Croissance et emploi : l'optimisme de Michel Sapin reste intact

Par Fabien Piliu  |   |  685  mots
" Ce qui compte, c'est qu'à la fin de cette année, pour reprendre un chiffre cité à juste titre par le Premier ministre, nous soyons sur un rythme de croissance de l'ordre de 1,5%", a déclaré Michel Sapin.
Le ministre des Finances estime qu'une croissance annuelle de 1,5% en 2015 est possible. La baisse du nombre de demandeurs d'emplois le serait donc tout autant.

En 2012 et jusqu'au début de l'hiver 2013, Michel Sapin, alors ministre du Travail martelait sûr de son fait que la courbe du chômage allait s'inverser fin 2013. Cette inversion ne s'est toujours pas produite. A sa décharge, le ministre ne faisait alors que rappeler la promesse faite par François Hollande.

Depuis son arrivée à Bercy, Michel sapin s'était plutôt départi de son bel optimisme. Au regard de la situation des finances publiques et des difficultés de la France à respecter en temps et en heure ses engagements en matière de réduction du déficit public, on peut comprendre cette discrétion. On peut même la louer.

Chassez le naturel, il revient au galop. Quelques jours à peine après que l'Insee ait annoncé une progression de 0,6% du PIB au premier trimestre, le ministre des Finances retrouve son bel enthousiasme.

Deux jours après que Manuel Valls, le Premier ministre ait annoncé sur France Culture que l'économie française pouvait progresser à un rythme de de 1,5% cette année, Michel Sapin a assuré le service après-vente de Matignon. " Ce qui compte, c'est qu'à la fin de cette année, pour reprendre un chiffre cité à juste titre par le Premier ministre, nous soyons sur un rythme de croissance de l'ordre de 1,5%. (...) A la fin de l'année, il faut que la France fonctionne aux alentours de 1,5% ", a-t-il déclaré.mercredi, lors de l'émission "Questions d'Info" LCP-France Info-Le Monde-AFP

Une crédibilité en jeu

Si cette prévision de croissance devait se réaliser, elle dépasserait de 0,5 point celle sur laquelle repose la construction de la loi de finances 2015. Une prévision que le ministre n'envisage pas de réviser officiellement.

En vendant ainsi la peau de l'ours, le ministre prend-il un énorme risque ? Un certain nombre d'économistes jugent la prévision du gouvernement un peu prudente. Mais aucun n'a encore tablé sur une progression de 1,5% du PIB. Les plus optimistes visent plutôt une augmentation de 1,4% de l'activité. C'est notamment le cas de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Seule la crédibilité du gouvernement est en jeu.

Une baisse du chômage en 2015 ?

L'optimisme de Michel Sapin ne s'arrête pas là. Dans une belle logique, le ministre a une nouvelle fois annoncé une diminution du nombre de demandeurs d'emplois si la croissance accélère. " C'est à ce moment-là que les créations d'emploi sont suffisamment nombreuses non seulement pour compenser les destructions, mais aussi pour accueillir les jeunes qui arrivent sur le marché du travail. (...) Mais il y a une condition fondamentale (...), c'est l'investissement. (...). Ce qui compte, c'est que dans les entreprises, on achète des machines, on construise des ateliers nouveaux, on lance de nouveaux produits. Et derrière cela, il y a des postes de travail, des créations d'emploi, un recul du chômage ", a expliqué Michel Sapin.

Là encore, le ministre joue avec le feu. Certes, la consommation des ménages résiste mais elle n'est pas non très vaillante. Le niveau actuel du chômage bride les élans consuméristes des ménages. Le redémarrage de l'investissement, même aidé aide par la faiblesse des taux d'intérêts et la mesure de suramortissement lancé par Matignon en avril, est donc hypothétique.

Les destructions d'emplois continuent

"Avec 1,5% de croissance portée par une consommation des ménages relativement importante, mais aussi et surtout par une confirmation d'un investissement plus important des entreprises, c'est une économie qui se porte bien, qui se porte mieux, qui apporte aux Français la seule chose qu'ils demandent véritablement aujourd'hui : des emplois pour ceux qui n'en ont pas", a précisé Michel Sapin.

Pour l'instant, entre ces espoirs et la réalité, l'écart est immense. Selon la Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), les services statistiques du ministère du Travail, le secteur marchand a continué à détruire des emplois au premier trimestre. Au total, ce sont 13.500 emplois qui ont été supprimés, notamment dans l'intérim et le bâtiment.