Fin des contrats aidés : quel impact sur l'emploi ?

Par Grégoire Normand  |   |  753  mots
Pour lutter contre le chômage des moins qualifiés, le gouvernement prévoit un plan d'investissement compétences.
La décision du gouvernement Philippe de diminuer les contrats aidés a suscité une vive polémique à droite comme à gauche sur les bancs de l'Assemblée. Pour évaluer l'impact d'une telle mesure sur l'emploi, l'OFCE vient de rendre publique une évaluation relativement critique sur la baisse programmée de ce dispositif.

Le débat sur les contrats aidés risque d'être relancé. La ministre du Travail Muriel Pénicaud avait clairement critiqué ces types de contrat dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale au début du mois d'août dernier.

"Les études de la Dares, l'OCDE, comme celles de la Cour des comptes, montrent trois choses. Premièrement, les contrats aidés sont extrêmement coûteux pour la nation. Deuxièmement, ils ne sont pas efficaces dans la lutte contre le chômage. Troisièmement, ils ne sont pas un tremplin pour l'insertion professionnelle."

Alors que le gouvernement ne cesse de remettre en cause l'efficacité des emplois d'avenir et des emplois aidés pour enrayer le chômage chez les jeunes, l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) vient de publier un billet de blog sur les conséquences possibles de la baisse progressive des contrats aidés sur l'emploi total.

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Un impact important à court terme

Selon l'économiste Bruno Ducoudré, la diminution des contrats aidés entre la fin 2017 et la fin 2019 conduirait à réduire le nombre d'emplois à 86.000. Cet effet s'explique selon le spécialiste par le faible effet d'aubaine des contrats aidés non-marchands contrairement au secteur marchand. Dans une étude publiée au printemps dernier, le service de statistiques du ministère du Travail (Dares) avait étudié les effets des aides sur la décision de recruter. Il apparaît que dans le secteur marchand, l'effet d'aubaine ("c'est-à-dire qu'en l'absence d'aide, l'embauche aurait eu lieu au même moment et avec la même personne") est bien plus marquée dans l'ensemble du secteur marchand que dans le secteur non-marchand.

Une baisse partiellement compensée

Cette diminution devrait être en partie compensée par la montée en puissance d'autres dispositifs. Le gouvernement veut notamment mettre l'accent sur l'apprentissage et l'alternance pour tenter de résorber le chômage des jeunes. Mais pour l'organisme indépendant, les plans du gouvernement auraient un effet très limité sur l'emploi.

"Concernant l'alternance, en attendant la réforme à venir, le gouvernement a fixé pour 2018 un objectif de hausse de 2% du nombre d'entrées en apprentissage et nous avons retenu une hypothèse de stabilisation du stock de contrats de professionnalisation en prévision. L'effet sur l'emploi serait négligeable en prévision (+2.000 emplois cumulés entre 2017 et 2019)."

Par ailleurs, l'auteur de la note souligne que la fin de cotisation chômage sur les embauches des jeunes en CDI à compter du premier octobre dernier et la suppression du contrat de génération dès 2018 pourrait encore faire augmenter le chômage chez les jeunes.

A l'inverse, la montée en puissance des formations et de la Garantie jeunes, ainsi que la mise en place du Plan d'investissement compétences pourraient contribuer positivement à l'emploi en 2018-2019. Cette hausse est estimée à 54.000 emplois supplémentaires mais cela ne devrait pas suffire à compenser la baisse progressive des emplois aidés. Au final "les politiques de l'emploi, via les contrats aidés et les autres dispositifs d'emplois aidés, contribueraient négativement à l'évolution de l'emploi total pour -98.000 emplois sur la période 2017-2019".

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En conclusion, l'OFCE reste relativement pessimiste sur les politiques de l'emploi prévues par l'actuel gouvernement.

"La nouvelle orientation des politiques de l'emploi devrait donc avoir un effet négatif à court terme sur l'emploi total, l'effet négatif de la forte baisse des contrats aidés entre le deuxième semestre 2017 et la fin d'année 2018 n'étant que partiellement compensé par la montée en charge progressive de Plan d'investissement compétences."

Une baisse drastique des contrats aidés à prévoir

A la fin de l'année 2016, les contrats aidés ont bénéficié à 402.500 personnes, soit une une baisse de 8% par rapport à 2015. Cette diminution est particulièrement visible dans le secteur marchand. Le nombre de bénéficiaires est en baisse de 26,8 % par rapport à 2015. Pour le secteur non-marchand, la baisse est plus modérée (-3%). Le nombre de bénéficiaires est passé de 347.000 à 341.000.

Les effectifs de contrats aidés devraient baisser drastiquement fin 2017 et au-delà, le gouvernement d'Edouard Philippe ayant réduit les prescriptions à 310.000 nouveaux contrats cette année, puis 200.000 en 2018. Le gouvernement compte créer un nouveau type de contrat aidé, avec "plus d'accompagnement et plus de formation", sur la base d'un rapport qui sera rendu en fin d'année.