Géants d'internet et Etats s'engagent contre terrorisme et violence

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Geants d'internet et etats s'engagent contre terrorisme et violence[reuters.com]
(Crédits : Dado Ruvic)

par Jean-Baptiste Vey et Gwénaëlle Barzic

PARIS (Reuters) - Certaines des plus grandes entreprises du numérique et des Etats se sont engagés mercredi à renforcer leur lutte contre la propagande terroriste et l'extrémisme violent sur internet, à l'occasion du lancement à Paris d'un "appel de Christchurch", deux mois après les attentats dans cette ville néo-zélandaise.

"Le terrorisme et l'extrémisme violent sont des problèmes sociétaux complexes qui requièrent une réponse de toute la société", écrivent Amazon, Facebook, Google (Alphabet), Microsoft et Twitter dans un communiqué commun, annonçant des mesures et des projets.

Qwant, DailyMotion et la Fondation Wikimédia ont également adopté ce texte, aux côtés de la France, de la Nouvelle-Zélande, du Canada, du Royaume-Uni, de l'Irlande, de la Jordanie, de la Norvège, du Sénégal, de l'Indonésie et de la Commission européenne, dont les dirigeants étaient réunis à l'Elysée.

D'autres pays dont l'Australie, l'Allemagne, le Japon, les Pays-Bas, l'Espagne, l'Inde et la Suède ont également apporté leur soutien à l'appel.

"Bien que les Etats-Unis ne soient pas actuellement en position de l'adopter, nous continuons de soutenir les objectifs que reflète l'appel", a annoncé la Maison blanche dans un communiqué.

Emmanuel Macron et la Première ministre néo-zélandaise, Jacinda Ardern, ont salué la déclaration américaine lors d'une conférence de presse.

"Nous ferons tout pour qu'il puisse y avoir un engagement concret et plus formel", a dit le président français. "Mais je considère que (...) le fait que l'administration américaine ait considéré comme important de dire qu'elle en partageait les objectifs et la volonté est un élément tout à fait positif."

L'auteur des attentats de Christchurch, qui ont fait 51 morts dans deux mosquées, a filmé et diffusé le massacre en direct pendant 17 minutes via Facebook Live. La vidéo avait été partagée pendant plusieurs heures sur Twitter, YouTube, WhatsApp et Instagram.

LES GÉANTS S'ENGAGENT

Les cinq multinationales américaines se sont engagées à améliorer leurs règles et standards internes pour bannir expressément la diffusion de contenus terroristes, améliorer leur détection et en accélérer le retrait.

Sur les vidéos en direct, elles promettent de travailler à des mécanismes de contrôle accrus, qui pourraient notamment s'appuyer sur les notes des utilisateurs ou leur audience.

Facebook, premier réseau social mondial avec 2,7 milliards d'utilisateurs, a annoncé qu'il durcirait les conditions d'utilisation de Facebook Live pour en limiter l'usage dès la première infraction à certaines règles.

Les cinq géants s'engagent à travailler ensemble sur plusieurs chantiers, dont la mise au point de bases de données pour accélérer les solutions d'intelligence artificielle, le partage d'outils en open source pour détecter les contenus problématiques ou l'élaboration de protocole de crise pour réagir vite en cas d'attentat notamment.

YouTube, autre filiale d'Alphabet, a déjà relevé le seuil d'abonnés requis pour diffuser en direct sur un appareil mobile.

"ENCORE BEAUCOUP DE TRAVAIL À MENER"

Dans l'appel, entreprises et Etats s'engagent à promouvoir des actions locales, rechercher des solutions pour prévenir le téléchargement, la détection et le retrait des contenus en cause, coopérer avec la police et la justice et élaborer des procédures de réaction rapide. (https://www.appeldechristchurch.com/appel.html)

Le texte n'a pas de valeur contraignante et ne définit pas ce qui constitue un contenu à caractère terroriste ou extrémiste violent. Sa rédaction a suscité des débats, y compris entre les Européens, sur l'équilibre à trouver entre modération des contenus et protection de la liberté d'expression.

"Il y a encore beaucoup de travail à mener mais nous avons bon espoir d'avoir posé aujourd'hui un certain nombre de principes de base", a dit le secrétaire d'Etat au Numérique, Cédric O, à des journalistes, à propos de l'appel et des deux événements se tenant parallèlement à Paris.

A quelques encablures de la réunion sur l'appel, plus de 80 dirigeants de grands groupes, start-ups et acteurs de l'écosystème tech ont planché sur l'éducation, l'avenir du travail, la diversité, l'inclusion économique et l'environnement dans le cadre de la deuxième édition de "Tech for Good".

Si les annonces d'investissements ont été moins nombreuses que lors du premier sommet, plusieurs engagements ont été pris.

Quarante-cinq entreprises ont ainsi promis de porter la part de femmes dans leur management et direction à 30% en 2022 (contre une moyenne de 15% aujourd'hui selon les estimations).

Près de 200 invités, dont 150 dirigeants d'entreprise et les chefs d'Etat et de gouvernement, devaient dîner mercredi autour du président français.

Les ministres chargés du numérique des pays du G7 (Etats-Unis, Japon, Canada, Royaume-Uni, Allemagne, Italie et France) avaient plus tôt travaillé sur une charte sur les contenus haineux sur internet, qui doit être signée en août.

L'incertitude plane sur la signature de ce texte par les Etats-Unis, qui se désengagent des accords multilatéraux depuis l'élection de Donald Trump à la présidence.

Jeudi, plusieurs de ces entreprises se retrouveront au salon VivaTech, organisé jusqu'à samedi à Paris, où Emmanuel Macron répondra jeudi matin aux questions de chefs d'entreprise.

(édité par Sophie Louet et Yves Clarisse)