Le Conseil de l’Europe démine ses relations avec la Russie

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(Crédits : Lehtikuva Lehtikuva)

HELSINKI (Reuters) - Les 47 Etats membres du Conseil de l'Europe ont adopté vendredi une déclaration répondant partiellement aux revendications de la Russie, ce qui ouvre la voie à un apaisement des relations envenimées par l'annexion de la Crimée en 2014.

Le texte a été adopté "sans discussion" par le comité des ministres des Affaires étrangères réuni à Helsinki pour la passation de la présidence semestrielle de l'organisation de défense de la démocratie et des droits de l'homme de la Finlande à la France, a indiqué une source au Conseil de l'Europe.

Seuls 39 des 47 Etats ont toutefois soutenu cette déclaration lors d'un vote organisé à Strasbourg en amont de la rencontre d'Helsinki, a dit une source proche du comité.

L'Ukraine avait affiché ses réticences à faire des concessions à la Russie "sans contreparties", selon elle.

Elle a voté contre le texte de même que la Géorgie, les trois Etats baltes, Lituanie, Lettonie, Estonie ainsi que l'Arménie. La Moldavie n'a pas pris part au vote tandis que la Russie s'est abstenue, selon la source.

Le Royaume-Uni et la Pologne, soutien des positions ukrainiennes au sein du comité des ministres, ont néanmoins approuvé la déclaration.

Mais Paris et Berlin ont manoeuvré pour éviter une sortie de la Russie de l'organisation, une menace brandie par Moscou.

"Nous n'avons pas l'intention de quitter le Conseil de l'Europe comme certains tentent de le suggérer en répandant de fausses rumeurs", a dit le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov. "Et nous ne refusons pas de remplir nos obligations, y compris les financières."

La déclaration conforte la Russie dans sa contestation de la sanction qui a frappé sa délégation au sein de l'Assemblée parlementaire, l'un des deux organes statutaires, en réaction à l'annexion de la Crimée. Privés de leurs droits de vote, les parlementaires russes refusent depuis lors de siéger.

Elle confirme, comme le soutient Moscou, que seul le Comité des ministres, l'organe exécutif de l'organisation de Strasbourg, peut décider de suspendre les droits d'un Etat membre, aux termes du statut élaboré en 1949.

UNE "ETAPE"

En contrepartie, le Comité des ministres rappelle que, conformément à l'article 38 de ce même statut, "l'une des obligations fondamentales des États membres est de s'acquitter de leur contribution obligatoire au budget ordinaire".

La Russie est ainsi invitée à reprendre les versements interrompus en 2017 en signe de protestation, au risque d'être suspendue de certains de ses droits par le Comité des ministres après deux ans de non-paiement, soit dès juillet prochain.

Une invitation plus directe est adressée à la Russie pour qu'elle renvoie ses parlementaires à Strasbourg dès la session de juin prochain, eu égard notamment à l'élection du nouveau secrétaire général qui figure à l'ordre du jour.

"Ce qui s'est passé aujourd'hui est une étape vers un règlement final", a dit Daniel Holtgen, porte-parole du Conseil de l'Europe. "L'assemblée parlementaire devra prendre en compte les décisions des ministres et décider si elle change ses règles internes afin que la Russie participe à cette élection en juin."

Après deux mandats de cinq ans, l'ancien Premier ministre social-démocrate norvégien Thorbjorn Jagland ne se représente pas et le Comité des ministres a transmis aux parlementaires les candidatures de la conservatrice croate Marija Pejčinović Burić et du libéral belge Didier Reynders, tous deux ministres des Affaires étrangères dans leur pays.

Pour convaincre l'Assemblée parlementaire de supprimer ou de mettre entre parenthèses l'article de son règlement permettant de sanctionner une délégation pour "raisons substantielles", c'est-à-dire politiques, le Comité des ministres avalise enfin un mécanisme de substitution déjà approuvé par l'Assemblée.

Il prévoit "une réponse coordonnée" entre les trois organes, "lorsqu'un État membre manque à ses obligations statutaires ou ne respecte pas les normes, les valeurs et les principes fondamentaux défendus par le Conseil de l'Europe".

Un mécanisme serait alors engagé avec l'Etat défaillant, qui pourrait aboutir plus facilement à des sanctions mais le comité des ministres resterait maître de la décision finale, comme le souhaite Moscou.

(Gilbert Reilhac, avec Anne Kauranen et Luke Baker, édité par Yves Clarisse)