Démissions en série à Londres, May défend l'accord sur le Brexit au Parlement

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Demissions en serie a londres, may defend l'accord sur le brexit au parlement[reuters.com]
(Crédits : Peter Nicholls)

LONDRES (Reuters) - Plusieurs membres du gouvernement britannique ont annoncé leur démission jeudi matin, aggravant une crise politique qui pourrait être fatale à Theresa May au lendemain de la validation par ses principaux ministres du projet d'accord de sortie de l'Union européenne conclu avec Bruxelles.

Le ministre chargé du Brexit, Dominic Raab, a annoncé son départ du gouvernement, de même que le secrétaire d'Etat à l'Irlande du Nord, Shailesh Vara, la sous-secrétaire d'Etat chargée du Brexit, Suella Braverman, et la secrétaire d'Etat au Travail, Esther McVey.

* Le président du parlement européen, Antonio Tajani, s'est déclaré à la mi-journée satisfait des éléments cardinaux de l'accord conclu entre le Royaume-Uni et l'Union européenne. "Nous sommes satisfaits", a-t-il dit lors d'une conférence de presse à Strasbourg, en citant la question des droits des citoyens et la question de la frontière irlandaise. Le parlement européen doit entériner lui aussi l'accord de Brexit, tout comme le parlement britannique.

* Nigel Dodds, le numéro deux du parti unioniste irlandais DUP, qui apporte à Theresa May une majorité à la chambre des Communes, a accusé la Première ministre de ne pas écouter les voix qui s'élèvent et de trahir les promesses faites sur l'avenir de l'Irlande du Nord à travers l'accord de Brexit trouvé avec l'UE. Dodds a tenu ces propos en réponse à l'intervention de la Première ministre devant les députés des Communes.

* S'exprimant en fin de matinée devant la Chambre des communes, Theresa May a appelé les députés qui devront se prononcer sans doute début décembre sur le projet d'accord sur le Brexit à assumer leurs responsabilités.

"Le choix est clair: nous pouvons choisir de partir sans accord, nous pouvons prendre le risque de ne pas avoir de Brexit du tout ou nous pouvons décider de nous unir et de soutenir le meilleur accord qu'il était possible de négocier", a-t-elle dit.

Theresa May a prévenu qu'un rejet du texte de 585 pages négocié pendant plus d'un an entre Londres et Bruxelles serait un "retour à la case départ".

Reconnaissant que l'accord n'est totalement satisfaisant ni pour Londres, ni pour Bruxelles, elle a assuré que celui-ci n'était "pas définitif".

* Theresa May semble à la merci d'une motion de censure que pourraient déposer les élus eurosceptiques de son propre Parti conservateur.

Plusieurs d'entre eux ont assuré jeudi matin disposer des 48 signatures nécessaires pour organiser un vote de défiance, soit le seuil nécessaire de 15% des élus du groupe parlementaire des Tories, selon un journaliste de la chaîne ITV.

* L'opposition travailliste estime de son côté que le gouvernement "se délite sous nos yeux" et que Theresa May n'a "plus aucune autorité".

Le projet d'accord "n'a le soutien ni du gouvernement, ni du Parlement, ni du pays", a asséné le chef de file du Labour, Jeremy Corbyn.

Le Parlement ne peut pas accepter "un choix par défaut entre un mauvais accord et pas d'accord du tout", a-t-il ajouté pendant le débat à la Chambre des communes.

* Les ministres démissionnaires ont notamment pointé du doigt la clause de "sauvegarde" ("backstop") instituée par le projet d'accord sur la sortie de l'UE, destinée à empêcher le rétablissement d'une frontière physique entre la République d'Irlande et l'Irlande du Nord et instituant de fait un statut spécifique pour cette dernière.

Les détracteurs de l'accord estiment que cette mesure remet en cause l'intégrité territoriale du Royaume-Uni et fragilise en même temps la position de Londres pour les futures négociations commerciales avec Bruxelles.

"Je ne peux pas concilier les termes du projet d'accord avec les promesses que nous avons faites au pays dans notre programme des dernières élections", a déclaré Dominic Raab en annonçant sa démission.

Le Parti unioniste nord-irlandais DUP, dont les dix députés fournissent une majorité parlementaire à Theresa May, a dit se sentir "trahi". Il a exclu de soutenir le projet d'accord lorsque celui-ci sera soumis au vote crucial des députés de Westminster.

* A BRUXELLES, le président du Conseil européen, Donald Tusk, a confirmé que les dirigeants européennes prévoyaient de se réunir en sommet extraordinaire le 25 novembre pour entériner le projet d'accord sur le Brexit.

Donald Tusk s'est entretenu jeudi matin avec le chef des négociateurs européens, Michel Barnier, qui a évoqué un accord "juste et équilibré".

* En FRANCE, le Premier ministre Edouard Philippe a fait part de son inquiétude face aux derniers développements politiques en Grande-Bretagne.

"Il n'a échappé à personne que l'actualité politique britannique pouvait nourrir un certain nombre de questionnements et d'inquiétudes sur la possibilité effective d'une ratification de cet accord", a dit le chef du gouvernement lors d'un discours à Dunkerque (Nord).

"Nous devons donc nous préparer à l'hypothèse qui est toujours sur la table - que nous ne souhaitons pas, je le dis très clairement - d'une sortie sans accord", a-t-il ajouté.

(Bureaux de Reuters; Tangi Salaün pour le service français)