Cap 2022 : des pistes explosives pour baisser la dépense publique

Par Grégoire Normand  |   |  815  mots
Le gouvernement a annoncé la semaine dernière que les mesures préconisées seraient révélées "au fur et à mesure" des réformes, et que le rapport ne serait rendu intégralement public qu'après octobre. (Crédits : Reuters/Benoit Tessier)
Les propositions du comité d'experts mandaté par le gouvernement pour réfléchir à la baisse de la dépense publique permettraient d'économiser 30 milliards d'euros. Le groupe composé de hauts fonctionnaires, chefs d'entreprise et d'élus suggère de revoir certaines "niches fiscales" comme la TVA à taux réduit dans la restauration ou le bâtiment.

Les premières pistes avancées par le comité d'action publique 2022 devraient susciter de vives réactions. Dans son édition du mardi 17 juillet, Le Figaro est revenu sur les 22 propositions de réformes remises au gouvernement par le groupe composé d'experts des secteurs public et privé visant à moyen terme à faire 30 milliards d'économies. Le gouvernement a annoncé la semaine dernière que les mesures préconisées "seraient révélées au fur et à mesures des réformes" et que le rapport serait rendu public à partir du mois d'octobre seulement.

La réforme de l'État promise par Emmanuel Macron pourrait s'inspirer des propositions qui figurent dans le rapport. Lors de la campagne présidentielle, Emmanuel Macron s'était engagé à réduire le ratio de dépenses publiques de 4 points de PIB sur l'ensemble du quinquennat. Dans un communiqué, Matignon a fait la semaine dernière savoir que "des ateliers sectoriels consacrés aux objets de réformes du programme Action publique 2022 les plus structurants se dérouleront entre juillet et octobre. Le gouvernement annoncera après chaque atelier ses décisions opérationnelles et un calendrier de mise en œuvre. Les rapports CAP22 et J22 seront publiés au terme de cette phase de décision."

Les taux réduits de TVA dans le viseur

Le comité d'experts dans son rapport consulté par Le Figaro propose plusieurs pistes pour réduire la dépense publique. Parmi les propositions suggérées figure la suppression des aides jugées "particulièrement inefficaces", en particulier celles destinées à la transition énergétique. Certaines niches fiscales avec des taux réduits dans le bâtiment et la restauration pourraient être menacées. Dans une note publiée il y a quelques semaines, l'Institut des politiques publiques a montré que les restaurateurs n'avaient pas tenu leurs engagements notamment en termes de prix et d'emplois lorsque le taux de TVA dans le secteur était passé de 19,6% à 5,5% en 2009.

"La réduction de la TVA a essentiellement profité aux propriétaires de restaurants. Plus précisément, nous montrons que, 30 mois après la baisse de TVA, les prix ont seulement diminué de 1,9%, tandis que le coût des salaires et des fournitures a seulement augmenté de 4,1% et de 5%, respectivement, et que les bénéfices des propriétaires ont augmenté d'environ 24%."

Au final, les rédacteurs du rapport estiment que ces suppressions pourraient faire gagner plus de 5 milliards d'euros. Outre la remise en cause de ces aides et niches fiscales, le groupe d'experts préconisent également de réformer le système de soins en développant une offre de soins locales et un renforcement de l'innovation qui pourraient également permettre de faire des économies à hauteur de 5 milliards d'euros.

Vers un assouplissement du statut de la fonction publique

Le document propose par ailleurs d'assouplir le statut des fonctionnaires, afin de faciliter les évolutions entre les trois fonctions publiques (État, territoriale et hospitalière). Cette proposition devrait susciter de vifs débats dans le personnel de l'administration publique. Concernant les collectivités locales, elles pourraient se voire attribuer des compétences supplémentaires par le biais de transferts. Enfin, les auteurs du rapport proposent de simplifier les organismes chargés de recouvrer les impôts (un milliard d'euros d'économies) et de réformer Pôle emploi.

Un manque de transparence critiqué

La non-communication du rapport par le gouvernement a suscité des critiques aiguës ces derniers jours. Lors de la publication du rapport d'information relatif au débat d'orientation des finances publiques, le député LREM Joel Giraud a rappelé les réserves de la Cour des comptes sur ce procédé et a lui même préconisé plus de transparence :

« La non publication du rapport et l'absence de communication du gouvernement depuis la fin des travaux du comité sont critiquées par la Cour des comptes. Celle-ci considère que "la crédibilité de la trajectoire des dépenses publiques s'en trouve de ce fait affectée". Le rapporteur général estime que le gouvernement pourrait utilement profiter du débat d'orientation des finances publiques pour annoncer différentes réformes structurantes et préciser les sources d'économies qu'il envisage pour l'exercice 2019 et pour les exercices postérieurs. Cela aurait pour effet d'accroître la transparence et la lisibilité de la trajectoire de la dépense publique. »

Par ailleurs, l'opposition a également fait part de son mécontentement. Il y a quelques jours, Laurent Wauquiez a réclamé une publication du document. « Je demande très simplement que les conclusions de ce rapport soient mises au débat public, qu'on puisse avoir un débat qui soit officiel, sur la table, entre responsables », a-t-il ajouté. Les débats sur la transformation de l'action publique risquent d'être animés à l'automne même si le gouvernement tente de rassurer l'opinion sur ce chantier très sensible.