Emeutes : patrons et commerçants appellent les pouvoirs publics à l'aide

Par latribune.fr  |   |  929  mots
Samedi, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire avait demandé aux assureurs de prolonger les délais de déclarations, de réduire les franchises et d'indemniser rapidement les professionnels victimes des émeutes. (Crédits : Reuters)
Après plusieurs nuits de chaos, les principales organisations patronales et commerçantes demandent à l'Etat des mesures de soutien supplémentaires. Au-delà des dommages financiers et matériels, le Medef déplore une « dégradation de l'image de la France ».

Après cinq années de crises ininterrompues qui ont bouleversé le fonctionnement de l'économie, des Gilets Jaunes au Covid en passant par la guerre en Ukraine puis l'inflation, les entreprises, notamment commerçantes, viennent de subir une vague de violence inouïe dans toute la France.

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Ce lundi, les grandes organisations patronales françaises ont demandé au gouvernement de mettre en place des mesures de soutien en faveur des commerçants et entrepreneurs touchés par six nuits de chaos après la mort de Nahel, abattu par un policier à Nanterre mardi dernier après une course-poursuite et plusieurs refus d'obtempérer.

Report de charges

Samedi, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire avait demandé aux assureurs de prolonger les délais de déclarations, de réduire les franchises et d'indemniser rapidement les professionnels victimes des émeutes. Un report de paiement des charges sociales et fiscales pour les entreprises affectées sera également possible. Cela risque de ne pas être « suffisant », estime toutefois la CPME.

La Confédération des petites et moyennes entreprises réclame ainsi des « mesures de soutien immédiates et massives » pour les commerçants et buralistes, qui ne bénéficient pas du chômage partiel.

« Pour ceux qui ont tout perdu, il est essentiel de leur assurer un moyen de subsistance », insiste la CPME, plaidant pour la mise en place « d'un fonds de secours » et un allongement des prêts garantis par l'Etat (PGE) accordés pendant la crise sanitaire.

Les commerces en première ligne

Parmi les activités les plus touchées, le ministère de l'Economie avait recensé en quatre nuits de troubles une dizaine de centres commerciaux et plus de 200 enseignes de la grande distribution attaqués et pillés - dont 15 incendiés -, ainsi que 250 débits de tabac, auxquels s'ajoutent 250 agences bancaires, des magasins de toutes tailles et des établissements de restauration rapide. Ce bilan devrait encore être réactualisé.

« Ces entreprises ne pourront reprendre leur activité avant plusieurs semaines, et beaucoup d'autres, notamment à caractère commercial, subissent déjà d'importantes baisses d'activité en raison des émeutes », pointe l'Union des entreprises de proximité (U2P).

L'organisation patronale souhaite également profiter de l'activité partielle et du report de charges, d'indemnisations rapides et proportionnées des assureurs et des facilités de paiement des banques.

Les soldes commencent mal...

Yohann Petiot, directeur général de l'Alliance du Commerce, qui représente grands magasins et enseignes de l'habillement et de la chaussure, pointe le « double impact pour les commerçants », avec, en plus des dégâts, « une perte d'activité considérable ».

« Ce sont les dix premiers jours qui font la réussite des soldes, (...) ce sera très difficile à rattraper », poursuit-il, réclamant la prolongation de cette période de déstockage strictement encadrée.

Dans ce contexte, la CPME plaide en faveur d'un report d'une semaine de la date de fin des soldes, prévue le 25 juillet. Au-delà des dommages financiers et matériels, le Mouvement des entreprises de France (Medef) déplore une « dégradation de l'image de la France (...). Des investisseurs pourraient renoncer à des projets si le calme n'est pas restauré et la sécurité assurée ».

Succession de galères

Au niveau local, les collectivités tentent également d'apporter un premier soutien à leurs commerçants. La ville de Lille monte une « cellule d'accompagnement pour les commerçants et habitants », « à la suite des dégradations et des pillages de ces derniers jours ».

La région Grand Est a également débloqué lundi un fonds d'aide d'urgence de dix millions d'euros pour réparer les dégradations commises lors des émeutes. Cinq millions d'euros doivent permettre de reconstruire les services publics endommagés et cinq millions supplémentaires doivent parvenir aux TPE (très petites entreprises) et commerçants affectés par les dégradations et pillages.

A Marseille, « les commerçants sont complètement abattus, depuis cinq ans, ils vivent une succession de galères et là, ils vivent ces violences comme une injustice », a rapporté lundi à l'AFP le président de la chambre de commerce et d'industrie (CCI) Marseille-Provence, Jean-Luc Chauvin, promettant notamment une aide de 10.000 euros déblocable sous 15 jours.

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Le sentiment d'accumulation, voire d'acharnement du sort, est palpable chez de nombreux commerçants et chefs d'entreprise. Pire, rien ne dit encore que la page de ces émeutes et de ces pillages est définitivement tournée. À Grenoble et ailleurs, la quasi-totalité des commerces des rues très touchées par les pillages placardent leurs vitrines avec des panneaux de bois ou de grilles pour protéger leurs commerces.

(avec AFP)

Rassemblement de soutien aux élus devant plusieurs mairies

Elus et citoyens se sont retrouvés lundi devant plusieurs mairies françaises au lendemain de la violente attaque à la voiture-bélier qui a visé le domicile du maire de L'Haÿ-les-Roses (Val-de-Marne), alors qu'une nette accalmie a été observée pour la sixième nuit d'émeutes.

Dans la nuit de samedi à dimanche, une voiture-bélier chargée de produits incendiaires a pénétré dans sa propriété alors qu'il se trouvait dans sa mairie. Le portail d'entrée et la voiture de la famille ont été brûlés. En prenant la fuite avec ses deux jeunes enfants, l'épouse du maire, Mélanie Nowak, conseillère départementale et adjointe au maire, s'est cassée le tibia et a été hospitalisée.