Coronavirus/Brésil : "Désolé, certains vont mourir", dit Bolsonaro

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Coronavirus: le bresil ferme ses frontieres aeriennes, mais prone les interactions[reuters.com]
(Crédits : Ueslei Marcelino)

par Pedro Fonseca et Marcelo Rochabrun

RIO DE JANEIRO/SAO PAULO (Reuters) - Jair Bolsonaro a émis vendredi des doutes sur le nombre de décès liés au coronavirus à Sao Paulo et a accusé son gouverneur de manipuler les chiffres à des fins politiques, sans apporter de preuves, une nouvelle étape dans la querelle que se livrent sur la question le président brésilien et les élus locaux.

Le chef de l'Etat s'est attiré les foudres d'une grande partie de la classe politique en estimant qu'une paralysie de l'économie serait plus néfaste qu'un confinement généralisé visant à limiter la propagation de l'épidémie, qualifiant le coronavirus de "petite grippe".

Suivant les recommandations des experts en santé publique, la grande majorité des 26 gouverneurs du pays ont interdit les activités commerciales et les services publics non-essentiels afin d'endiguer l'épidémie dans leurs Etats respectifs, notamment à Sao Paulo et Rio de Janeiro, quasiment à l'arrêt.

"Je suis désolé, certaines personnes vont mourir, c'est la vie", a déclaré Jair Bolsonaro lors d'un entretien télévisé vendredi soir. "Vous ne pouvez pas arrêter une usine automobile à cause des accidents routiers", a-t-il ajouté.

Le président d'extrême droite a dit que le bilan semblait "trop élevé" dans l'Etat de Sao Paulo, coeur économique du pays. "Nous devons regarder ce qu'il s'y passe, cela ne peut pas être un jeu chiffré pour favoriser des intérêts politiques", a-t-il poursuivi.

Sao Paulo a rapporté le bilan le plus élevé dans le pays, avec 1.223 cas de contamination et 68 décès liés à l'épidémie.

PLUS DE 3.400 CAS DANS LE PAYS, SELON LE MINISTÈRE DE LA SANTÉ

Plus tôt dans la journée, le gouverneur de Sao Paulo, Joao Doria, ancien allié de Bolsonaro qui devrait être son rival lors de l'élection présidentielle de 2022, a accusé le chef de l'Etat de propager une "désinformation" avec une campagne publicitaire télévisée critiquant les restrictions en vigueur.

Des alliés de Jair Bolsonaro ont partagé sur les réseaux sociaux cette publicité au slogan #LeBrésilNePeutPasS'Arrêter. "Pour le vendeur de quartier, pour les propriétaires de commerces dans les centre-villes, pour les employés de maison, pour des millions de Brésiliens, le Brésil ne peut pas s'arrêter", dit la publicité télévisée, montrant des salles de classe et des rues commerçantes bondées.

Selon deux personnes au fait de la question, cette campagne a été préparée sur demande des services du président sans consultation avec le ministère de la Santé, et a coûté environ 1 million de dollar.

Un représentant du ministère de la Santé a déclaré aux journalistes qu'il ne ferait aucun commentaire sur Bolsonaro et que les recommandations sur la distanciation sociale n'avaient pas changé.

Le gouvernement brésilien a interdit vendredi aux étrangers ne disposant pas d'un titre de résidence d'entrer dans le pays via ses aéroports afin d'éviter la propagation du virus. Émise par le ministère de la Justice et publiée au Journal officiel, cette interdiction prend effet lundi pour une durée de 30 jours.

Plus de 3.400 cas de contamination ont été confirmés au Brésil, selon le dernier bilan communiqué vendredi par le ministère de la Santé, contre près de 1.900 cas lundi. Le nombre de décès s'est alourdi à 92.

La popularité de Bolsonaro a décliné depuis le début de la crise sanitaire, et de nombreuses personnes à travers le pays affichent chaque soir leur désaccord avec Bolsonaro depuis leurs fenêtres.

(avec Tatiana Bautzer et Angelo Amante; version française Jean Terzian)