Grande-Bretagne/Brexit : Trois députées conservatrices quittent le parti

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Brexit: trois deputes conservateurs rejoignent les independants[reuters.com]
(Crédits : Phil Noble)

par Elizabeth Piper, William James et Kylie MacLellan

LONDRES (Reuters) - Trois députées du Parti conservateur favorables au maintien du Royaume-Uni dans l'Union européenne ont rejoint mercredi un nouveau groupe d'élus indépendants à la Chambre des communes pour dénoncer "la gestion désastreuse du Brexit par le gouvernement".

Heidi Allen, Anna Soubry et Sarah Wollaston reprochent à la Première ministre Theresa May sa stratégie qu'elles jugent téléguidée par les eurosceptiques.

"La vérité, c'est que la bataille est terminée et que l'autre camp a gagné. L'aile droite, l'étrange escouade radicale et europhobe qui a détruit tous les dirigeants au cours de ces 40 dernières années dirige désormais le Parti conservateur de la tête au pied", a déclaré Anna Soubry lors d'une conférence de presse à Londres avec les deux autres élues démissionnaires.

L'ancienne ministre, militante d'un maintien dans l'UE et avocate d'un second référendum, a ajouté que la plupart des branches locales du Parti tory avaient été infiltrées par des activistes europhobes et a dit espérer que d'autres élus tories, y compris parmi ceux qui siègent au gouvernement, suivraient leur exemple en démissionnant à leur tour.

Sa collègue Sarah Wollaston a jugé pour sa part que Theresa May pourrait faire ratifier l'accord de retrait négocié avec les Européens par la Chambre des communes si elle le conditionnait à la tenue d'un second référendum - une option que la dirigeante britannique a constamment rejetée.

"Nous devons de nouveau poser la question de l'appartenance à l'UE au peuple britannique", estime-t-elle.

Les trois élues conservatrices vont s'allier aux huit députés qui ont quitté pour leur part le Parti travailliste, dénonçant la position de leur chef de file Jeremy Corbyn sur le Brexit et sa prétendue ambiguïté sur la lutte contre l'antisémitisme.

MAJORITÉ ENCORE RÉDUITE POUR MAY

Leur défection est un nouveau revers pour Theresa May qui tente difficilement de constituer un front commun afin de faire approuver un accord de rupture entre Londres et Bruxelles.

En rompant avec les Tories, elles affaiblissent encore un peu plus la position de la Première ministre au Parlement, où sa majorité, qui dépendait déjà du soutien des dix élus nord-irlandais du Parti unioniste démocratique (DUP), passe de 13 à 7 voix (même si, dans les faits, les trois élues tories en partance ont souvent voté contre May sur le dossier du Brexit).

Leur départ la fragilise également dans ses discussions avec ses partenaires européens d'autant que, selon l'agence Bloomberg, jusqu'à 15 ministres du gouvernement de Theresa May serait déterminés à voter contre la sortie du Royaume-Uni si aucun accord de retrait n'était trouvé.

Ces ministres souhaitent que la date de sortie soit repoussée le temps qu'un accord soit trouvé.

La gestion actuelle des négociations est "la goutte d'eau qui a fait déborder le vase", ont écrit les trois députées dans la lettre de rupture qu'elles ont rendue publique. "Nous jugeons ne plus pouvoir rester dans ce parti de gouvernement dont la politique et les priorités sont fixées par l'ERG et le DUP."

L'European Research Group (ERG) est un groupe de recherches qui conseille les députés conservateurs. Il est présidé par le député Jacob Rees-Mogg, farouche partisan du Brexit résolument hostile, de même que le DUP, à l'accord de retrait négocié par Londres et Bruxelles puis entériné par les dirigeants européens.

Theresa May a fait part de sa tristesse à l'annonce de ces défections, tout en rappelant que le Brexit était depuis longtemps une source de désaccord au sein du Parti conservateur et qu'il n'avait jamais été dit qu'il serait facile à accomplir.

"Cette décision m'attriste", a-t-elle dit dans un communiqué. "Mais en restant fidèle aux engagements de notre programme et en appliquant la décision du peuple britannique, nous faisons ce qui est juste pour notre pays. Et en faisant cela, nous allons vers un avenir meilleur."

A 37 jours de la date du divorce, fixée au 29 mars, Theresa May, qui a rendez-vous en fin d'après-midi à Bruxelles avec Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, n'a toujours pas été en mesure de faire ratifier par son Parlement l'accord conclu avec les Européens.

(avec Kate Holton et David Milliken; Pierre Sérisier, Henri-Pierre André et Nicolas Delame pour le service français)