La BCE publie un texte très critique envers le bitcoin

reuters.com  |   |  635  mots
Photo d'illustration du bitcoin[reuters.com]
(Crédits : Dado Ruvic)

FRANCFORT (Reuters) - Le bitcoin bénéficie d'un soutien artificiel et il ne doit pas être légitimé par les autorités réglementaires ou par les sociétés financières car il s'apparente avant tout à un instrument de spéculation, a déclaré mercredi la Banque centrale européenne (BCE).

Dans une note de blog rédigée sur un ton d'une sévérité inhabituelle, la BCE estime que la stabilisation récente du cours du bitcoin s'apparente à "un dernier sursaut déclenché artificiellement avant de prendre le chemin de l'insignifiance".

"Les grands investisseurs en bitcoin sont ceux qui ont le plus grand intérêt à entretenir l'euphorie", ajoutent les auteurs du texte, Ulrich Bindseil et Jürgen Schaaf, en évoquant le rôle joué depuis fin 2020 par "des sociétés isolées" et "certaines sociétés de capital-risque".

Ils précisent que les investissement de fonds de capital-risque dans le secteurs des cryptoactifs et de la blockchain représentaient 17,9 milliards de dollars mi-juillet.

Ils ne fournissent toutefois pas de preuve de manipulation de cours.

Le bitcoin et d'autres cryptomonnaies ont été présentés ces dernières années comme une forme alternative de monnaie censée protéger les investisseurs contre les effets néfastes des politiques inflationnistes des grandes banques centrales, dont la BCE.

Mais la chute de 75% de la valeur du bitcoin depuis un an, alors même que l'inflation s'accélérait, et une série de scandales impliquant des acteurs du secteur des "crypto", dont la faillite de la plate-forme FTX au début du mois, ont redonné l'avantage à leurs détracteurs.

Le bitcoin, qui avait atteint près de 69.000 dollars en novembre 2021, s'échangeait mercredi aux alentours de 16.800 dollars.

"NI SYSTÈME DE PAIEMENT NI INSTRUMENT D'INVESTISSEMENT"

Un peu partout dans le monde, les autorités de régulation financière s'efforcent de donner un cadre juridique à l'univers complexe des "crypto", qui regroupe des activités allant de l'émission de "stablecoins", dont la valeur est censée être liée à celle de monnaies conventionnelles, au prêt d'instruments fondés sur la "blockchain".

Le blog de la BCE estime que cette régulation ne doit pas être assimilée à "une approbation".

"Puisque le bitcoin ne semble approprié ni comme système de paiement ni comme instrument d'investissement, il ne devrait être traité comme aucun des deux du point de vue réglementaire et ne devrait donc pas être légitimé", ajoutent les auteurs du texte.

Dans un courrier électronique à Reuters, Bindseil a précisé que les cryptomonnaies devraient être encadrées par les autorités de régulation en tant qu'instrument de pari ou de jeu.

Les auteurs du texte publié sur le site de la BCE regrettent aussi que l'intérêt manifesté pour les crypto par des gestionnaires d'actifs, des fournisseurs de services de paiement, des assureurs et des banques "suggère aux petits investisseurs que l'investissement dans le bitcoin est sain".

"Le secteur financier devrait être conscient des dommages à long terme liés à la promotion des investissements en bitcoin en dépit des profits à court terme qu'ils peuvent en retirer", poursuivent-ils.

Lundi, lors d'une audition au Parlement européen, la présidente de la BCE, Christine Lagarde, a déclaré que le projet de règlement européen portant sur les cryptoactifs MiCA, en cours de discussion, devrait sans doute être élargi à l'avenir.

Ses propos ont été interprétés comme une allusion au bitcoin, qui n'entre pas dans le champ actuel d'application du règlement MiCA car il n'est lié à aucune entité juridique basée dans l'Union européenne, ce qui signifie que les futures règles ne pourraient s'appliquer qu'aux plates-formes d'échange.

(Reportage Francesco Canepa, version française Marc Angrand, édité par Blandine Hénault)