Le ministre du Brexit démissionne, Theresa May en sursis

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Le ministre du brexit demissionne, theresa may en sursis[reuters.com]
(Crédits : Henry Nicholls)

par Kylie MacLellan et Sarah Young

LONDRES (Reuters) - Plusieurs membres du gouvernement britannique, dont le ministre du Brexit Dominic Raab, ont annoncé leur démission jeudi, plongeant Theresa May dans une crise politique qui pourrait lui être fatale au lendemain de la validation par ses principaux ministres du projet d'accord de sortie de l'Union européenne conclu avec Bruxelles.

La Première ministre britannique doit s'attendre à une réception houleuse à la Chambre des communes, devant laquelle elle doit défendre dans la journée le texte de 585 pages négocié pendant plus d'un an.

Critiquée de toutes parts, Theresa May semble à la merci d'une motion de censure que pourraient déposer les élus eurosceptiques de son propre Parti conservateur.

Plusieurs d'entre eux ont assuré jeudi matin disposer des 48 signatures nécessaires pour organiser un vote de défiance, soit le seuil nécessaire de 15% des élus du groupe parlementaire des Tories, selon un journaliste de la chaîne ITV.

C'est la clause de "sauvegarde" ("backstop") prévue dans le projet d'accord, destinée à empêcher le rétablissement d'une frontière physique entre la République d'Irlande et l'Irlande du Nord et instituant de fait un statut spécifique pour cette dernière, qui provoque le plus de remous.

Plusieurs ministres, dont Dominic Raab mais aussi les secrétaires d'Etat au Travail, Esther McVey, et à l'Irlande du Nord, Shailesh Vara, pourtant partisan à l'origine du maintien dans l'UE, ont démissionné jeudi pour protester contre cette mesure qui remet en cause, selon eux, l'intégrité territoriale du Royaume-Uni tout en fragilisant la position de Londres pour les futures négociations commerciales avec Bruxelles.

"Je ne peux pas concilier les termes du projet d'accord avec les promesses que nous avons faites au pays dans notre programme des dernières élections", a déclaré Dominic Raab en annonçant son départ du gouvernement.

MAY N'A "PLUS AUCUNE AUTORITÉ"

Outre la colère des "Brexiters" eurosceptiques, le projet d'accord a provoqué celle du Parti unioniste nord-irlandais DUP, dont les députés permettent à Theresa May de s'appuyer sur une majorité parlementaire à Londres et qui a dit se sentir "trahi".

Si la Première ministre échappe à la censure, tous ces élus entendent voter contre le projet de Brexit lorsque le Parlement de Westminster sera appelé à se prononcer, probablement début décembre.

Selon les calculs de médias britanniques, il manquerait environ 80 voix au gouvernement pour faire adopter le texte, ce qui l'obligerait à compter sur le soutien d'au moins une partie de l'opposition travailliste pour surmonter cet obstacle incontournable.

Or, le Labour a estimé jeudi, après la démission de Dominic Raab, que le gouvernement était "en train de s'effondrer" et que Theresa May n'avait "plus aucune autorité".

"Le gouvernement se délite sous nos yeux, car pour la deuxième fois, un secrétaire au Brexit refuse de soutenir le plan de départ de l'UE de la Première ministre", a déclaré Jon Trickett, membre de la garde rapprochée du chef de file des travaillistes, Jeremy Corbyn.

"Theresa May (...) est de toute évidence incapable d'accoucher d'un accord de Brexit qui recueille ne serait-ce que le soutien de son gouvernement - sans parler du Parlement et de la population britannique", a-t-il ajouté.

Le seul soutien sur lequel la Première ministre semble pouvoir compter est celui des autres dirigeants européens, qui ont prévu de se réunir en sommet extraordinaire le 25 novembre pour entériner le projet d'accord, a confirmé jeudi matin le président du Conseil européen, Donald Tusk.

(Tangi Salaün pour le service français, édité par Eric Faye)