EDF : Paris espère un accord avec Bruxelles dans les prochaines semaines

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Edf: paris espere un accord avec bruxelles dans les prochaines semaines[reuters.com]
(Crédits : Benoit Tessier)

par Benjamin Mallet

PARIS (Reuters) - La France espère conclure un accord avec la Commission européenne "dans les toutes prochaines semaines" sur une réforme de la régulation du secteur nucléaire français et sur une réorganisation d'EDF censées améliorer les perspectives du groupe, a-t-on appris de sources gouvernementales.

Paris tente depuis plusieurs mois de finaliser ses négociations avec Bruxelles en vue d'une nouvelle régulation du parc nucléaire d'EDF, qui passerait par une hausse du prix de vente de sa production et s'accompagnerait d'une refonte du groupe, pour lui permettre notamment d'investir davantage dans les énergies renouvelables.

La Commission européenne a cependant demandé des garanties strictes afin que la nouvelle régulation du nucléaire ne bénéficie pas aux autres activités d'EDF. Quant au projet de réorganisation du groupe, nommé Hercule, il se heurte à une vive opposition des syndicats.

"On a quand même franchi des pas importants, on a un accord sur un certain nombre de grands principes et maintenant les discussions se poursuivent sur le détail", a déclaré une source gouvernementale à des journalistes.

"On ne sous-estime pas le risque qu'on achoppe sur tel ou tel détail, mais le scénario dans lequel on se place, c'est le scénario d'une conclusion favorable de nos discussions en cours avec la Commission."

Toujours de source gouvernementale, Paris et Bruxelles se sont notamment entendus sur les grandes lignes d'une nouvelle organisation des activités hydroélectriques d'EDF, sur les différents éléments à prendre en compte dans le prix du nucléaire et sur une nouvelle organisation globale du groupe.

Le futur prix n'est cependant pas fixé et doit encore faire l'objet de discussions techniques avec Bruxelles, de même que le sujet de la mutualisation des fonctions supports et de celles qui seront séparées entre elles par des "murailles de Chine".

LE CALENDRIER ÉLECTORAL ENTRE EN JEU

Alors que des sources évoquaient ces derniers jours une potentielle réunion "conclusive" avec Bruxelles fin mars, l'exécutif n'est "pas entré dans une logique de date-butoir" mais reconnaît que les discussions doivent s'accélérer afin que le Parlement puisse ensuite examiner et voter une loi sur le sujet avant l'élection présidentielle de 2022.

"Il nous faut à peu près un an entre le moment où on s'est mis d'accord avec la Commission et le moment où on arrive à boucler le processus. Donc, un an avant mai 2022, ça nous amène dans les toutes prochaines semaines."

En conférence de presse, Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, a déclaré jeudi qu'il fallait que les discussions avec Bruxelles "aboutissent vite si on veut que la réforme soit mise en oeuvre avant la prochaine élection présidentielle".

Du côté de la Commission européenne, on fait état de "contacts en cours avec les autorités françaises sur la réforme de l'accès régulé à l'énergie nucléaire et sur les concessions hydroélectriques". "Nous ne pouvons pas présumer du calendrier ou de l'issue de ces contacts", a dit un porte-parole de l'exécutif européen.

Le projet Hercule passerait par la création d'une société de tête regroupant le parc nucléaire et thermique, l'ingénierie et les fonctions transversales ("EDF Bleu"), qui pourrait être intégralement renationalisée.

EDF, dont l'Etat détient aujourd'hui 83,7% du capital, constituerait en outre un ensemble "Vert" incluant la commercialisation, les services, les énergies renouvelables, la distribution et les activités à l'international, dont le capital serait ouvert à des actionnaires minoritaires - potentiellement à hauteur de 30% - et qui bénéficierait d'un financement propre.

Une troisième entité spécifique non consolidée ("Azur") serait créée pour l'hydroélectricité, dans un système de quasi-régie permettant d'éviter une mise en concurrence des barrages du groupe et mettant fin à un contentieux de longue date avec Bruxelles.

Ce projet suscite une vive opposition des syndicats et d'une partie de la classe politique, qui mettent en garde contre le risque de démantèlement et le début d'une privatisation d'EDF.

"Puisque c'est une ligne rouge, il ne pourra pas y avoir d'accord avec la Commission européenne qui aboutisse à un éclatement d'EDF en différentes entités totalement disjointes qui pourraient par exemple être cotées en bourse séparément les unes à côté des autres", a-t-on réaffirmé de source gouvernementale.

En Bourse, l'action d'EDF grimpait de 10,41% à 10,92 euros à un peu plus d'une heure de la clôture, affichant la plus forte hausse de l'indice des valeurs vedettes européennes Stoxx 600.

(Benjamin Mallet, avec Elizabeth Pineau, Gwénaëlle Barzic, Sarah White et Leigh Thomas, édité par Bertrand Boucey)