Mélenchon maintient qu'il est victime d'un traquenard

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Convoque, jean-luc melenchon denonce une justice a deux vitesses[reuters.com]
(Crédits : Gonzalo Fuentes)

NANTERRE, Hauts-de-Seine (Reuters) - Le chef de file de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, a maintenu jeudi sa dénonciation d'une "police politique" coupable à ses yeux de lui avoir tendu un "traquenard", à l'issue de son audition par les enquêteurs de l'Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières (OCLCIFF).

L'ancien candidat à la présidentielle a été entendu pendant cinq heures à Nanterre, près de Paris, dans le cadre des enquêtes ouvertes par le parquet sur les activités des assistants parlementaires européens de LFI et les comptes de la campagne présidentielle.

"C'est un traquenard, c'est une opération de police politique", a-t-il lancé à sa sortie. "Je ne mets pas en cause la police mais (...) la police politique, c'est-à-dire la décision politique d'instrumentaliser des magistrats et des policiers pour essayer de faire un mauvais sort à l'un des chefs de l'opposition."

"Cinq heures pour enfoncer des portes ouvertes", a-t-il déploré, assurant avoir déjà répondu à toutes les questions qui lui ont été posées, notamment sur les collaborateurs de LFI au Parlement européen.

Son avocat, Mathieu Davy, a dit à Reuters que l'audition s'était "très bien passée", dans un climat "courtois". "Il n'y a pas eu de questions agressives ou embarrassantes et, de notre côté, nous avions réponse à tout."

Une source policière a confirmé à Reuters qu'il n'y avait "pas eu de problème".

UNE VINGTAINE DE PERSONNES ENTENDUES

Tout en appelant à une "désescalade" judiciaire, le chef du groupe parlementaire LFI n'a pas reculé d'un pouce dans sa critique d'une opération qu'il a décrite comme télécommandée par le chef de l'Etat: "Tout ça est ridicule M. Macron, il est temps de rembobiner votre film, tout ça est raté, la manoeuvre est complètement ratée", a-t-il dit.

De Bruxelles, à l'issue d'un Conseil européen centré sur le Brexit, Emmanuel Macron a répondu: "Nous avons une Constitution, elle est claire, l'autorité judiciaire est indépendante dans notre pays et j'en suis le garant, pour tout le monde et, n'en déplaise à certains il n'y a pas d'exception."

Au total, une vingtaine de personnes, dont plusieurs élus de LFI, ont été entendues en deux jours sur les mêmes dossiers.

A son arrivée, Jean-Luc Mélenchon avait dénoncé une justice à deux vitesses, avant de dresser un parallèle avec l'affaire Alexandre Benalla, du nom de l'ex-chargé de mission de l'Elysée filmé en train de malmener des manifestants en marge des cortèges du 1er-Mai.

"J'ai vu que M. Castaner m'a recommandé de répondre aux questions qui me sont posées, lui il devrait aussi répondre aux questions qui ne lui sont pas posées", a-t-il dit, en référence aux propos du ministre de l'Intérieur, qui a appelé au respect de la police et de la justice.

"A moi on me fait des perquisitions, on fouille mes locaux et on brutalise mes assistants et à lui apparemment on ne lui demande rien."

"JE SUIS FAIT DE CE BOIS-LÀ"

Une troisième procédure pour violences sur personnes dépositaires de l'autorité publique a été ouverte mercredi contre Jean-Luc Mélenchon, conséquence de la perquisition menée mardi au siège de LFI au cours de laquelle le dirigeant de la gauche radicale et ses proches ont vivement apostrophé des policiers et le procureur, et forcé la porte du local.

Le parquet de Paris a fait savoir jeudi que cette procédure avait été transmise à Bobigny pour éviter, comme le veut le code de procédure pénal, que les magistrats parisiens aient à traiter ce dossier les concernant de près.

"Cela serait à l'honneur de Jean-Luc Mélenchon de s'excuser auprès des fonctionnaires de police qu'il a maltraités et auprès de la justice qu'il a insultée", a estimé sur Public Sénat le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire. "J'ai pensé qu'il avait fondu un plomb."

Loin de reconnaître un dérapage, Jean-Luc Mélenchon a renouvelé sa défense d'un "parler fort" et d'une colère juste, après avoir revendiqué la veille un tempérament "méditerranéen".

"Tous ces gens de bonne compagnie et bien élevés qui n'ont jamais été perquisitionnés se demandent pourquoi j'ai été élu, pourquoi j'ai pu parler aussi fort, eh bien je recommencerai autant de fois qu'il le faudra parce que je suis fait de ce bois-là", a-t-il déclaré.

Il a par ailleurs annoncé le dépôt de quatre plaintes pour violences lors de la perquisition au siège de LFI mardi.

(Sabrine Benmoumene et Julie Carriat, avec Myriam Rivet, Marine Pennetier, Simon Carraud et Emmanuel Jarry; édité par Yves Clarisse et Henri-Pierre André)