François Hollande peut-il encore réussir à relancer l'économie française ?

Par Fabien Piliu  |   |  941  mots
Depuis son élection à la tête de l'État, l'économie française est en panne.
[ SÉRIE : Horizon 2017 pour Hollande 2/9 ] « Le changement c'est maintenant ! » Que reste-t-il de la promesse de 2012 ? Si le jugement des Français à l'égard de François Hollande reste sévère, à vingt mois de la prochaine élection présidentielle du printemps 2017, la cote du président de la République semble s'être stabilisée, à un étiage bas. Aujourd'hui, Hollande peut-il relancer l'économie française ?

Depuis 2012, le chef de l'État attend désespérément le retour de la croissance. La reprise interviendra-t-elle avant la fin du quinquennat ? C'est son voeu le plus cher, car, sans croissance, toute baisse du nombre de demandeurs d'emploi est exclue. Sachant que la baisse du chômage conditionne son avenir politique - du moins en 2017 - François Hollande a le regard vissé sur les prévisions de croissance réalisées par l'Insee.

Pour l'instant, ses espoirs ont été déçus. Très largement. Depuis son élection à la tête de l'État, l'économie française est en panne. Après avoir promis, comme la plupart de ses concurrents, que sa politique économique rendrait automatique le retour de la croissance lors de la campagne électorale, le président de la République a dû se rendre à l'évidence : les effets de la crise de 2008-2009, qui fut la plus grave subie par la France depuis la fin de la seconde guerre mondiale, n'étaient pas effacés en 2012. Ils ne le sont toujours pas d'ailleurs, en témoigne le niveau toujours très élevé des défaillances d'entreprises. Selon la Banque de France, 63.200 entreprises étaient en difficulté fin juin et sur les douze derniers mois cumulés. C'est-à-dire qu'elles étaient soit en redressement judiciaire, soit en liquidation judiciaire, soit en procédure de sauvegarde. Si le rythme des défaillances se poursuit, le record observé en 2014 pourrait être battu. L'année dernière, la Banque de France avait recensé 63.400 défaillances d'entreprises.

Cette erreur de diagnostic, qui a considérablement nui à la crédibilité de la stratégie économique de l'exécutif, les Français ne l'ont pas vraiment pardonnée. Ce n'est peut-être pas le plus grave. Admise un an après son élection, cette évaluation erronée de l'état de santé de la France a conduit le gouvernement à faire des erreurs importantes de politique économique. La plus grave fut probablement d'avoir augmenté de plus de 31 milliards d'euros le montant des prélèvements obligatoires pesant sur les entreprises dès la première année du quinquennat. Les effets sur un tissu de PME exsangues après la crise ont été d'autant plus dévastateurs que les entreprises étaient alors confrontées à un ralentissement très net de la conjoncture nationale. La France ne comptant que 120.000 entreprises internationalisées, trois fois moins que l'Allemagne, il était exclu que l'exportation soit une planche de salut.

Aucune prise sur les facteurs exogènes

Résultat, après avoir stagné en 2012, le PIB n'a augmenté que de 0,7 % en 2013 puis de 0,2 % en 2014. À moins d'une mauvaise surprise, le 1 % de croissance visé par le gouvernement devrait être atteint, ce qui permet au gouvernement d'estimer qu'une reprise est en cours. En revanche, compte tenu des incertitudes pesant sur l'économie mondiale, les prévisions de croissance formulées pour 2016 et 2 017 pourraient paraître optimistes. Certes, le ministère des Finances a révisé à la baisse ses objectifs et ne table plus que sur une hausse du PIB de 1,5 % en 2016 et en 2017, après avoir initialement visé des progressions de 1,7 % et de 1,9 %. Mais après la panne de croissance observée au deuxième trimestre, la reprise semble fragile car elle ne repose que sur des facteurs exogènes sur lesquels, par définition, le gouvernement n'a aucune prise.

C'est d'ailleurs cette « dépendance » à ces éléments conjoncturels qui est probablement la plus grave. François Hollande et son gouvernement n'ont pas réussi à modifier le modèle de croissance tricolore. Essentiellement alimentée par la baisse des prix de l'énergie, entamée au début du second semestre 2014, la consommation des ménages est le seul moteur encore un peu vaillant de la croissance. Selon les calculs de COE-Rexecode, la chute des cours du brut allégerait de 16 milliards d'euros la facture des importations énergétiques, ce qui représente 0,5 point d'inflation en moins pour les ménages et près de 8 milliards de marges pour les entreprises sur l'année 2015.

Malgré un accès facile au crédit, que permet la politique monétaire volontariste de la Banque centrale européenne, et le dispositif de suramortissement lancé en avril, la reprise de l'investissement est très poussive. C'est notamment le cas dans l'industrie manufacturière, contrainte par la quasi-atonie de la demande. Quant au commerce extérieur, on l'a vu, la faiblesse des forces en présence empêche le made in France de décoller enfin. Le déficit commercial devrait se maintenir à des sommets et avoisiner les 60 milliards d'euros cette année en dépit de la dépréciation de l'euro face au dollar qui augmente la compétitivité-prix du made in France hors de la zone euro. Faut-il rappeler que la balance commerciale de la France n'a pas été excédentaire depuis... 2003 ?

Dans ce contexte incertain, il ne faudrait pas que les prix des matières premières, et notamment du pétrole brut, remontent, que l'euro s'apprécie face au dollar ou que les taux d'intérêt décollent. Si tel était le cas, les espoirs d'une reprise seraient douchés. L'hypothèse de croissance du gouvernement fixée à 1,5% serait alors menacée et le retournement de la courbe du chômage, prévu en 2016, resterait dans les limbes. Certains économistes ont d'ores et déjà remis en cause la prévision du gouvernement. Ainsi, chez Moody's, c'est une progression de 1,2% du PIB qui est attendue en 2016.

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