Un rapport parlementaire alarmant sur les Ehpad

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Un rapport parlementaire alarmant sur les ehpad[reuters.com]
(Crédits : Regis Duvignau)

PARIS (Reuters) - Un rapport parlementaire rendu mercredi fait le constat d'une "profonde crise" dans les Ehpad et préconise de doubler le ratio de soignants, à la veille d'une journée de grève prévue dans ces établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).

"Les signaux faibles tenant au malaise croissant des professionnels ou à l'anxiété persistante des familles, perceptibles depuis déjà quinze ans, ont fait place à une remise en cause plus nette et largement partagée", notent les députées Monique Iborra (La République en marche) et Caroline Fiat (La France insoumise) en introduction de ce rapport, lancé dans le cadre d'une mission parlementaire de septembre 2017.

Parmi les propositions phares du texte consulté par Reuters, les députées proposent de porter le ratio de soignants à 60 employés pour cent résidents d'ici quatre ans.

Elles estiment qu'il s'agit d'une "norme minimale" pour assurer que les résidents de ces maisons bénéficient d'une heure et demie de soin par jour, contre moins d'une heure actuellement, avec un taux actuel de l'ordre de 24,5 aides-soignants et 6 infirmiers pour 100 résidents.

"Ce n'est pas une norme exponentielle,(..) c'est vraiment la norme minimale actuelle, qui, je l'ai appris hier avec énormément de regret et de colère, ne sera pas suivie d'effet par madame la ministre", a déclaré mercredi Caroline Fiat, députée La France insoumise sur BFM TV.

"MALTRAITANCE INSTITUTIONNELLE"

Elle dénonce par ailleurs une situation "ubuesque": "Pour 1.900 euros, ces personnes n'ont pas de soins dignes de ce nom. Elles rentrent pour subir une maltraitance institutionnelle qui est maintenant connue et actée", poursuit-elle, soulignant l'urgence d'une amélioration du ratio de soignants.

Les deux rapporteures sont favorables à une diminution des frais restant à la charge des pensionnaires des Ehpad.

Leur rapport remis à la commission des Affaires sociales de l'Assemblée se prononce en outre pour une suspension de la réforme du financement des Ehpad décidée sous le précédent quinquennat et poursuivie par le gouvernement actuel, qui vise à faire converger d'ici 2023 les dotations entre public et privé.

En 31 propositions, le texte préconise en outre une revalorisation du statut d'aide-soignant, la création d'un acteur unique sur la dépendance et le développement de deux consultation de prévention de la dépendance à domicile, à 65 ans puis à 70 ans, prises en charge par l'Assurance maladie.

"C'est de la rencontre entre un phénomène démographique d'une ampleur inédite et une prise de conscience insuffisante qu'est née la situation actuelle de la dépendance dans notre pays", soulignent les députés.

UN RATIO "SANS FONDEMENT"

Les personnels des Ehpad et des services d'aide à domicile sont appelés à la mobilisation jeudi pour protester contre l'insuffisance de leurs moyens et la réforme de leur financement. Ils se rassembleront devant le ministère des Solidarités et de la Santé à 13h00 pour une prise de parole.

La ministre de la Santé Agnès Buzyn a annoncé mardi qu'elle rencontrerait les représentants de l'intersyndicale.

Agnès Buzyn a fait un geste mardi en annonçant lors des Assises nationales des Ehpad qu'elle comptait mettre en place un "mécanisme qui, sans remettre en cause les fondements de la réforme (...) permette d'en neutraliser les effets négatifs". Ce dispositif pourrait compenser pendant une période "qui sera déterminée, un an ou deux ans", les pertes des recettes.

Elle a cependant écarté d'emblée la demande du taux d'encadrement d'un professionnel pour un résident réclamé par les syndicats. "Ce ratio n'a aucun fondement théorique ou scientifique et il ne peut être considéré comme une norme".

Ce ratio était celui proposé par le Plan solidarité - Grand âge présenté par Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale en juin 2006. Il visait "les personnes âgées les plus malades et les plus dépendantes".

Les retraités manifesteront pour leur part contre la dégradation de leur niveau de vie liée à l'augmentation de la contribution sociale généralisée (CSG).

(Julie Carriat, édité par Yves Clarisse)