Salvini conforté dans sa volonté de renégocier les règles de l'UE

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Le gouvernement italien pas affecte par le scrutin europeen, selon di maio[reuters.com]
(Crédits : Ciro De Luca)

par Sara Rossi et Gavin Jones

ROME (Reuters) - Le chef de la Ligue Matteo Salvini a estimé lundi que la large victoire de son parti aux élections européennes lui donnait mandat pour renégocier les règles budgétaires de l'UE afin de baisser les impôts des contribuables italiens sans dépasser le niveau de déficit autorisé dans la zone euro.

Matteo Salvini, qui est vice-président du Conseil et ministre de l'Intérieur, a également assuré que le médiocre résultat de ses partenaires du Mouvement 5 Etoiles (M5S) dans ce scrutin ne remettait aucunement en cause la coalition au pouvoir depuis près d'un an à Rome.

La Ligue a obtenu 34,3% des voix dimanche, soit le double du M5S, qui plafonne à 17,1% et a été battu par le Parti démocrate (PD) pro-européen de centre gauche (22,7%).

Lors des législatives italiennes de l'an dernier, le rapport de forces était inversé: le M5S avait obtenu 37% des voix et la Ligue, qui se présentait au sein d'une coalition de droite, 17,6%.

"Le temps est venu de rediscuter totalement les vieilles règles dépassées qui nuisent à l'Europe. On ne peut pas expliquer autrement un tel vote", a déclaré Matteo Salvini lors d'une conférence de presse à Milan.

Le ministre de l'Intérieur a axé sa campagne sur les baisses d'impôts, qui sont une "question capitale" pour les Italiens et seront au coeur de la loi de finances pour 2020 qui sera présentée à l'automne, a-t-il déclaré.

L'Italie, dont le ratio dette/PIB est le deuxième plus haut de la zone euro après celui de la Grèce, s'est heurtée à la Commission européenne l'an dernier sur son projet de budget.

Avec une économie presque stagnante, le gouvernement sera encore confronté à une tâche difficile cet automne quand il faudra préparer un budget 2020 qui respecte les promesses de la Ligue en matière de réduction d'impôts tout en gardant les comptes publics sous contrôle.

Matteo Salvini a dit avoir cru comprendre que la Commission avait adressé à Rome une nouvelle mise en garde sur ses finances publiques et ajouté: "S'ils demandent de nouvelles coupes, nous dirons non."

Le dirigeant d'extrême droite s'est cependant déclaré convaincu que la prochaine Commission européenne, qui prendra ses fonctions en novembre, sera plus "amicale" vis-à-vis de l'Italie, troisième économie de la zone euro.

VOLONTÉ D'APAISEMENT

Concernant l'avenir de la coalition au pouvoir, Matteo Salvini a souligné sa volonté d'apaisement, après une campagne des européennes marquée par de fortes tensions entre les deux partis de gouvernement.

"Pour moi, nos alliés au gouvernement sont des amis et nous allons dès demain nous remettre au travail avec sérénité et dans une atmosphère apaisée", a-t-il dit. "Mon adversaire, c'est et ça reste la gauche", a-t-il ajouté, faisant référence au Parti démocrate (PD) arrivé en deuxième position.

Luigi Di Maio a imputé le résultat décevant de sa formation à la faible participation dans ses bastions du Mezzogiorno, le sud de l'Italie. Lui aussi a exclu un bouleversement au sein du gouvernement. "Rien ne va changer, nous allons de l'avant", a-t-il dit au quotidien Corriere della Sera, ajoutant que le gouvernement de coalition comptait bien aller jusqu'au bout de son mandat de cinq ans.

Luigi Di Maio a également déclaré que personne au sein du M5S n'avait réclamé sa démission.

"Tout le monde (au sein du M5S) est d'accord pour dire que le mouvement a besoin de se réorganiser mais personne ne dit que des têtes doivent tomber", a déclaré le chef du M5S à des journalistes à Rome.

Malgré les propos conciliants de Matteo Salvini, d'autres membres de la Ligue ont souligné que leur formation était désormais la force dominante.

"Les décisions sur les priorités du gouvernement reviennent désormais à Matteo Salvini et à la Ligue", a ainsi estimé le chef du groupe parlementaire de la Ligue à la Chambre des députés, Riccardo Molinari.

Le décevant résultat du M5S aux européennes pourrait mettre en difficulté Luigi Di Maio, qui sera mis sous pression pour ne pas faire trop de concessions à la Ligue, notamment sur les questions sociales.

Il entend toutefois discuter "dès cette semaine" avec Matteo Salvini de la création d'un taux unique d'imposition (flat tax) et de la mise en place d'un salaire minimum.

"A court terme, aucun des deux partis n'a intérêt à rompre la coalition", explique Alessandra Lanza, de la société de conseil économique Prometeia, basée à Bologne.

(Gavin Jones avec Valentina Consiglio, Maria Pia Quaglia et Sara Rossi; Tangi Salaün, Guy Kerivel et Jean-Stéphane Brosse pour le service français)