Le bras de fer autour de l'affaire Skripal se durcit entre Londres et Moscou

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Affaire skripal: l'ultimatum lance par londres a moscou expire a minuit[reuters.com]
(Crédits : Henry Nicholls)

MOSCOU/LONDRES (Reuters) - Le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a redit mardi que la Russie n'avait rien à voir avec l'empoisonnement de l'ancien agent double russe Sergueï Skripal en Grande-Bretagne où un ultimatum lancé par Londres à Moscou expire à minuit.

La Première ministre britannique, Theresa May, a exigé lundi de Vladimir Poutine qu'il s'explique sur l'utilisation d'un gaz neurotoxique de qualité militaire d'un type développé en Russie.

Le gaz appartient à la famille d'agents innervants Novitchok développée par l'Union soviétique dans les années 1970 et 1980, a précisé Theresa May devant la Chambre des communes.

Soit Moscou est directement responsable de l'empoisonnement de Sergueï Skripal et de sa fille, Ioulia, soit il a permis aux agresseurs de se procurer l'agent neurotoxique utilisé à Salisbury le 4 mars, a-t-elle déclaré.

Sergueï Lavrov a reproché mardi à la Grande-Bretagne de ne pas lui avoir donné accès aux échantillons prélevés à Salisbury, ville du sud de l'Angleterre où l'ex-agent double et sa fille sont hospitalisés dans un état grave.

S'agissant de l'ultimatum, il l'a balayé d'un revers de main notant qu'"il conviendrait de se souvenir que l'ère du colonialisme est depuis longtemps révolue".

L'ambassadeur de Russie en Grande-Bretagne, Alexander Yakovenko, a été convoqué au Foreign Office et prié de dire avant ce mardi minuit ce qu'il s'est passé au risque pour la Russie de s'exposer à des représailles sous forme de sanctions politiques et économiques.

Certaines de celles-ci pourraient être liées à la tenue de la Coupe du monde de football cet été en Russie. D'autres, plus problématiques pour le Kremlin et l'oligarquie russe car frappant au portefeuille, pourraient concerner l'accès à la City et à sa myriade de services financiers.

L'UE, LA FRANCE S'INDIGNENT

Le secrétaire au Foreign Office, Boris Johnson, a estimé que si Moscou ne répondait pas de manière satisfaisante, la réponse des autorités britanniques serait "comparable mais solide".

"Mais on ne peut pas exclure le fait qu'ils (les Russes) aient une explication", a-t-il ajouté.

A Londres, la ministre de l'Intérieur, Amber Rudd, a déclaré que l'enquête "avançait bien" et que la police fournirait de plus amples informations dans le courant de la journée.

Exigeant une enquête impartiale, le ministre russe des Affaires étrangères a dressé un parallèle avec "l'affaire Litvinenko", un ancien agent du KGB, détracteur de Vladimir Poutine, mort à Londres en 2006 après avoir bu du thé contenant une substance radioactive, le polonium 210.

Une enquête britannique a conclu que l'assassinat d'Alexandre Litvinenko avait probablement été approuvé par Vladimir Poutine et commis par deux Russes, Dmitri Kovtoune et Andreï Lougovoï, un ancien du KGB devenu par la suite député.

Le Kremlin a démenti toute implication.

L'ambassadeur de Grande-Bretagne à Moscou a été convoqué au ministère des Affaires étrangères pour fournir des explications sur l'affaire Skripal, rapporte l'agence de presse Interfax.

Moscou se dit victime d'une campagne de dénigrement de la part des autorités britanniques. L'Union européenne et les Etats-Unis ont apporté leur soutien à Londres.

Mardi, l'Union européenne a jugé "choquant" l'attentat commis contre Sergueï Skripal, souhaitant comme Londres que justice soit faite et se disant disposée à "offrir son soutien si nécessaire".

A Paris, le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, a exprimé à son homologue britannique, Boris Johnson, la solidarité de la France après la "tentative d'assassinat totalement inacceptable" de l'ex-agent double russe.

(Katya Golubkova et Polina Nikolskaya à Moscou, Guy Faulconbridge et Michael Holden à Londres, Tangi Salaün et Gilles Trequesser pour le service français)