"Gilets jaunes" : La police se prépare à plus de violences samedi

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gilets jaunes: la police se prepare a plus de violences samedi[reuters.com]
(Crédits : Gonzalo Fuentes)

PARIS (Reuters) - Les autorités anticipent un regain de la mobilisation des "Gilets jaunes" samedi, nouvelle journée d'actions annoncée sur les réseaux sociaux, et craignent une radicalisation "plus affirmée" à Paris et en province.

"Nous nous préparons à une situation où, à la fois le volume de participants pourrait être supérieur mais encore la radicalité de leurs comportements pourrait être encore plus affirmée", a dit sur CNews le préfet de la police de Paris, Michel Delpuech, soulignant une "dérive vers des comportements plus violents" semaine après semaine.

A l'échelle du territoire, le niveau de mobilisation, qui avait diminué les deux dernières semaines, pourrait revenir à celui "d'avant les fêtes de Noël", a dit le directeur général de la police nationale (DGPN), Eric Morvan, sur France Inter.

Quelque 50.000 personnes ont participé aux actions des "Gilets jaunes" samedi dernier. Le 17 novembre, premier jour de la mobilisation, elles étaient près de 300.000.

Le Premier ministre, Edouard Philippe, qui a annoncé lundi un durcissement de la loi à l'encontre des casseurs en réponse aux violences ponctuant les défilés, a prévu de déployer 80.000 forces de l'ordre sur tout le territoire, dont 5.000 à Paris.

Aucune manifestation n'a été déclarée à Paris pour samedi, à part quelques rassemblements "représentant des groupes peut-être d'une trentaine de personnes", a précisé Michel Delpuech.

LE PALAIS DE L'ELYSEE VISE ?

Il a dit craindre des actions visant les quartiers du palais présidentiel de l'Elysée, de l'Assemblée nationale, des ministères et des Champs-Elysées.

"Il faut être partout et l'idée c'est de quadriller le terrain (...), être mobile, être réactif, interpeller très vite dès que des dérapages se produisent", a-t-il expliqué.

Quatorze véhicules blindés à roues de la gendarmerie seront aussi mobilisés dans la capitale, où une cinquantaine de "détachements d'intervention rapide" se concentreront sur les interpellations.

En province, la ville de Bourges (Cher), qui fait l'objet d'un appel à manifester sur Facebook pour lequel 13.000 personnes se sont déclarées intéressées, a renforcé son dispositif de sécurité.

Seule une manifestation prévue par la CGT a été déclarée, a dit sur BFMTV la préfète du Cher, Catherine Ferrière qui interdira la circulation dans le centre historique.

Le maire de cette ville de 68.000 habitants, Pascal Blanc, a aussi ordonné la fermeture de la mairie et des musées. "On n'a jamais connu ce type de mouvement dans une ville comme la nôtre. Quand on voit ce qui se passe depuis des semaines, il y a des raisons d'être inquiets", a-t-il dit sur Franceinfo.

Selon Éric Morvan, il pourrait s'agir d'un leurre visant à disperser les équipes de police, comme cela avait été le cas pour l'appel à manifester à Versailles le 22 décembre dernier.

Il a estimé que l'inorganisation apparente des "Gilets jaunes", consubstantielle à leur mouvement à ses débuts, était devenue une stratégie délibérée.

"La sociologie du mouvement a changé", a-t-il expliqué. "Aujourd'hui, je pense qu'il est de moins en moins spontané, qu'il y a des forces, y compris extrémistes, qui ont cette stratégie de l'inorganisation."

PARIS SE PRÉPARE À NOUVEAU

Des consignes ont été envoyées dans la capitale pour que les engins ou barrières de chantier soient retirés des rues et que les voitures soient garées dans des parkings.

C'est avec un engin de chantier que des "Gilets jaunes" ont défoncé samedi dernier le portail de l'hôtel particulier qui héberge le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux.

Un filtrage sera par ailleurs organisé en amont pour empêcher les casseurs de rejoindre la capitale, a encore expliqué le préfet de police. Des contrôles auront ainsi lieu aux péages autoroutiers, dans les gares de départ vers Paris, dans les rames de la SNCF, du RER et du métro, pour détecter les personnes détenant des armes par destination.

La journée de manifestations de samedi dernier, la huitième depuis mi-novembre, a été également marquée par l'attaque de la mairie de Rennes et du tribunal de grande instance de Perpignan, ainsi que par l'agression de deux gendarmes mobiles par un ex-boxeur professionnel, Christophe Dettinger, à Paris.

La cagnotte en soutien aux membres de forces de l'ordre mise en place en réaction à la collecte lancée en faveur du boxeur placé en détention provisoire a par ailleurs dépassé 1,4 millions d'euros vendredi.

Mais le directeur général de la police nationale estime qu'elle envoie un mauvais signal. "La police nationale n'a pas besoin de cagnotte", a dit Eric Morvan.

"Cette fracture (...) qui se manifeste à coup de cagnotte, peut même à certains égards de mon point de vue friser l'indécence. S'il y a de la générosité dans ce pays, manifestons-la à la recherche médicale, à la recherche de l'enfance en danger".

(Caroline Pailliez, avec Emmanuel Jarry, édité par Yves Clarisse)