Comment Macron compte sur le plan Juncker pour soutenir la French Tech

Par Delphine Cuny  |   |  638  mots
Emmanuel Macron et Jyrki Katainen au milieu de startuppers au Numa.
Le ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique a fait visiter jeudi l'incubateur Numa, haut lieu des startups parisiennes, et le siège de Priceminister au vice-président de la Commission européenne, Jyrki Katainen chargé du plan d’investissement européen de 315 milliards d’euros. Une partie devrait être consacrée au soutien au capital-risque - principal soutien aux startups du numérique - qui demeure la faiblesse de l’écosystème européen.

« La France est la première nation d'Europe, même en comptant le Royaume-Uni, en termes de création de startups » a vanté Emmanuel Macron au vice-président de la Commission européenne, Jyrki Katainen, qui réalise une « tournée pour l'investissement » dans toute l'Europe jusqu'en octobre avant d'engager les premiers euros du plan Juncker de 315 milliards d'euros. Le ministre de l'Economie, de l'Industrie et du Numérique lui a fait visiter jeudi l'incubateur Numa, l'un des hauts lieux de la scène parisienne des startups, dans le Sentier, et une des vitrines de la French Tech, l'écosystème français des jeunes pousses du numérique. Les deux dirigeants ont pu brièvement échanger avec quelques jeunes entrepreneurs avant de prendre une jolie photo souvenir.

« Il faut un marché unique du digital, définir une stratégie numérique européenne, unifier nos règles» a déclaré sur place le ministre, déplorant que « notre marché est notre petit, le même sujet de taille critique se pose en Allemagne, nous n'avons pas ce marché domestique énorme comme les Chinois ou les Américains, il y a des barrières administratives, fiscales, etc. »


Derrière cette ambition commune d'un marché unique du numérique, Emmanuel Macron veut faire émerger un sujet, celui du problème de financement des startups.

« Il y aura une poche de capital-risque dans le plan Juncker. Nous n'allons pas abandonner les grands projets d'infrastructures, le BTP reste une priorité du gouvernement. Mais il est nécessaire de faire plus en capital-risque, vous le savez bien, c'est une des faiblesses européennes » a-t-il fait valoir.

Faire émerger des géants européens du capital-risque

Le gouvernement français espère convaincre la Commission qu'une partie des 5 milliards d'euros qui peuvent être « fléchés » pour de l'investissement directement en « equity », en fonds propres, soit affectée en priorité au capital-risque. Plus exactement, l'idée est de « faire émerger une offre de financement européenne », de « transformer le secteur du capital-risque » qui a besoin d'un « vrai changement d'échelle » explique le cabinet du ministre. 
A travers le plan Juncker, l'idée serait d'aider des équipes de gestion à se structurer pour faire émerger des fonds de "Large Venture" privés puissants, « de très grande taille, plus de 300 millions d'euros », capables de prendre de « gros tickets » (plusieurs dizaines de millions) dans des entreprises en phase d'accélération, plutôt à l'image d'un BlaBlaCar qui a levé 100 millions de dollars l'été dernier ou de l'e-commerçant Sarenza (74 millions d'euros). Bercy se désespère que plus de 70% des levées de plus de 10 millions d'euros en Europe fassent intervenir des capitaux-risqueurs américains.

L'ex-Premier ministre finlandais, chargé à la Commission de l'emploi, la croissance, l'investissement et la compétitivité, a bien reçu le message : « les startups nous ont dit qu'elles ont avant tout besoin d'equity pour développer leur business. L'EFSI  peut aider » a-t-il publié sur son compte Twitter, en référence au Fonds européen pour les investissements stratégiques (EFSI), qui sera le principal instrument visant à mobiliser les 315 milliards d'euros du plan Juncker, au sein de la Banque européenne d'investissement (BEI).

Le sujet a semble-t-il été largement débattu ensuite entre Emmanuel Macron et Jyrki Katainen lors d'un déjeuner privé organisé au siège de Priceminister, la pépite de l'e-commerce français rachetée en 2010 par le japonais Rakuten, autour de certains des plus illustres représentants de l'écosystème de startups français, dont Frédéric Mazzella, le cofondateur et directeur général de BlaBlaCar, Marie Ekeland, co-présidente de l'association France Digitale, associée partie depuis peu de la société de capital-risque Elaia Partners où elle avait mené Criteo jusqu'à son introduction triomphale au Nasdaq, et Olivier Mathiot (cofondateur de Priceminister).