Gilets jaunes : Echec du dialogue à Matignon, urgence selon les syndicats

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Philippe recoit des gilets jaunes, macron ne reculera pas[reuters.com]
(Crédits : Stephane Mahe)

PARIS (Reuters) - Une tentative de dialogue a échoué vendredi entre les "Gilets jaunes" et le Premier ministre, que les syndicats ont alerté sur l'urgence d'apporter des réponses immédiates à la colère des Français, à la veille de nouvelles manifestations.

Emmanuel Macron avait exclu quelques heures auparavant tout "recul", semblant confirmer une nouvelle fois la hausse des taxes sur les carburants le 1er janvier, qui a contribué à déclencher le mouvement perturbant le pays depuis deux semaines.

Seuls deux des "Gilets jaunes" invités à rencontrer le chef du gouvernement se sont présentés vendredi à Matignon, l'un d'entre eux choisissant de ne pas être vu par les journalistes.

Le second, Jason Herbert, a annoncé avoir quitté l'entretien avec Edouard Philippe et François de Rugy après leur refus que cette discussion soit retransmise en direct à la télévision.

"Je souhaitais que les 65 millions de Français, peut-être un peu plus, puissent entendre les discussions", a dit ce porte-parole. "J'ai simplement, par courtoisie, laissé le Premier ministre et le ministre de l'Ecologie se présenter, je me suis présenté aussi à mon tour et je les ai informés ne pas souhaiter poursuivre la discussion parce qu'il n'était pas possible de filmer l'entretien."

Edouard Philippe a regretté de n'avoir pu discuter qu'avec un représentant des "Gilets jaunes" sur les huit invités, mais a salué la teneur des échanges.

"Ce débat a été intéressant. Il a été franc, il a été respectueux, il a été utile puisqu'il a nourri notre réflexion et va être précieux dans l'élaboration" de la méthode pour la grande consultation nationale souhaitée par le chef de l'Etat, a-t-il dit à l'issue de la rencontre.

IL FAUT DES ANNONCES MAINTENANT, DISENT LES SYNDICATS

Ce "Gilet jaune" a parlé de "l'inquiétude, l'angoisse, la colère" des membres du mouvement et axé la discussion autour du pouvoir d'achat, précise le Premier ministre, qui ajoute que "la porte de Matignon restera toujours ouverte si les Gilets jaunes souhaitent désigner des représentants".

Les dirigeants syndicaux reçus plus tôt par le Premier ministre, François de Rugy, et la ministre du Travail, Muriel Pénicaud ont pressé le gouvernement de prendre des mesures rapides, sans attendre les trois mois de concertations annoncés.

"Il faut des mesures concrètes, on ne rentre pas dans un processus s'il n'y a pas des marges de manoeuvre pour des mesures réelles pour les travailleurs", a dit le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger.

Le président de la CFE-CGC, François Hommeril, a déploré la perspective d'une concertation "avec des marges de manoeuvre très très réduites".

Les Français ne supportent plus que l'on jette "l'argent par les fenêtres" pour les entreprises alors qu'ils peinent à vivre de leur travail, a-t-il dit.

"Il faut prendre des mesures immédiates", a également estimé Philippe Louis, président de la CFTC.

Face au mécontentement émaillé de violences, Emmanuel Macron a proposé mardi d'adapter la fiscalité des carburants à l'avenir et n'a pas exclu d'autres gestes à l'issue des ces trois mois de concertations ().

MACRON ANNONCE D'AUTRES DÉCISIONS

En marge de son déplacement en Argentine pour le G20, il a précisé qu'il prendrait "des décisions supplémentaires dans les semaines et mois à venir mais elles ne seront jamais des reculs, mais d'une intensité plus grande encore".

Les représentants de la CGT ont quant à eux demandé une hausse du smic, des pensions et des minima sociaux et une TVA réduite sur l'énergie et les transports, et ceux de Force ouvrière un moratoire sur la hausse des taxes prévue en janvier, ce qu'avait exclu mercredi le Premier ministre.

La hausse de 6,5 centimes par litre de diesel et 2,9 centimes pour l'essence en 2019 est à l'origine du mouvement qui s'est traduit depuis le 17 novembre par des milliers de barrages routiers et a provoqué la mort de deux personnes, avant de s'élargir à la question du pouvoir d'achat.

Les modalités de la concertation annoncée par le chef de l'Etat seront précisées la semaine prochaine.

François de Rugy a précisé que les débats s'organiseraient "au minimum dans chaque département". Mais "beaucoup d'interlocuteurs pensent, et nous sommes d'accord avec eux, qu'il faudrait aller à l'échelle de bassins de vie", a-t-il ajouté sur BFM TV et RMC.

Samedi, les Champs-Elysées seront fermés à la circulation pour permettre aux "Gilets jaunes" de manifester après un contrôle d'identité et une fouille des sacs.

La CGT appelle elle aussi à manifester samedi à Paris, contre le chômage et la précarité, des mots d'ordre qui s'élargiront au pouvoir d'achat, selon Marie-Claire Cailletaud, secrétaire fédérale.

"De plus en plus, les revendications portées par les 'Gilets jaunes' sont légitimes et rejoignent celles que l'on porte depuis longtemps donc il peut y avoir une vraie convergence", a-t-elle dit aux journalistes après la réunion à Matignon.

(Jean-Baptiste Vey, avec Sophie Louet, Caroline Pailliez et le bureau de Buenos Aires, édité par Yves Clarisse)