Faut-il aller chercher la croissance dans les poubelles ?

Par Fabien Piliu  |   |  590  mots
En Allemagne, le taux de recyclage des vieux papiers s'élève à 76% contre 52% en France.
A quelques semaines de la Conférence sur le Climat (COP21), qui se tiendra à Paris du 30 novembre au 11 décembre, un rapport met en lumière les opportunités économiques du recyclage du papier.

C'est un objet quelconque, banal. Et pourtant, la poubelle pourrait se révéler être une mine d'or. Le rapport réalisé par Asteres pour le compte d'Ecofolio (une société à but non lucratif avec une délégation de service public pour le recyclage des papiers), démontre comment le fait de trier et de donner une nouvelle vie aux vieux journaux, aux feuilles imprimées pourraient permettre de créer de la richesse tout en redonnant de nouvelles perspectives à une industrie papetière en difficulté.

Recyclage: la France très en retard sur ses voisins européens

"Chaque année, ce sont 56 kilos de papiers qui sont jetés à la poubelle. Mais seul un papier sur deux est recyclé. Le gâchis est énorme ", observe Géraldine Poivert, la directrice générale d'Ecofolio.

A titre de comparaison, quand le taux de recyclage atteint 52% en France, il s'élève à 58% en Belgique, 65% en Espagne, 70 % au Royaume-Uni et culmine à 76% en Allemagne où l'on a pris depuis longtemps conscience que ces déchets étaient des ressources. Où l'on a également compris que l'on ne se payait pas seulement de mots en évoquant l'économie circulaire.

Un potentiel de 2 millions d'emplois en Europe, 300.000 en France

Globalement, la situation n'est pas bonne et c'est regrettable. Selon la Commission européenne, le potentiel de création nette d'emplois liés au développement de cette économie au sein de l'Union européenne est de 2 millions à l'horizon 2030.

" Une extrapolation de ce chiffre à la France conduit à un potentiel de 300.000 emplois supplémentaires ", indique le rapport d'Ecofolio.

A qui la faute ?

Qui est fautif ? Les citoyens ? Les entreprises ? L'administration, dont le goût pour la paperasserie n'est pas à démontrer ?

"ll faut bien admettre qu'il n'y a pas vraiment de prise de conscience de l'utilité de recycler les papiers, bien que le bois devienne une matière première rare", constate Nicolas Bouzou chez Asteres.

Les écologistes n'ont pas sérieusement organisé la filière de tri

Mais c'est surtout l'Etat et ses ministres de l'Ecologie successifs qui, pour n'avoir pas eu de vision stratégique pour ce secteur, doivent être blâmés.

En effet, à quoi servirait-il de trier systématiquement les vieux papiers si la filière n'a pas été organisée ? C'est la raison pour laquelle plus de 2 millions de tonnes de vieux papiers et cartons collectés et triés ne sont pas absorbées par l'industrie papetière nationale - qui n'a pas su adapter ses processus de production au recyclage. Deux millions de tonnes que l'on doit exporter chez nos voisins pour qu'ils les recyclent.

A quelques semaines de la Conférence sur le Climat (COP21) qui se tiendra à Paris du 30 novembre au 11 décembre, Ecofolio espère, avec les 10 propositions contenues dans son rapport intitulé "0 déchet, 100% croissance", susciter l'enthousiasme ou du moins l'adhésion du ministère de l'Ecologie et du ministère de l'Economie sur cette question.

Actionner le levier de la commande publique

Quelles sont ces propositions ? Citons notamment les souhaits

  • d'organiser de façon optimale le marché de la reprise des vieux déchet;
  • d'actionner le levier de commande publique - selon le rapport, à l'heure actuelle, aucun manuel scolaire ne serait imprimé avec du papier recyclé ;
  • de financer les investissements dans ce domaine en y affectant les nouvelles recettes issues de l'augmentation de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP);
  • et enfin, la création de clusters intersectoriels à l'échelle régionale pour créer des synergies et attirer les investissements.