Au Medef, le libéralisme de François Fillon convainc mais ne séduit pas

Par Constant Méheut, à Jouy-en-Josas  |   |  766  mots
L'ex-Premier ministre s'est présenté hier aux Universités d'été du MEDEF pour tenter de séduire l'électorat patronal sur fond de propositions pro-entreprises.
L'ancien Premier ministre a passé son Grand Oral devant les patrons du Medef mardi après-midi. Une opération séduction pour le candidat à la primaire des Républicains qui a insisté sur le caractère libéral de son programme économique.

"Je suis le candidat de la liberté", a martelé François Fillon. L'ambiance, en ce mardi après-midi aux Universités d'été du MEDEF sur le campus de HEC à Jouy-en-Josas (Yvelines), avait tout d'un examen de passage pour le candidat à la primaire de la droite et du centre. En une trentaine de minutes, l'ancien Premier ministre a tenté de convaincre le jury patronal avec nombre de propositions pro-entreprises. Mais a-t-il seulement réussi à emporter les cœurs?

L'examen de passage façon Medef

Ce n'est plus une surprise, à quelques mois des élections présidentielles, le Medef a décidé de faire de ses Universités d'été "the place to be" des candidats à la présidentielle. François Fillon hier, Bruno le Maire, Nicolas Sarkozy, Alain Juppé aujourd'hui et même Emmanuel Macron en fin d'après-midi, dont on ne sait pas s'il viendra se présenter en tant qu'ex-ministre de l'économie ou dans la peau de futur candidat à la présidence de la République.

Dans ce contexte, le syndicat patronal a décidé de mettre en place un véritable examen de passage pour chacun des candidats. D'abord une minute trente de présentation suivie d'une quinzaine de minutes de questions par des chefs d'entreprises et enfin deux dernières minutes pour convaincre la salle. Un grand oral en somme, destiné à placer l'entreprise et l'économie au cœur de la prochaine campagne présidentielle.

François Fillon prône une grande vague de liberté

Bien conscient de l'enjeu de son intervention, François Fillon n'a donc pas hésité à habiller ses propos d'un mot clé: liberté. Il a tenu à rappelé qu'il avait bien conscience de l'exaspération des entreprises françaises face à la politique de François Hollande, et il s'est engagé à "donner une liberté totale aux entreprises" s'il est élu. Prenant à rebours l'étatisme typiquement français, François Fillon a même affirmé sa volonté de "sortir l'Etat de toute une partie de la sphère économique".

L'efficacité fût un autre des maîtres mots de son intervention. Le candidat à la primaire des Républicains a exprimé sa volonté de réformer vite et "sans crainte de l'affrontement". Il a également appelé à un gouvernement réduit à quinze ministres, lesquels devront être connus de tous et pour certains "issus de la société civile car le système politique doit être rénové". On pourrait donc s'attendre à ce que François Fillon dévoile assez vite les noms de ses éventuels ministres en cas de victoire en mai 2017.

Une batterie de mesures en faveur de l'entreprise

L'ex-Premier ministre n'a pas hésité non plus à affirmer qu'il faut "supprimer la durée légale du temps de travail, qui n'est plus la référence aujourd'hui". Critiquant les 35 heures qui ne sont plus adaptées au monde actuel, il en a appelé à des négociations au sein de chaque entreprise. François Fillon a également rappelé son attachement à la création d'un vrai statut de travailleur indépendant sur le modèle du statut actuel d'auto-entrepreneur, ce qui, selon lui, permettra de "développer l'emploi et d'amorcer une nouvelle relation au travail".

Sur le plan fiscal et budgétaire, le candidat républicain a exprimé sa volonté d'accorder s'il est élu 50 milliards d'euros de baisse de charges et d'impôts sur les entreprises et de supprimer l'ISF (Impôt Sur la Fortune) afin de relancer l'économie. "La France doit être un pays de plein emploi", a martelé l'ex-Premier ministre qui souhaite aussi fusionner toutes les aides sociales en une seule.

Un candidat qui convainc mais ne persuade pas

Mais force est de constater que lorsqu'il fût interrogé sur l'économie numérique et son influence sur l'environnement économique actuel, François Fillon est resté bien évasif voire déstabilisé, comme s'il n'avait pas encore réfléchi à ce secteur d'avenir. C'est un ex-premier ministre au discours assez "classique" et bien loin de la modernité espérée qui s'est finalement présenté devant les patrons, s'appliquant à calquer son discours sur les revendications principales du MEDEF.

Or, en cela, il a aussi échoué à dessiner un projet économique digne de ce nom, moderne, progressiste, anticipant les mutations, bref un projet séduisant. Pour son mot de la fin, on aurait espéré un peu d'audace, un soupçon d'originalité, mais non, François Fillon s'en est tenu au désormais très banal "Liberté". Le candidat de droite a donc convaincu les esprits mais n'a pas encore persuadé les cœurs. Plus que deux mois pour opérer cette transition.