La tension monte en Indonésie après la réélection de Widodo

reuters.com  |   |  606  mots
Indonesie: heurts apres la reelection du president widodo, six morts[reuters.com]
(Crédits : Willy Kurniawan)

par Maikel Jefriando et Heru Asprihanto

DJAKARTA (Reuters) - Au moins six personnes ont été tuées et 200 autres blessées lors de heurts à Djakarta après l'annonce de la réélection du président sortant Joko Widodo, a déclaré mercredi le gouverneur de la capitale indonésienne, tandis que la police a annoncé avoir procédé à une vingtaine d'arrestations.

Dans la soirée, les forces de l'ordre sont intervenues à coups de gaz lacrymogènes pour disperser des manifestants qui s'étaient de nouveau regroupés dans la capitale, notamment près du siège de la commission électorale.

Le candidat de l'opposition, Prabowo Subianto, a dit mardi qu'il rejetait le résultat du scrutin du 17 avril après la proclamation de la victoire de Joko Widodo par la commission électorale.

Les manifestations, d'abord pacifiques, ont pris un tour violent dans la soirée de mardi et les forces de l'ordre ont procédé à des tirs de gaz lacrymogène pour disperser les manifestants.

La situation a dégénéré dans la nuit. A 09h00 (02h00 GMT) mercredi, six décès avaient été signalés, a déclaré le gouverneur de Djakarta. Deux cents blessés ont été hospitalisés, a ajouté Anies Baswedan dans un entretien à la chaîne TVOne.

Le président Widodo a déclaré que la situation était maîtrisée et a mis en garde les fauteurs de troubles. "Je ne tolérerai que personne ne trouble la sécurité ou l'unité de notre pays, pas plus que le processus démocratique", a-t-il dit lors d'un point de presse au palais présidentiel.

La police a annoncé avoir procédé à une centaine d'arrestations pour incitation à la violence.

ACCÈS RESTREINT AUX RÉSEAUX SOCIAUX

Les pouvoirs publics ont parallèlement restreint l'accès aux réseaux sociaux pour limiter la diffusion et la propagation de fausses nouvelles et d'appels à la violence. Le ministre de la Sécurité, Wiranto, a précisé que des freins seraient mis à la mise en ligne de vidéos ou de photos sur les plateformes de Twitter et de Facebook ainsi que sur Instagram et Whatsapp.

L'objectif, a expliqué à la presse le ministre des Communications, Rudiantara, est de ralentir les contenus susceptibles d'attiser les "émotions".

Avec 130 millions de comptes actifs, l'Indonésie est le troisième marché de Facebook dans le monde.

Prabowo, qui refuse d'admettre sa défaite, a appelé à des manifestations pacifiques et "engage toutes les parties - ceux qui expriment leurs aspirations, ainsi que la police, l'armée et toutes les parties - à s'abstenir de toutes violences physiques".

Son équipe de campagne a annoncé qu'elle envisageait de déposer un recours jeudi devant la Cour constitutionnelle. En 2014 déjà, à l'issue de la précédente présidentielle, Prabowo avait contesté en justice l'élection de Widodo. Il avait été débouté.

La majorité des manifestants semblaient venir de l'extérieur de Djakarta, et les policiers ont trouvé des enveloppes contenant des billets de banque sur certains manifestants, a déclaré le porte-parole de la police nationale. "Ce n'est pas un incident spontané", a ajouté Muhamad Iqbal. "Des signes indiquent que ces foules sont payées", a-t-il poursuivi lors d'une conférence de presse.

D'après les autorités indonésiennes, quelque 40.000 policiers et militaires sont mobilisés dans Djakarta pour assurer la sécurité. Selon le porte-parole de la police nationale, les forces de sécurité - y compris les militaires - ne sont pas équipées en balles réelles.

(avec Gayatri Suroyo, Agustinus Beo Da Costa et Fanny Potkin; Jean Terzian et Henri-Pierre André pour le service français)