Croissance : l'économie tricolore s'est-elle ressaisie au troisième trimestre ?

Par Fabien Piliu  |   |  814  mots
Les perspectives dans le bâtiment restent dégradées
Tonique au premier trimestre, l'activité fut ensuite atone au deuxième. Que laissent présager les statistiques récentes ?

Ce fut un joli coup de tonnerre ! En annonçant que l'activité avait progressé de 0,7% au premier trimestre, l'Insee laissait espérer que la reprise était là, clairement palpable. Les espoirs des demandeurs d'emplois, et du gouvernement, ont été vite déçus puisqu'au deuxième trimestre, l'activité fut atone.

" Au final, en moyenne sur le premier semestre, la croissance a été à peine supérieure à 0,3 % par trimestre, rythme qui, bien que positif, ne peut être qualifié de « reprise de l'activité. Il faudrait en effet que la croissance s'élève au-dessus de son rythme de long terme, estimé à +0,4 % par trimestre, pendant plusieurs trimestres consécutifs pour que s'enclenche un mouvement de comblement de l'écart de production ", explique l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).

Une véritable reprise de l'activité est-elle envisageable ?

Un rebond de l'économie est-il envisageable au troisième trimestre ? L'Insee table sur une augmentation de 0,2% du PIB entre juillet et septembre puis de 0,4% entre octobre et décembre permettant à l'économie française d'afficher une croissance annuelle de 1,1% en 2015. Soit 0,1 point de plus que la prévision du gouvernement.

En attendant d'en savoir plus sur l'activité au quatrième trimestre, que laissent présager les statistiques déjà connues alors que le prix du pétrole, reste bas, que le niveau de l'euro face au dollar redresse la compétitivité-prix du made in France et que les conditions d'accès au crédit sont toujours attractives, conséquence de la politique monétaire menée par la Banque centrale européenne (BCE) ?

Première indication, et non des moindres compte tenu de son poids dans le PIB - près de 55% -, la consommation des ménages reste soutenue. Malgré une stagnation en septembre, elle a augmenté de 0,7% au troisième trimestre, tirée par les gains de pouvoir d'achat que procurent notamment la chute du prix de l'énergie.

Du côté des entreprises, la conjoncture n'est pas vraiment réjouissante. Certes, le climat des affaires a dépassé en octobre sa moyenne de long terme pour la première fois depuis août 2011. Mais ce regain de confiance tient surtout à l'amélioration des marges que permettent notamment la baisse des prix des matières premières et les nombreux dispositifs mis en place par le gouvernement pour réduire le coût du travail. Citons par exemple le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) et les allégements de cotisations patronales contenues dans le Pacte de responsabilité.

Cet optimisme relatif ne trouve pas son origine dans une amélioration brutale des perspectives de production. Loin s'en faut. En dépit d'un rebond de 1,6% en août, la production industrielle n'a progressé que de 0,5% sur un an... Quant au secteur du bâtiment, ses perspectives restent très mauvaises, notamment parce que la demande de logements neufs est faible.

Dévoilé ce lundi 2 novembre, l'indice PMI de la société Markit indique que l'activité du secteur manufacturier français est restée stable en octobre, à 50,6 points, comme au mois de septembre. En se situant au-dessus des 50 points, cet indicateur témoigne d'une progression de l'activité. Mais celle-ci est limitée. En revanche, cet indice constate le plus fort recul de l'emploi depuis dix mois dans le secteur manufacturier.

Stimulé par la mesure de suramortissement lancé en avril, l'investissement redémarre-t-il ? Pour l'instant, Bercy ne communique pas sur le succès de ce dispositif. Une chose est certaine, les dirigeants d'entreprises ne sont plus aussi enthousiastes qu'en début d'année. Ils ne prévoient plus que d'augmenter leurs investissements de 2%, et non plus de 7% comme ils l'anticipaient en janvier.

L'export peut-il venir au secours de la croissance ? En juillet et en août, le niveau des importations a une fois de plus dépassé largement celui des exportations. Le repli de l'euro face au dollar, des cours des matières premières et les mesures gouvernementales pour réduire le coût du travail sont pour l'instant sans effet sur la balance commerciale qui sera cette année déficitaire. C'est le cas depuis 2003.

Les avis des économistes divergent

Au regard de ces éléments, les économistes sont actuellement partagés. Chez Natixis et à l'OFCE, c'est une augmentation de 0,4% du PIB qui est attendue au troisième trimestre. Chez COE-Rexecode, la conjoncture actuelle n'incite pas spécialement à l'optimisme. Ses prévisions sont inchangées. L'institut continue à viser une croissance de 1,1% cette année.
En attendant de connaître le niveau actuel de l'activité, cette batterie de statistiques témoigne d'une chose : le modèle économique tricolore reste déséquilibré.

L'investissement des entreprises restant faible, le commerce extérieur étant trop peu dynamique pour tirer la croissance, la reprise ne repose que sur la consommation des ménages. Cette situation dure depuis le début des années 2000. C'est regrettable. Et déprimant.