La justice autorise la sortie du film "Grâce à Dieu"

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(Crédits : Hannibal Hanschke)

PARIS (Reuters) - Le tribunal de Paris a autorisé lundi la sortie du film "Grâce à Dieu" du réalisateur François Ozon, inspiré du combat mené par les victimes lyonnaises du prêtre Bernard Preynat, poursuivi pour pédophilie, a-t-on appris auprès d'un avocat du cinéaste.

"Grâce à Dieu" raconte la naissance de l'association de victimes "La Parole libérée", fondée à Lyon en 2015 par d'anciens scouts abusés par ce prêtre. Au total, l'association recense près de 85 victimes de Bernard Preynat.

Le film, qui a reçu samedi le Grand Prix du jury du festival du film de Berlin, est l'objet de deux actions en justice visant à faire annuler ou reporter sa sortie programmée mercredi.

Il a été assigné en référé par les avocats du père Preynat, au nom de la présomption d'innocence de leur client quelques mois avant son procès. L'audience s'est tenue vendredi et c'est le jugement qui a été rendu lundi.

"La demande a été rejetée", a déclaré à Reuters l'avocat de François Ozon, Me Paul-Albert Iweins.

Selon un des avocats du prêtre, la demande de report de la sortie du film a certes été rejetée mais le juge a également rejeté une partie de l'argumentation des avocats du cinéaste "selon laquelle il y aurait eu des aveux et ceux-ci feraient échec à la présomption d'innocence".

Le juge "confirme que le film expose les faits reprochés au père Preynat comme incontestables. En revanche, il considère que le fait d'insérer un carton à la dernière seconde du film indiquant que le père Preynat bénéficie de la présomption d'innocence répond aux exigences de la loi", a déclaré à Reuters Me Emmanuel Mercinier.

UNE DEUXIÈME PROCÉDURE

Selon l'avocat du prêtre, le juge précise par ailleurs que sa décision n'empêche pas une "action indemnitaire".

"Je regrette amèrement cette décision, non seulement dans l'intérêt du père Preynat mais plus largement dans l'intérêt général", a-t-il ajouté. "Présenter durant deux heures comme coupable un homme qui n'a pas encore été jugé comme tel constitue une atteinte à la présomption d'innocence que ne saurait évidemment pas faire disparaître le fait d'écrire ensuite le contraire durant deux secondes."

L'autre procédure émane de Régine Maire, une psychologue bénévole du diocèse de Lyon, qui réclame que son nom soit retiré du film. L'audience s'est déroulée lundi après-midi à Lyon; le jugement sera rendu mardi à 17h00.

"Tout ce qui est raconté autour de Régine Maire et de Bernard Preynat est pourtant public", avait déclaré François Ozon à la presse lors de l'avant-première de son film. "On a pensé, peut-être de manière innocente, qu'il était hypocrite de changer les noms puisque toutes ces personnes étaient déjà connues. Et on respecte la présomption d'innocence."

Pour lui, l'interdiction ou le report de la sortie de son film aurait été "un désastre pour l'image de l'Eglise". Il fait notamment valoir que "les avocats de Bernard Preynat n'ont pas cessé de dire dans toutes les interviews que son client reconnaissait les faits et sa culpabilité".

Le procès en correctionnelle du cardinal Philippe Barbarin et de cinq membres de la hiérarchie de l'Eglise, poursuivis pour "non dénonciation d'agressions sexuelles sur mineurs", s'est tenu du 7 au 10 janvier à Lyon. La décision du tribunal est attendue pour le 7 mars.

(Emmanuel Jarry avec Catherine Lagrange à Lyon, édité par Sophie Louet)