La CEDH accuse la Turquie de persécution contre Demirtas

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La cedh accuse la turquie de persecution contre demirtas[reuters.com]
(Crédits : Umit Bektas)

STRASBOURG (Reuters) - La Cour européenne des droits de l'homme a condamné mardi la Turquie pour atteinte aux droits fondamentaux de Selahattin Demirtas, ancien député et ancien coprésident du parti pro-kurde HDP (Parti démocratique des peuples), estimant que les poursuites engagées contre lui étaient de nature politique.

L'ancien avocat et ancien candidat à la présidentielle turque de 2018 est en détention depuis le 4 novembre 2016 après avoir été accusé de différentes infractions en lien avec des activités "terroristes" qu'il récuse et pour lesquelles il encourt un total de 142 années de prison.

Il a été condamné le 7 septembre dernier à une première peine de quatre ans de prison pour "propagande terroriste".

L'avocat de Demirtas a annoncé mardi qu'il avait demandé la remise en liberté immédiate de son client à la suite de la décision de la CEDH.

"Nous espérons que ce que demande ce jugement sera réalisé sans délai. Après cette décision (de la CEDH), toute seconde que M. Demirtas passe en prison est une atteinte à sa liberté", a dit Mahsuni Karaman.

Dans son arrêt, la Cour de Strasbourg condamne la Turquie à l'unanimité des juges pour la durée excessive de la détention provisoire du chef du troisième parti politique de Turquie - à l'époque -, et pour violation du droit à des élections libres en raison du statut de l'intéressé.

Les juges condamnent également Ankara, par six voix contre une, pour la motivation politique de cette atteinte aux droits du député.

"Les prolongations de la privation de liberté de l'intéressé, notamment pendant deux campagnes électorales critiques, à savoir le référendum (sur la réforme constitutionnelle) et l'élection présidentielle, poursuivaient un but inavoué prédominant, celui d'étouffer le pluralisme et de limiter le libre jeu du débat politique, qui se trouve au coeur même de la notion de société démocratique", affirment-ils.

La juridiction du Conseil de l'Europe souligne la concomitance entre les poursuites engagées contre Selahattin Demirtas et la rupture des négociations de paix entre le gouvernement turc et le Parti des travailleurs du Kurdistan, un mouvement indépendantiste armé considéré comme terroriste.

Elle accorde 10.000 euros à l'ancien député et invite la Turquie à mettre fin à sa détention provisoire "dans les plus brefs délais", une mesure qui a peu de chances d'être suivie d'effets pratiques en raison de sa condamnation.

(Gilbert Reilhac avec Gulsen Solaker à Ankara, Guy Kerivel, édité par Yves Clarisse)