Pays-Bas : Le parlement reconnaît le "génocide" arménien, pas le gouvernement

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Le parlement neerlandais reconnait le genocide armenien[reuters.com]
(Crédits : Francois Lenoir)

par Stephanie van den Berg

LA HAYE (Reuters) - Les députés néerlandais ont adopté jeudi un texte reconnaissant le "génocide" arménien de 1915, rejoignant ainsi la dizaine d'autres pays de l'Union européenne qui ont déjà fait de même.

Ankara reconnaît qu'un grand nombre d'Arméniens sont morts lors de combats contre les forces ottomanes en 1915, dans le cadre de la Première Guerre mondiale, mais conteste l'idée qu'il y a eu alors une volonté systématique de les exterminer, rejetant de ce fait le qualificatif de "génocide".

La décision des députés, adoptée avec le soutien de tous les grands partis néerlandais, va tendre un peu plus les relations entre La Haye et Ankara, déjà difficiles depuis que les Pays-Bas ont interdit à un ministre turc de faire campagne l'an dernier sur leur territoire.

Le ministère turc des Affaires étrangères n'a pas tardé à réagir, en condamnant vivement jeudi soir le vote du parlement néerlandais. Le ministère a fait remarquer que la décision n'était pas juridiquement contraignante et a noté que le gouvernement néerlandais avait indiqué que cette reconnaissance ne deviendrait pas pour autant la position officielle des Pays-Bas.

Le gouvernement néerlandais a de fait déclaré que malgré l'ampleur du soutien à la motion -- seuls trois députés ont voté contre sur un total de 150, il ne ferait pas de la reconnaissance du génocide la position officielle du pays.

UNE DEUXIÈME MOTION ADOPTÉE

"Le gouvernement ne suivra pas l'avis du parlement", a souligné à la télévision néerlandaise la ministre des Affaires étrangères des Pays-Bas, Sigrid Kaag, qui a appelé à "la plus grande prudence lorsqu'on applique le terme de génocide à des événements du passé".

"Le gouvernement tient à être très prudent dans ses relations avec la Turquie, qui ont été meilleures".

Le 5 février, les Pays-Bas avaient fait savoir qu'ils ne chercheraient pas, en l'état actuel des choses, à nommer un nouvel ambassadeur en Turquie. L'affaire du ministre turc venu faire campagne parmi la communauté turque néerlandaise, et expulsé de ce fait des Pays-Bas, a provoqué un net refroidissement entre les deux pays.

Samedi, la Turquie a convoqué le chargé d'affaires néerlandais à Ankara pour lui faire part de son irritation face au vote à venir au parlement néerlandais.

"La politisation des événements de 1915, en les tirant de leur contexte historique, est inacceptable", avait alors déclaré le porte-parole du ministère turc des Affaires étrangères, Hami Aksoy.

Un deuxième texte, adopté lui aussi jeudi, stipule qu'un responsable gouvernemental néerlandais devrait assister, le 24 avril, à la journée officielle du souvenir du génocide, en Arménie. Par le passé, c'est l'ambassadeur des Pays-Bas à Erevan qui y a assisté. A cette motion, Sigrid Kaag a répondu que le gouvernement allait envisager comment être représenté au mieux lors des commémorations d'Erevan.

(Avec Toby Sterling, Eric Faye pour le service français)