Emmanuel Macron confirme la suppression de l'ENA

Par Guillaume du Payrat  |   |  680  mots
Emmanuel Macron a confirmé, ce jeudi 25 avril, son intention de supprimer l'école nationale d'administration. (Crédits : Vincent Kessler)
Le chef de l'Etat a confirmé ce jeudi, en réponse à une question posée par un journaliste, la suppression de l'ENA. Il a également annoncé vouloir supprimer les "grands corps", et devrait mandater ce vendredi Frédéric Thiriez, ex-président de la Ligue de football professionnel (LFP), pour mission de réflexion sur la future réforme.

Pendant un moment, le doute a flotté dans la grande salle de l'Elysée. Lors de son "propos liminaire" avant les questions des journalistes, Emmanuel Macron annonce la suppression des "grands corps", tout en réaffirmant son attachement à un certain "élitisme républicain". Aucun mot sur la possible suppression de l'école nationale d'administration (ENA), qui figurait pourtant dans la version du discours qu'il s'apprêtait à prononcer le 15 avril, avant que ne démarre l'incendie de la cathédrale Notre-Dame.

Le président de la République se serait-il ravisé ? La question est posée par un journaliste lors de la conférence de presse, ce qui pousse Emmanuel Macron à s'exprimer clairement, en confirmant que l'ENA serait bien supprimée. Pas de "rafistolage" ou de réforme de l'existant, donc, mais la volonté de repartir sur de nouvelles bases pour s'assurer d'un changement effectif. "Si vous gardez les mêmes structures, les habitudes sont trop fortes", conclue le chef de l'Etat, comme en réponse aux critiques formulées ces derniers jours par un certain nombre de hauts fonctionnaires.

Vers une suppression des "grands corps"

Quelques détails supplémentaires s'ajoutent à l'annonce. Emmanuel Macron regrette que l'actuelle école des hauts fonctionnaires ne soit pas plus ouverte "au monde universitaire, à la recherche, à l'international", des éléments qui devraient baliser la future réforme. L'annonce de la suppression des "grands corps" que sont l'inspection générale des finances, la cour des comptes et le conseil d'Etat, demande à être précisée. Ce terme informel n'a en effet aucune valeur juridique, et désigne des institutions assez différentes (un corps d'inspection, une juridiction financière, une juridiction administrative) qui n'ont de commun que d'être les corps de sortie plébiscités par les énarques les mieux classés.

Ces administrations n'étant évidemment pas appelées à disparaître, on peut supposer que cette annonce se rapporte plutôt à la manière dont elles recrutent leurs membres. Dans son discours, Emmanuel Macron a plusieurs fois critiqué la "protection à vie" que conférait l'accès à un grand corps en sortie d'ENA, ainsi qu'à la possibilité ouverte à des hauts-fonctionnaires encore jeunes "d'accéder aux postes suprêmes et d'être garantis de ne jamais les quitter". On peut donc s'attendre à une refonte du système actuel de progression des carrières dans la haute fonction publique, critiqué pour le poids déterminant qu'y joue le classement de sortie à l'ENA.

>> Lire aussi : ENA : une suppression, et après ?

Au lieu d'arriver immédiatement en haut de l'échelle en cas de bons résultats, les futurs hauts fonctionnaires pourraient avoir à "faire leurs preuves", en débutant leur carrière par des postes plus proches du terrain. Les grands corps, quant à eux, seraient désormais accessibles en deuxième partie de carrière, par promotion interne. Une évolution jugée satisfaisante par ceux qui critiquaient le poids qu'avaient pris au sein de l'appareil administratif l'appartenance à ces "corps d'élite", mais qui pose la question de la manière de garantir un recrutement impartial.

Une mission pour Frédéric Thiriez, ancien patron de la LFP

Le président de la République a par ailleurs donné quelques détails sur la méthode. Il a annoncé qu'il confierait à Frédéric Thiriez, la mission de réfléchir à la réforme du recrutement, de la formation et de l'évolution des carrières dans la haute fonction publique. Passé par l'ENA et le Conseil d'Etat, M. Thiriez est également connu pour avoir présidé la Ligue de football professionnel (LFP).

En entérinant sa décision de supprimer la principale école de formation des hauts fonctionnaires, et de réformer en profondeur leur sélection, Emmanuel Macron ouvre un vaste chantier où les résistances pourraient être nombreuses. Les nombreuses tribunes et prises de position qui ont suivi la révélation de cette annonce la semaine dernière, souvent de la part de hauts fonctionnaires, ont montré que beaucoup au sein de l'Etat n'étaient pas encore prêts à une telle refonte.