Recours contre le transfert de bateaux français à la marine libyenne

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Recours contre le transfert de bateaux francais a la marine libyenne[reuters.com]
(Crédits : Carlos Jasso)

PARIS (Reuters) - Huit associations ont demandé jeudi à la justice de suspendre le transfert de bateaux français à la marine libyenne, une livraison qu'elles dénoncent comme contraire à l'embargo sur les armes et une "complicité" dans des violations des droits.

Ces huit ONG, dont Amnesty International France et Médecins sans frontières, déposent jeudi un recours en référé auprès du tribunal administratif de Paris pour demander la suspension de ce transfert, promis prochainement.

Le ministère des Armées a indiqué en février que la France allait livrer au cours du printemps six embarcations rapides, des Zodiac de l'industriel français Sillinger, à la marine libyenne engagée dans le contrôle des flux de migrants tentant de traverser la Méditerranée.

"Avec ce transfert de bateaux, la France facilite la commission de violations graves des droits humains", a souligné Cécile Coudriou, présidente d'Amnesty International France.

"Il y a de nombreux exemples qui montrent que les garde-côtes libyens traitent extrêmement mal les migrants, ne sont absolument pas respectueux des droits humains et d'autre part ils les renvoient vers l'enfer", dans des camps et centres de détention où ils subissent des "violations multiples", a-t-elle ajouté, citant des cas d'esclavages et de détention arbitraires.

Si ce transfert sans contrepartie monétaire s'inscrit dans une stratégie d'externalisation de la gestion des flux migratoires par l'Union européenne, il est le fait d'une décision bilatérale, souligne Amnesty.

"La France, en fournissant ces bateaux, fait comme l'Italie, mais d'autres Etats européens ne font pas ce choix", estime Aymeric Elluin, chargé du dossier des armes à Amnesty, citant la livraison de vedettes italiennes à la Libye.

"On considère que c'est une violation sur les embargos sur les armes en Libye des Nations unies et de l'Union européenne", souligne-t-il en outre.

La livraison de Zodiac Sillinger a déjà été considérée par l'Onu comme une violation dans le cadre de l'embargo sur les armes imposé en Côte d'Ivoire de 2004 à 2016, souligne-t-il.

Elle contrevient par ailleurs selon lui au traité international sur le commerce des armes (TCA), dont la France est signataire, qui prévoit que les pays évaluent le risque de commission de violation des droits de l'homme avant d'autoriser l'exportation, une problématique déjà largement abordée dans le cadre des ventes d'armes à l'Arabie saoudite.

(Julie Carriat, avec Sophie Louet, édité par Yves Clarisse)