Etat d'urgence : perquisitions, assignations, dissolutions... et risque chimique

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  691  mots
Défendant le projet de loi sur l'état d'urgence, le Premier ministre a dit "ne pas exclure" le risque d'utilisation par les terroristes "d'armes chimiques ou bactériologiques" .
L'Assemblée nationale a adopté le projet de loi prolongeant de trois mois l'état d'urgence. En défendant le texte, Manuel Valls n'a pas exclu le risque que les terroristes puissent recourir à des armes chimiques ou bactériologiques.

Sans tarder, l'Assemblée Nationale a adopté ce 19 novembre le projet de loi prolongeant de trois mois l'état d'urgence (551 voix « pour », 6 « contre » et 1 abstention). Le Sénat sera saisi demain vendredi 20 novembre. Outre le fait de prolonger jusqu'à fin février 2016 l'état d'urgence en France, le texte élargit les possibilités d'assignations à résidence, facilite les perquisitions (notamment nocturnes) et permet la dissolution d'associations « radicales ».

C'est Manuel Valls qui est venu défendre le texte devant les députés. Dans son discours, il a souligné que :

« Ce projet de loi, c'est la réponse d'une France forte, qui ne plie pas, et qui ne pliera jamais. C'est la réponse rapide d'une démocratie, face à la barbarie. C'est la réponse efficace du droit d'un pays libre, d'une démocratie, face à une idéologie du chaos ».

Valls évoque le risque chimique ou bactériologique

Étonnamment, Manuel Valls a fait monter la pression ambiante encore d'un cran en évoquant une « guerre nouvelle » et l'« imagination macabre » des commanditaires des attentats. Il dit « ne rien exclure (...). Je le dis bien sûr avec toutes les précautions qui s'imposent mais nous savons et nous l'avons à l'esprit. Il peut y avoir aussi le risque d'armes chimiques ou bactériologiques ».

D'ailleurs, le gouvernement a autorisé en urgence, dans un arrêté publié samedi dernier au Journal Officiel, la pharmacie des armées à distribuer un antidote aux armes bactériologiques à des services d'urgence civils en France...

Le Premier ministre a aussi pris position sur un sujet récurrent depuis plusieurs mois en demandant l'adoption du « Passenger Name Record » (PNR). « Il est plus que jamais temps que l'Europe adopte le texte sur le PNR afin de garantir la traçabilité des déplacements y compris à l'intérieur de l'Union. C'est une condition de notre sécurité collective ». Actuellement, ce texte bloque au Parlement européen

Création d'une structure pour "jeunes radicalisés"

Manuel Valls en a aussi profité pour annoncer la création d'une « structure pour jeunes radicalisés ». « Les financements sont prêts, le cadre juridique et le projet pédagogique en voie de finalisation. Le site sera choisi d'ici la fin de l'année », a-t-il expliqué. « Les premiers admis pourront être des repentis, que nous mettrons à l'épreuve afin de mesurer leur volonté de réinsertion dans la durée »,
En revanche, il est hors de question que les djihadistes français de retour de Syrie ou d'Irak se retrouvent dans ces structures. « Leur place est en prison. Un centre de déradicalistion ne peut pas être une alternative à l'enfermement carcéral. »

Bloquer des sites Internet

Par ailleurs, à la suite des débats, il a été décidé que les assignations à résidence pourront durer jusqu'à 12 heures par jour et certains assignés pourraient porter un bracelet électronique si les autorités le jugent nécessaire.
Un amendement a aussi été adopté pour permettre de bloquer certains sites internet. Il prévoit que le ministère de l'Intérieur puisse « prendre toute mesure pour assurer l'interruption de tout site Internet provoquant à la commission d'actes de terrorisme ou en faisant l'apologie ».

Port d'armes autorisé pour les policiers en dehors des heures de service

Par ailleurs, en marge de ce texte, Le directeur général de la police nationale, Jean-Marc Falcone, va adresser ce jeudi 19 novembre une note aux directions d'emploi de la police précisant que les policiers pourront désormais porter et utiliser leur arme hors service, durant l'état d'urgence, même sans gilet pare-balles. La nouvelle règle, effective en décembre, sera basée sur le volontariat, les policiers devront avoir un brassard de police sur eux pour éviter toute confusion en cas d'intervention.

Enfin, intervenant devant le Sénat, dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances 2016, le ministre des Finances, Michel Sapin a estimé que, au total, "la mobilisation de ces nouveaux moyens conduira à une dépense supplémentaire sur le budget de l'Etat de l'ordre de 600 millions d'euros en 2016". Sommes qui seront consacrées au recrutement de nouveaux fonctionnaires de police et gendarmerie et aux besoins en équipement qui les accompagnent.