Cinquième jour de raids sur la Ghouta, l'Onu réclame une trêve

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Cinquieme jour de raids sur la ghouta, l'onu reclame une treve[reuters.com]
(Crédits : Bassam Khabieh)

par Suleiman Al-Khalidi

AMMAN (Reuters) - Des avions de combat ont bombardé jeudi l'enclave rebelle de la Ghouta orientale pour le cinquième jour consécutif, l'un des assauts aériens les plus violents en sept ans de guerre civile.

Le Conseil de sécurité des Nations unies tenait réunion, jeudi, à la demande de la Russie pour étudier un projet de résolution prévoyant une trêve humanitaire de trente jours dans toute la Syrie.

Au moins 416 personnes ont été tuées, dont 150 enfants, dans ce secteur rural situé à la périphérie de Damas depuis dimanche soir, selon le décompte établi par l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).

Plus de 2.100 personnes ont également été blessées dans les frappes menées par les forces syriennes et ses alliés. Les avions ont ciblé des quartiers résidentiels ainsi que, selon les organisations caritatives, une douzaine d'hôpitaux qui sont désormais dans l'incapacité de soigner les blessés.

Panos Moumtzis, coordinateur humanitaire des Nations unies pour la Syrie, a déclaré que les maisons étaient privées, en plein hiver, d'eau, d'électricité et de nourriture. A Harasta, une des communes de la région, 80% des habitants vivent sous terre.

"NOUS SERONS JUGÉS PAR L'HISTOIRE"

"Il faut éviter un massacre, parce que nous serons jugés par l'Histoire", a déclaré l'envoyé spécial des Nations unies pour la Syrie Staffan de Mistura, en demandant au Conseil de sécurité de voter une résolution sur un arrêt des hostilités.

Le Conseil de sécurité s'est réuni pour examiner une résolution déposée par le Koweït et la Suède qui réclame "un arrêt des hostilités dans toute la Syrie pour toutes les opérations militaires à l'exception de celles qui visent l'Etat islamique (...), Al Qaïda et le Front al Nosra".

Cette trêve durerait trente jours, pour permettre l'acheminement d'une aide et des évacuations médicales.

Olof Skoog, représentant de la Suède à l'Onu, a dit espérer un vote dès ce jeudi. Son homologue russe, Vassili Nebenzia, a toutefois prévenu qu'il proposerait des amendements au texte.

La Russie, principale alliée de Damas, s'est déclarée prête à soutenir une trêve de trente jours, mais en excluant les groupes armés islamistes qu'elle dit prendre pour cible dans la Ghouta orientale.

La région, qui abrite quelque 400.000 habitants, est l'une des "zones de désescalade" définies par la Russie, l'Iran et la Turquie pour favoriser des trêves localisées en Syrie, mais les combats n'y ont jamais cessé.

Les rebelles de la Ghouta déclarent que la présence dans le secteur d'un petit groupe de combattants de l'ex-Front al Nosra, ancienne branche syrienne d'Al Qaïda, sert constamment de prétexte à Damas et Moscou pour assiéger et bombarder l'enclave.

"GUERRE ABSOLUE CONTRE LES TERRORISTES"

Moscou et Damas affirment que leur campagne de bombardements est nécessaire pour éliminer les rebelles qui tirent des obus de mortier sur la capitale.

"Ceux qui soutiennent les terroristes sont responsables" de la situation dans la Ghouta orientale, a déclaré jeudi le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov lors d'une conférence téléphonique avec des journalistes.

"La Russie, la Syrie et l'Iran n'appartiennent pas à cette catégorie d'Etats, car ils mènent une guerre absolue contre les terroristes en Syrie", a ajouté le porte-parole du Kremlin.

A Genève, Staffan de Mistura a reconnu que l'hypothèse d'un cessez-le-feu dans la Ghouta était très incertaine.

"Je l'espère. Mais ce sera difficile. C'est extrêmement urgent", a-t-il déclaré à Reuters à son arrivée à l'antenne des Nations unies.

Dans un communiqué, la Maison blanche a indiqué que Washington soutenait l'appel de l'Onu à une trêve afin d'acheminer de l'aide et d'évacuer les blessés ou les malades.

"Les Etats-Unis appellent également la Russie et ses partenaires à respecter leurs obligations concernant les zones de désescalade, en particulier dans la Ghouta orientale", a dit la présidence américaine.

DERNIÈRE ZONE DÉTENUE PAR LES REBELLES

Selon les secouristes et les habitants de la Ghouta, des hélicoptères de l'armée syrienne larguent des barils d'explosif - des barils de pétrole remplis d'explosifs et de shrapnel - sur les places de marché ou les centres médicaux. Moscou et Damas démentent utiliser ce type d'armement et viser des civils.

Les habitants et l'opposition accusent le gouvernement syrien et ses alliés de pratiquer délibérément une politique de la terre brûlée afin de forcer les rebelles à la capitulation, d'autant que la Ghouta orientale est la dernière zone tenue par la rébellion près de Damas.

"Ils veulent briser notre volonté et transformer la Ghouta en un autre Alep, mais ils rêvent", affirme Youssef Doughmi, qui habite la ville dévastée d'Arbin.

"L'idée des Russes, c'est la soumission complète au régime autoritaire de (Bachar al) Assad. Ils n'ont pas besoin d'excuses pour attaquer la Ghouta", déclare Wael Alouane, porte-parole du groupe insurgé Failak al Rahman, considéré comme terroriste par le régime de Damas.

(Avec Ellen Francis, Lisa Barrington et Angus MacDowall à Beyrouth, Tuvan Gumrucku à Ankara, Stephanie Nebehay et Tom Miles à Genève, Polina Nikolskaya à Moscou, Michelle Nichols à l'OnuJean-Stéphane Brosse et Eric Faye pour le service français)