Coronavirus : Une pandémie de plus en plus plausible

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Coronavirus: une pandemie de plus en plus plausible[reuters.com]
(Crédits : Manuel Silvestri)

par Stephanie Nebehay et Ryan Woo

PEKIN/GENEVE (Reuters) - La propagation rapide du nouveau coronavirus, qui a gagné vendredi six nouveaux pays, exacerbe les craintes d'une pandémie, un scénario que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) n'exclut pas.

"L'épidémie s'étend. L'hypothèse qu'elle touche plusieurs pays, voire tous les pays du monde, est quelque chose que nous envisageons et que nous évoquons depuis un certain temps", a déclaré Christian Lindmeier, porte-parole de l'OMS, lors d'une conférence de presse à Genève.

Les marchés financiers, dont la chute libre s'est poursuivie vendredi, ont connu leur semaine la plus noire depuis la crise financière de 2008 avec une perte évaluée à 5.000 milliards de dollars.

La progression rapide du nombre de cas hors de Chine, où le virus est apparu en décembre, est venue à bout des espoirs d'un retour rapide à la normale. Nigeria, Estonie, Danemark, Pays-Bas, Lituanie et Mexique sont venus s'ajouter en quelques heures à la liste des pays touchés.

De nombreux Etats ont par ailleurs renoncé par précaution à de grands rassemblements publics. La Suisse a été le dernier en date avec l'annulation du Salon international de l'automobile de Genève, qui devait avoir lieu la semaine prochaine.

En Chine continentale, où la situation semble en revanche s'améliorer, 327 nouvelles infections ont été signalées vendredi. Il s'agit du bilan quotidien le plus faible depuis le 23 janvier. Au total, un peu plus de 78.800 cas et 2.800 décès y ont été récensés depuis l'apparition de la maladie à Wuhan, dans le centre du pays.

Les trois plus grandes compagnies aériennes chinoises ont repris certaines des liaisons internationales qui avaient été suspendues et le défilé de mode de Shanghai, qui avait été reporté, a finalement pu être suivi sur internet.

Malgré l'amélioration des chiffres, un membre de l'administration chinoise a qualifié l'épidémie de crise sanitaire d'une ampleur inédite pour le pays. Un autre haut fonctionnaire a affirmé que certains patients restaient contagieux après leur guérison, ce qui compliquerait l'éradication du virus.

LE NOMBRE DE CAS DOUBLE EN FRANCE

A l'échelle mondiale, les trois quarts des nouveaux cas sont désormais diagnostiqués hors de Chine et les mesures de précaution se multiplient à travers le monde.

Les militaires américains présents en Arabie saoudite ont ainsi été priés d'éviter les lieux très fréquentés, comme les centres commerciaux et les cinémas.

La Bulgarie se dit prête à déployer un millier d'hommes en renfort à sa frontière avec la Turquie pour éviter un afflux de migrants en provenance de Syrie en pleine crise sanitaire, alors qu'aucun cas n'y a été décelé. La Grèce a également annoncé un renforcement des contrôles aux frontières.

En Mongolie, pays également épargné, le président Battulga Khaltmaa a été placé en quarantaine à son retour d'une visite en Chine, selon la presse officielle. En Russie, 88 étrangers ont été expulsés pour ne pas avoir respecté les règles de quarantaine.

Aux Etats-Unis, le gouvernement envisage d'invoquer des pouvoirs spéciaux pour accroître la production d'équipements de protection.

En France, le nombre de cas confirmés depuis l'apparition du virus est passé en 24 heures de 18 à 38. Le gouvernement a annoncé vendredi qu'il considérait désormais le coronavirus comme un cas de force majeure pour les entreprises.

En Italie, pays européen le plus touché, le bilan s'élève désormais à 17 morts et 655 cas, soit 200 de plus que jeudi. L'Allemagne compte près de 60 cas et l'Espagne 23, selon le décompte de Reuters.

LES JO DE TOKYO MENACÉS

Selon l'OMS, l'Italie a atteint un seuil "décisif", tout comme l'Iran et la Corée du Sud, qui se classe juste derrière la Chine avec 2.337 cas, dont 571 ont été signalés vendredi, et 13 morts.

La République islamique fait quant à elle état de 388 cas, dont 34 mortels, ce qui lui vaut le bilan le plus lourd hors de Chine en termes de mortalité, mais l'épidémie pourrait y avoir été sous-estimée, selon le Dr Mike Ryan, directeur exécutif chargé du Programme de gestion des situations d'urgence sanitaire de l'OMS. Tous les établissements scolaires y seront fermés pour trois jours à partir de samedi.

Mike Ryan a par ailleurs annoncé que l'éventuelle annulation des Jeux olympiques de Tokyo, qui doivent s'ouvrir en juillet, était en discussion. Les organisateurs doivent par ailleurs se prononcer la semaine prochaine sur le maintien ou non du parcours de la torche olympique, qui doit arriver le 20 mars au Japon pour un relais qui doit s'étaler sur 121 jours.

Vendredi, le nombre de cas confirmés dans l'archipel a passé le seuil des 200, dont quatre ont été mortels, mais 700 ont été dénombrés à bord du Diamond Princess, le bateau de croisière placé en quarantaine à Yokohama. Un passager britannique a succombé vendredi au coronavirus, ce qui porte le bilan à bord à six morts, d'après l'agence Kyodo.

Tous les établissements scolaires japonais, de l'école élémentaire au lycée, vont devoir fermer leurs portes à compter du 2 mars jusqu'aux vacances de printemps, a annoncé jeudi le Premier ministre Shinzo Abe, ce qui a soulevé une vague de protestations.

(Avec Yingzhi Yang à Beijing, Lisa Lambert et Mark Hosenball à Washington, Sangmi Chai à Séoul, Leika Kihara à Tokyo, Kate Kelland à Londres, Tsvetelia Tsolova à Sofia, Michael Shields et Brenna Hughes Neghaiwi à Zurich; version française Jean-Philippe Lefief, édité par Jean-Stéphane Brosse)