Chine : Le Parlement adopte une loi assouplissant l'investissement étranger

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(Crédits : Thomas Peter)

par Ryan Woo et Kevin Yao

PÉKIN (Reuters) - Face au scepticisme concernant l'application d'une nouvelle loi facilitant l'investissement étranger en Chine, le Premier ministre chinois, Li Keqiang, s'est engagé vendredi à ce que le gouvernement mette en oeuvre la législation qui vise à protéger les entreprises étrangères installées dans le pays.

Peu avant les déclarations de Li, le Parlement chinois a approuvé une loi destinée à créer un environnement transparent pour les entreprises étrangères installées en Chine, un assouplissement qui vise notamment à répondre aux inquiétudes des Etats-Unis engagés dans un conflit commercial avec la Chine.

Cette loi, qui remplace la réglementation existante sur les sociétés communes et les entreprises détenues par des groupes étrangers, vise à apaiser les inquiétudes des entreprises étrangères face aux difficultés d'opérer en Chine.

Votée dans le cadre de la session annuelle du Parlement, elle entrera en vigueur le 1er janvier 2020.

Elle prévoit l'interdiction des transferts de technologie forcés - l'une des principales exigences de Washington dans leurs négociations commerciales - et punit les "interférences" gouvernementales dans les pratiques des sociétés étrangères, d'après la dernière version du texte, dont l'intégralité n'a pas encore été rendue publique.

Ces réformes reflètent, de l'avis de la plupart des hommes d'affaires américains, la volonté de Pékin de répondre sur le papier à certaines plaintes qui sont au coeur des négociations commerciales entre les deux premières puissances économiques mondiales.

Le président américain Donald Trump a déclaré jeudi qu'il faudrait probablement attendre trois ou quatre semaines pour savoir si un accord commercial pourra être conclu avec la Chine, alors que son secrétaire au Trésor, Steven Mnuchin, a écarté l'hypothèse d'un sommet dès ce mois-ci entre le président américain et son homologue chinois Xi Jinping.

L'agence de presse Chine Nouvelle a également rapporté vendredi que les deux membres de l'administration américaine s'étaient entretenus par téléphone avec le vice-Premier ministre chinois Liu He, qui mène les négociations pour Pékin, et que des "progrès substantiels" avaient été accomplis.

Pékin avait franchi en début d'année une nouvelle étape dans la dérégulation de ses marchés de capitaux en annonçant la fusion de deux dispositifs d'encadrement de l'accès des institutions financières étrangères aux marchés intérieurs, tout en y incluant de nouvelles classes d'actifs.

FONDAMENTAUX POLITIQUES

Face aux doutes exprimés quant à la mise en application de la nouvelle loi, Li a dit que Pékin n'avait aucune raison de ne pas vouloir s'ouvrir au monde étant donné que cela correspondait aux fondamentaux de la politique chinoise.

"Si des mesures d'ouverture sont évoquées, alors bien sûr elles seront honorées", a-t-il dit en réponse à des questions.

La nouvelle loi vise à "standardiser les mesures du gouvernement" et à s'assurer que les responsables respectent la loi, et d'autres mesures seront prises pour protéger les investisseurs étrangers, a poursuivi le Premier ministre.

Les Etats-Unis entendent obtenir de la Chine l'engagement de mettre fin à des pratiques commerciales qu'ils jugent déloyales, comme les transferts forcés de technologie ou l'accès limité à son marché, mais les négociations durent maintenant depuis des mois sans résultat concret à ce jour.

Certains experts juridiques et consultants économiques ont exprimé des doutes sur l'efficacité de cette loi pour protéger réellement les entreprises étrangères de transferts forcés de technologie vu les faiblesses de l'Etat de droit en Chine.

Ils soutiennent que les nouvelles dispositions de la loi sont largement cosmétiques parce que les tribunaux chinois sont étroitement contrôlés par le Parti communiste au pouvoir.

"Quel procureur voudra intenter des poursuites contre un responsable du Parti communiste?", dit une source des milieux d'affaires américains dans le pays.

La Chambre de Commerce américaine en Chine, dans un communiqué publié cette semaine, a affirmé qu'elle saluait et appréciait dans son principe "les efforts législatifs pour améliorer le climat pour l'investissement étranger".

"Nous craignons toutefois qu'un élément législatif aussi important et potentiellement influent soit mis en oeuvre sans une large consultation et une contribution des acteurs de l'industrie", écrit-elle.

La Chambre a rapporté le 26 février qu'une majorité de ses membres était favorable à un maintien des droits de douane sur les biens importés chinois alors même que Washington et Pékin tentent de parvenir à un compromis qui mettrait fin à leur contentieux commercial.

En conséquence des droits de douane, 19% des membres de la chambre ajustent leur logistique ou externalisent en dehors de la Chine, tandis que 28% repoussent ou annulent des investissements dans ce pays, a poursuivi la Chambre de commerce.

(Avec Michael Martina et Ben Blanchard, Jean Terzian et Juliette Rouillon pour le service français, édité par Blandine Hénault)