Moscou dit retirer des troupes, l'Otan et Kiev veulent des preuves

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Moscou dit retirer des troupes, l'otan et kiev veulent des preuves[reuters.com]
(Crédits : Sergey Pivovarov)

par Dmitry Antonov et Sarah Marsh

MOSCOU (Reuters) - La Russie a affirmé mardi avoir commencé à retirer une partie de ses troupes déployées le long des frontières de l'Ukraine et raillé une nouvelle fois l'"hystérie" des pays occidentaux sur une possible invasion, mais l'Otan et Kiev ont demandé à voir des preuves avant de parler de désescalade.

Le ministère russe de la Défense a déclaré, vidéos à l'appui, qu'une partie des quelque 130.000 soldats positionnés près des frontières ukrainiennes retournaient dans leurs bases après avoir terminé leurs exercices militaires, sans en préciser le nombre exact.

"Nous avons toujours dit que les troupes retourneraient dans leurs bases à la fin des exercices et c'est ce qui se produit", a commenté le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

Le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, s'est félicité des signaux envoyés ces deux derniers jours par la Russie laissant entendre qu'elle veut privilégier le dialogue pour résoudre cette crise, comme l'a répété mardi son chef de la diplomatie, Sergueï Lavrov, après avoir reçu à Moscou son homologue polonais.

Mais alors que les Etats-Unis ont répété que la Russie pourrait lancer dès mercredi une offensive de grande ampleur, Jens Stoltenberg s'est montré prudent sur la réalité d'un désengagement militaire aux frontières de l'Ukraine.

"Il y a des signes provenant de Moscou indiquant que l'approche diplomatique reste de mise. C'est pour nous un motif d'optimisme prudent. Mais jusqu'ici nous n'avons constaté aucun signe de désescalade sur le terrain de la part des Russes", a-t-il déclaré à la presse.

Le chef de l'Alliance atlantique a ajouté que l'armée russe avait pour habitude de laisser du matériel derrière elle quand elle termine des exercices, ce qui lui permet de reprendre rapidement les positions qu'elle a abandonnées.

Le chef de la diplomatie ukrainienne, Dmitro Kouleba, s'est également montré circonspect, soulignant que Kiev jugerait la Russie sur des actes, pas sur des mots.

"Nous entendons en permanence des déclarations contradictoires de la part de la Fédération russe donc nous avons une règle... nous ne croyons que ce que nous voyons. Si nous voyons un retrait, nous croirons à la désescalade", a-t-il dit, selon des propos rapportés par Interfax Ukraine.

MOSCOU DIT QUE L'OCCIDENT A ÉTÉ "HUMILIÉ"

Le ton a été similaire en Allemagne, dont le chancelier Olaf Scholz s'est entretenu mardi avec Vladimir Poutine à Moscou, notamment des conséquences d'un conflit sur le gazoduc Nord Stream 2(), et en France, dont le président Emmanuel Macron s'est rendu la semaine dernière dans la capitale russe.

Le porte-parole du gouvernement français, Gabriel Attal, a cependant souligné qu'un retrait même partiel des forces russes serait un "signal positif" [(nL8N2UQ460]), alors que Paris et Berlin tentent de relancer la mise en oeuvre des accords de Minsk, conclus en 2014 en "format Normandie" (Ukraine, Russie, France, Allemagne) et qui visaient à ramener la paix dans le Donbass.

Au même moment, la Douma d'Etat, chambre basse du Parlement russe, appelait Vladimir Poutine à reconnaître l'indépendance des deux régions sécessionnistes russophones de l'Est de l'Ukraine, les républiques autoproclamées de Donetsk et Louhansk.

La Russie, qui a toujours démenti toute velléité d'invasion de l'Ukraine, disant seulement réclamer des garanties pour assurer sa sécurité, dont la non-adhésion de Kiev à l'Otan, a présenté le retrait de troupes annoncé mardi comme la preuve d'un emballement injustifié des pays occidentaux, alors que Washington et Londres ont multiplié ces derniers jours les déclarations alarmistes.

"Le 15 février 2022 restera dans l'Histoire comme le jour où la guerre de propagande menée par l'Occident a échoué. Humilié et détruit sans même tirer un coup de feu", a ironisé la porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Maria Zakharova.

Sergueï Lavrov, a dénoncé le "terrorisme informationnel" des pays occidentaux (), tandis que le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a fustigé leur "campagne de désinformation" et leur "hystérie sans fondement".

Des images vidéos fournies par le ministère de la Défense et diffusées mardi par l'agence RIA montrent le chargement de chars et d'autres véhicules blindés sur des wagons de train.

Selon le ministère, ces images illustrent le retour de troupes russes dans leurs bases mais Reuters n'a pu confirmer dans quelle direction elles se dirigeaient. Le ministère a ajouté que d'autres unités rentreraient dans leurs camps par la route.

Le commandement Sud de l'armée russe a signalé de son côté le départ d'unités qui avaient été déployées en Crimée, région ukrainienne annexée par la Russie en 2014.

(Reportage Anton Kolodyazhnyy, rédigé par Olzhas Auyezov, version française Tangi Salaün, édité par Sophie Louet)