A Ramstein, pas d'accord entre alliés sur la livraison de chars Leopard à Kyiv

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Reunion du groupe de contact sur la defense de l'ukraine sur la base militaire de ramstein[reuters.com]
(Crédits : Wolfgang Rattay)

par Idrees Ali et Sabine Siebold

BASE AERIENNE DE RAMSTEIN, Allemagne (Reuters) - Aucun accord sur la fourniture à l'Ukraine de chars d'assaut allemands Leopard n'a pu être conclu vendredi à Ramstein, où étaient réunis les ministres de la Défense des alliés de Kyiv, même si Berlin a nié faire obstacle à cette livraison.

Prenant la parole à l'issue de cette conférence organisée sur la base aérienne de l'Otan, dans l'ouest de l'Allemagne, le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin a souligné qu'il était crucial de livrer de nouveaux équipements militaires à l'Ukraine avant l'intensification attendue des combats entre forces russes et ukrainiennes au printemps.

"La Russie se regroupe, recrute et tente de se rééquiper", a-t-il dit. "Ce n'est pas le moment de ralentir."

"Nous avons une fenêtre d'opportunité entre aujourd'hui et le printemps ou n'importe quel moment qu'ils (les Ukrainiens) choisiront pour lancer leur contre-offensive, ce n'est pas beaucoup de temps", a encore insisté le chef du Pentagone.

Lloyd Austin, qui a salué en l'Allemagne un "allié fiable", a estimé que la liste d'équipements à envoyer à l'Ukraine sur laquelle les ministres s'étaient entendus vendredi était très complète, même sans chars Leopard. "L'Ukraine n'est pas dépendante d'une seule plate-forme", a-t-il dit.

Le gouvernement allemand dispose d'un droit de veto sur l'exportation de ces chars d'assaut, et le gouvernement du chancelier Olaf Scholz semble réticent à donner son autorisation par crainte de provoquer une escalade de la Russie, malgré de très fortes pressions de Kyiv et de ses alliés occidentaux.

Berlin dit vouloir agir en accord avec ses alliés, comme l'a confirmé le nouveau ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius.

"Il y a de bonnes raisons pour les livraisons et il y a de bonnes raisons contre, et compte tenu de l'ensemble de la situation d'une guerre qui dure depuis près d'un an, tous les avantages et les inconvénients doivent être pesés très soigneusement", a-t-il déclaré à des journalistes, sans détailler ce qu'il percevait comme des avantages ou des inconvénients.

"L'impression, qui est apparue occasionnellement, selon laquelle il existe une coalition étroite et que l'Allemagne y fait obstacle, cette impression est fausse", a-t-il ajouté.

COALITION

Les chars Leopard, que l'Allemagne a fabriqués par milliers durant la Guerre froide, sont actuellement utilisés par plusieurs armées européennes et certains pays comme la Pologne et la Finlande ont d'ores et déjà annoncé être prêts à en envoyer en Ukraine.

La Finlande a annoncé vendredi une nouvelle aide de plus de 400 millions d'euros pour des équipements de défense à l'Ukraine, qui n'inclut pas les chars Leopard dont elle dispose.

Vendredi matin, la Pologne a prévenu qu'elle pourrait envoyer ses chars Leopard sans l'autorisation de Berlin.

"S'il y a une forte résistance, nous serons prêts à prendre des mesures non standard", a déclaré le vice-ministre des Affaires étrangères Pawel Jablonski à la radio privée RMF FM.

Le ministre polonais de la Défense, Mariusz Blaszczak, a toutefois fait part de son optimisme à l'issue de la réunion de Ramstein. "Je suis persuadé que nous parviendrons à bâtir une coalition", a-t-il dit.

L'Ukraine et la Russie s'appuient principalement sur les chars T-72 de l'ère soviétique, détruits par centaines depuis le début, le 24 février 2022, de la guerre que le président russe Vladimir Poutine qualifie d'"opération militaire spéciale".

Moscou a estimé vendredi que la livraison de chars à Kyiv ne changerait pas le cours du conflit et que l'Occident regretterait d'être dans l'"illusion" d'une possible victoire de l'Ukraine.

A Ramstein, le chef d'état-major interarmes des Etats-Unis, le général George Brown, a averti qu'il serait "très difficile pour l'Ukraine cette année d'expulser toutes les forces russes de toutes les portions de territoire occupées par la Russie".

(Reportage Idrees Ali et Sabine Siebold; avec la contribution de Tom Balmforth à Kyiv, rédigé par Idrees Ali et Matthias Williams, Version française Kate Entringer, Blandine Hénault et Jean-Stéphane Brosse)