France : Le verdict du procès des attentats du 13-Novembre attendu mercredi

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France: le verdict du proces des attentats du 13-novembre attendu mercredi[reuters.com]
(Crédits : Gonzalo Fuentes)

PARIS (Reuters) - Les magistrats de la cour d'assises spécialement composée de Paris rendront mercredi leur verdict contre les accusés du procès des attentats du 13 novembre 2015, un moment aussi attendu que redouté par les parties civiles après dix mois d'audiences éprouvantes, les plus longues de l'histoire judiciaire française.

Les procureurs du parquet national antiterroriste ont requis entre six ans de prison et la perpétuité incompressible contre les 20 accusés, dont 11 étaient présents dans le box et trois ont comparu libres, les six autres - des dirigeants du groupe Etat islamique pour la plupart présumés morts - ayant été jugés par contumace.

En l'absence des instigateurs et des principaux acteurs, dix mois d'audience n'auront permis de lever qu'une partie du voile sur les attentats menés quasi simultanément par trois commandos de trois djihadistes au stade de France, à Saint-Denis, sur les terrasses de cafés parisiens et dans la salle de concert du Bataclan, faisant 130 morts, le bilan le plus lourd sur le sol français depuis la Seconde Guerre mondiale.

Après six ans de mutisme, Salah Abdeslam, considéré comme le seul membre des commandos encore en vie, est pourtant sorti de son silence, d'abord pour provoquer l'auditoire en se présentant en "soldat de l'Etat islamique" et en justifiant les attentats au nom des "persécutions" subies selon lui par les musulmans, puis pour s'expliquer, en affirmant avoir renoncé à déclencher son gilet explosif, et s'excuser des souffrances subies par les victimes et leurs familles.

"J'ai reconnu que je n'étais pas parfait. J'ai fait des erreurs, c'est vrai, mais je ne suis pas un assassin, je ne suis pas un tueur", a encore clamé le Franco-Marocain de 32 ans lundi lors de sa dernière prise de parole devant la Cour, selon les journalistes présents dans la salle d'audience.

"Certains vous diront que mes excuses sont insincères mais qui peut présenter des excuses insincères à l'égard de tant de souffrances. Il n'a échappé à personne l'évolution qui a été la mienne."

Pour Arthur Dénouveaux, président de Life for Paris, une association de victimes des attentats du 13-Novembre, le long et souvent douloureux cheminement des audiences a de fait apporté aux parties civiles bien plus qu'elles n'espéraient au départ.

PERPÉTUITÉ INCOMPRESSIBLE?

"Le procès a été au-delà de nos attentes, parce que les terroristes ont parlé, parce que les terroristes ont d'une certaine manière répondu à nos témoignages. C'était tellement inattendu, ça n'était jamais arrivé dans un procès terroriste", a-t-il dit à Reuters.

"Quand Salah Abdeslam a décidé de parler pour s'excuser, je ne sais pas s'il était sincère ou pas, mais il a senti qu'il devait faire cet effort, donc c'est important."

Les excuses de Salah Abdeslam n'ont guère ému le parquet, qui a requis contre le principal accusé la perpétuité incompressible, une peine prononcée à seulement quatre reprises en France contre des auteurs de crimes violents sur mineurs, qui lui ôterait tout espoir de libération.

Cette peine exceptionnelle qui se voudrait "à la hauteur des souffrances des victimes", selon les termes d'un de ses avocats, Martin Vettes, reviendrait à le condamner à une "mort lente", a dit son autre conseillère, Olivia Ronen.

Est-ce qu'imposer la perpétuité réelle à Salah Abdeslam, après l'avoir entendu se dépeindre en jeune un peu paumé qui n'a pas su dire "non" quand il a été enrôlé, quelques jours avant les attentats, par son ami Abdelhamid Abaaoud, considéré comme le chef des commandos, mais qui a su se raviser avant de commettre l'irréparable, "vous rendra meilleurs?", a demandé Me Martin Vettes au président de la Cour, Jean-Louis Périès, et à ses assesseurs.

La réponse des cinq magistrats professionnels apparaît comme le principal enjeu du verdict qui sera rendu mercredi après 17h00 (15h00 GMT).

En plus des six djihadistes jugés par contumace, le parquet a requis la perpétuité assortie de peines de sûreté de 22 à 30 ans contre trois autres accusés poursuivis pour participation à une association de malfaiteurs terroriste criminelle et pour complicité de meurtres: Mohamed Abrini, Mohamed Bakkali et Osama Krayem.

Quel que soit le verdict et en attendant un éventuel procès en appel, la fin de ce long feuilleton est un "soulagement", dit Arthur Dénouveaux, "parce que cela signifie que la justice a fait son travail, que ce procès est terminé et que je peux avancer dans la vie."

(Reportage de Lea Guedj, rédigé par Tangi Salaün, édité par Sophie Louet)