a effectivement ouvert une période d'instabilité pour l'Egypte.

Les premières élections libres dans le pays ont porté les Frères musulmans au pouvoir avec le président Mohamed Morsi mais ce dernier n'aura tenu qu'un an avant d'être à son tour renversé en 2013 par un soulèvement populaire et par l'armée, qui a progressivement repris toute sa place à la tête du pays avec l'actuel chef de l'Etat, Abdel Fattah al Sissi.

Hosni Moubarak est né le 4 mai 1928 dans le village de Kfar el Moseilha, dans le delta du Nil. Fils d'un petit fonctionnaire, il rejoint l'académie militaire en 1947, optant ultérieurement pour l'armée de l'air, dont il deviendra général.

Il perfectionne sa formation en Union soviétique, où il apprend à piloter des bombardiers, avant de devenir en 1969 chef d'état-major de l'aviation égyptienne.

Sous la houlette du président Anouar Sadate, Moubarak prépare la Guerre du Kippour de 1973, qui permet à l'Egypte de reprendre pied dans le Sinaï, lavant ainsi l'humiliation que l'armée israélienne lui a infligée en occupant la péninsule à la faveur de la Guerre des Six-Jours de 1967. En 1975, il est nommé vice-président.

Hosni Moubarak échappe de peu à la mort un première fois le 6 octobre 1981, lors de l'assassinat de Sadate par un militaire islamiste, et survit ensuite à plusieurs tentatives d'assassinat, dont une spectaculaire contre son convoi en 1995 à Addis-Abeba.

Ses partisans lui savent gré d'avoir évité le chaos après l'assassinat de son prédécesseur, d'avoir ensuite tenu le pays à l'écart des conflits régionaux et d'avoir renoué avec le reste du monde arabe des relations rompues lors du traité de paix de 1979 avec Israël, sans pour autant renier celui-ci.

Mais lorsque, en janvier 2011, les Tunisiens parviennent à renverser Zine ben Ali, donnant ainsi le coup d'envoi du "printemps arabe", la jeunesse égyptienne se soulève à son tour, jusqu'à provoquer sa chute.

(Nadine Awadalla, Omar Fahmy et Mahmoud Mourad; version française Tangi Salaün et Bertrand Boucey)