France : L'exécutif retarde les mesures d'incitation à "travailler plus"

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France: l'executif retarde les mesures d'incitation a travailler plus[reuters.com]
(Crédits : Stephane Mahe)

PARIS (Reuters) - Les mesures incitant les Français à retarder leur départ à la retraite n'entreront pas en vigueur dès 2020, mais plus progressivement pour préparer la mise en place du nouveau régime universel en 2025, a-t-on appris de source proche du dossier.

Le prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), qui fixe les objectifs de dépenses pour 2020, ne contiendra pas de mesure de décalage de l'âge de départ à la retraite ou d'allongement de durée de cotisation, a-t-on précisé vendredi, confirmant une information des Echos.

De tels ajustements sont néanmoins nécessaires à moyen terme pour préparer la mise en place du nouveau régime et pourraient figurer dans le projet de loi qui sera présenté fin 2019.

De nouvelles concertations s'ouvriront ainsi avec les partenaires sociaux dans les prochains mois pour déterminer les meilleurs outils à utiliser.

L'exécutif renoncerait donc à des économies de très court terme, qui auraient servi à financer notamment les baisses d'impôts promises par Emmanuel Macron à l'issue de la crise des "Gilets jaunes" ou les dépenses liées à la perte d'autonomie.

Il entend toutefois résorber le déficit du système avant la mise en place du régime universel. Ce dernier devrait comprendre des règles d'or qui lui imposent de tendre vers l'équilibre financier chaque année.

Sans changement, le besoin de financement du régime atteindra 0,3% à 0,6% du PIB, soit près de 10 milliards d'euros en 2025, estime le Conseil d'orientation des retraites. Cette dégradation s'explique par une progression de la masse salariale moindre que celle initialement attendue dans les prévisions du PLFSS pour 2019.

La fin des effets de la réforme de 2010 qui relevait l'âge légal de départ à la retraite de deux ans ne contribue par ailleurs plus à modérer l'augmentation des dépenses. Et la mise en place de la réforme Touraine, votée en 2014, qui allonge les durées de cotisation nécessaires pour obtenir le taux plein, ne prendra le relais qu'à partir de 2020.

AGE D'ÉQUILIBRE À 64 ANS

Plusieurs options seraient donc sur la table : accélérer la réforme Touraine pour que la durée de cotisation permettant d'obtenir le taux plein, aujourd'hui de 41,5 ans, soit progressivement portée à 43 ans en 2025 et non pas 2035, ou encore décaler l'âge de départ moyen avec un mécanisme de décote/surcote.

Dans tous les cas, l'âge d'équilibre du système, soit l'âge moyen de départ à la retraite qui garantit au régime une pérennité financière, doit se situer autour de 64 ans en 2025. Cette borne d'âge pourra être décalée au fur et à mesure des années pour tenir compte de la hausse de l'espérance de vie de chaque génération.

Cette décision de l'exécutif pourrait apaiser en partie la colère des syndicats, très remontés par la perspective d'une réforme paramétrique en amont de la réforme globale du système.

"Si l'annonce est doublée d'une mesure applicable dès 2020, par exemple l'augmentation de la durée de cotisation, la discussion sera terminée pour la CFDT", a dit Laurent Berger, secrétaire général du syndicat, à Ouest-France, dimanche.

"Il ne serait pas difficile d'enclencher une mobilisation sur ce sujet", a-t-il ajouté.

Le Comité de suivi des retraites, qui s'assure que le régime ne s'éloigne pas de ses objectifs financiers, a remis vendredi un avis au Premier ministre dans lequel il maintient ses recommandations de 2017 sur la nécessité de ramener le système sur une trajectoire d'équilibre.

Le CSR estime par ailleurs que les orientations générales du nouveau régime vont dans le sens de ses observations en apportant plus de lisibilité et en protégeant davantage le régime des aléas économiques et démographiques.

Dans un communiqué, le Premier ministre a précisé qu'il tiendrait compte de cet avis dans la réforme. Les préconisations du haut-commissaire, Jean-Paul Delevoye, doivent, à ce titre, être présentées jeudi prochain.

(Caroline Pailliez, édité par Jean-Philippe Lefief et Yves Clarisse)