Fiscalité de production : les élus locaux tempêtent déjà contre Bercy

Par César Armand  |   |  546  mots
(Crédits : Philippe Wojazer)
Dans ses vœux aux acteurs économiques, Bruno Le Maire a annoncé une baisse des impôts de production en 2021, à rebours de précédentes déclarations du Premier ministre. Les collectivités territoriales demandent "un diagnostic commun" avant toute décision, mais l'information a dû ravir le Medef qui a toujours demandé leur suppression.

Dans le bataille du maintien des impôts de production, le Conseil d'analyse économique (CAE) aurait-t-il gagné ? Le centre de recherches rattaché aux services du Premier ministre préconisait, en juin dernier, de supprimer la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), calculée sur le chiffre d'affaires des entreprises.

Ajoutez la C3S à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et à la cotisation foncière des entreprises (CFE), ces trois prélèvements représentent 24,3 milliards d'euros recettes pour les finances publiques. D'après l'Insee, les impôts sur la production englobent en effet tous les impôts payés "indépendamment de la quantité ou de la valeur des biens et des services produits ou vendus".

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Évoquant le "pacte productif" du président Macron lors de ses vœux aux acteurs économiques ce 7 janvier, le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire a en effet annoncé "la baisse des impôts de production, suivant une trajectoire qui devrait démarrer en 2021".

Vers une concertation avec les collectivités ?

Une déclaration à rebours de celle du locataire de Matignon. En mai 2018, Edouard Philippe avait écarté toute baisse d'impôt de production pour les entreprises avant 2020 en évoquant "un environnement contraint" au niveau budgétaire et la nécessité d'une concertation avec les collectivités territoriales.

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 A l'occasion d'un point presse ce 8 janvier 2020, ces dernières ont d'ailleurs demandé un "diagnostic commun" avant toute prise de décision du gouvernement. Selon le premier vice-président (LR) de l'Assemblée des communautés de France (AdCF), Charles-Eric Lemaignen, la fiscalité de production représente 70 à 75 milliards d'euros par an, dont 26,5 milliards fléchés vers les territoires sur un total de 88 milliards d'euros de recettes annuelles.

"De quoi parle-t-on ? Qu'on parle de la même chose avant de comparer ! On arrive à dire des conneries énormes !", s'est énervé Charles-Eric Lemaignen. "Quels sont les facteurs qui ont conduit à la désindustrialisation du pays ? C'est quelque chose sur laquelle on travaille avec le Medef depuis un an. Regardons ce qui est véritablement lié si l'on veut partager un diagnostic commun."

Une information qui doit ravir le Medef

Autant dire qu'entre la baisse de la fiscalité sur la production annoncée pour l'année prochaine et la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales déjà en vigueur, dont les intercommunalités percevaient 30% des recettes, les territoires se méfient d'une telle nouvelle de Bercy.

En revanche, l'information doit ravir le Medef, et en particulier, son président délégué Patrick Martin qui a toujours plaidé pour la suppression de cet impôt :

"Pour augmenter le taux de marge, le levier le plus évident, c'est la réduction, voire la suppression des impôts de production", déclarait ainsi en mars 2018 à La Tribune Patrick Martin, président du Medef Auvergne Rhône-Alpes et candidat à la succession de Pierre Gattaz. "Emmanuel Macron a fait campagne contre les rentes : l'impôt de production, c'est la rente absolue. Cela a un impact direct sur les coûts de production. C'est donc un impôt antiéconomique."