Inflation : la hausse des prix alimentaires ralentit, industriels et distributeurs convoqués à Bercy

Par latribune.fr  |   |  989  mots
Selon l'Insee, les prix dans l'alimentaire étaient en juillet 12,7% plus élevés qu'un an plus tôt. (Crédits : Reuters)
Selon l'Insee, les prix dans l'alimentaire étaient en juillet 12,7% plus élevés qu'un an plus tôt, soit un léger ralentissement par rapport à juin (+13,7%). De facto, l'addition reste encore très douloureuse pour les ménages. Résultat, si les industriels et les distributeurs s'étaient engagés à faire des efforts avant l'été, ils sont à nouveau reçus à Bercy cette semaine.

Industriels et distributeurs vont-ils se faire taper sur les doigts ? Quelques mois après la promesse du gouvernement d'une « baisse visible des prix » alimentaires à la rentrée, l'addition reste douloureuse pour les consommateurs. Résultat, les acteurs du secteur sont, à nouveau, convoqués à Bercy cette semaine.

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« Je réunirai industriels et distributeurs avec Olivia Grégoire cette semaine pour leur demander de prolonger leurs opérations, qui ont fonctionné », a ainsi confirmé Bruno Le Maire, ministre de l'Economie, ce lundi 28 août, au micro de France Inter.

Les prix alimentaires encore élevés

Son cabinet a précisé que les distributeurs ont rendez-vous mercredi matin au ministère de l'Economie, les industriels jeudi. Le gouvernement prévoit de demander d'« élargir à un plus grand nombre de produits » les opérations promotionnelles. L'exécutif espère surtout convaincre davantage d'industriels de s'engager sur une « baisse des prix ». Dans le cas contraire, « on entre dans la période du budget », attendu fin septembre, « nous avons des instruments à notre disposition pour que chacun joue le jeu », a averti le ministre de l'Economie.

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En avril, la ministre déléguée au Commerce, Olivia Grégoire, avait assuré qu'« à la rentrée nous aurons une baisse visible des prix dans les rayons » alimentaires. Le constat dressé par le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, se révèle plus nuancé. « J'avais indiqué que l'inflation commencerait à ralentir à l'été 2023. Nous y sommes », a-t-il assuré en fin de semaine dernière.

Selon l'Insee, les prix dans l'alimentaire étaient en juillet 12,7% plus élevés qu'un an plus tôt, soit un léger ralentissement par rapport à juin (+13,7%). Une réduction du niveau d'inflation ne correspond toutefois pas à une baisse de prix dans les rayons, mais à une hausse moins rapide. En outre, les prix avaient déjà commencé à grimper il y a un an, dans la foulée de l'invasion russe de l'Ukraine. Au total sur deux ans, l'inflation dans les grandes surfaces est supérieure à 21%, rappelait récemment le média spécialisé LSA associé au panéliste Circana.

« Les prix ne reviendront pas au niveau d'avant crise »

« L'inflation sera durable, et c'est un paramètre nouveau qu'il va falloir prendre en compte », a observé Dominique Schelcher, PDG du 4e acteur de la distribution française, Système U, dans une tribune publiée lundi sur LinkedIn. « Oui le pic de l'inflation est derrière nous, mais (...) les prix ne reviendront pas au niveau d'avant crise ».

Jouer sur l'inflation serait « suicidaire » ou « complètement imbécile » de la part des industriels de l'agroalimentaire, a estimé samedi leur représentant Jean-Philippe André, président de l'Ania. « L'inflation est un poison lent pour le pouvoir d'achat des ménages, mais c'est également un poison pour le pouvoir d'achat des entreprises », a-t-il souligné au micro de France Inter.

« Il faudrait être suicidaire ou complètement imbécile de jouer sur l'inflation pour gérer les entreprises du secteur agroalimentaire. Ce n'est absolument pas ça » qui se passe, a-t-il affirmé.

Même s'il reconnaît que la baisse des volumes « n'arrange pas du tout » les industriels, le patron de la principale organisation représentative des entreprises de transformation alimentaire (hors coopératives) réfute toute compensation par des hausses de prix non justifiées pour conserver ou augmenter leur rentabilité. Les prix « sont alignés sur les cours mondiaux des matières premières dont certains sont en baisse mais où d'autres continuent à monter », a-t-il souligné citant l'exemple du sucre, du café ou du porc.

Des efforts modestes

Fin avril, Olivia Grégoire espérait que les prix pourraient baisser à l'issue de renégociations entre distributeurs et industriels agroalimentaires. Chaque année, les supermarchés et leurs fournisseurs de l'agro-industrie négocient de décembre jusqu'au 1er mars les conditions de vente d'une large partie des produits vendus tout le reste de l'année en grandes surfaces.

Lors du dernier épisode conclu en mars dernier, le prix moyen payé par les supermarchés aux industriels s'est apprécié de 9%. Mais le prix d'un certain nombre de matières premières a décru depuis. Le gouvernement a donc appelé les différentes parties à se remettre autour de la table des négociations.

« Très peu d'industriels ont joué le jeu, quasiment aucun n'a voulu renégocier et 15 à 20 d'entre eux ont consenti des baisses de prix temporaires sur un nombre limité de produits, ce qui est très clairement insuffisant », a estimé lundi auprès de l'AFP Jacques Creyssel, délégué général de l'organisation patronale représentant le secteur, la FCD.

Les industriels expliquaient pourtant avant l'été s'être engagés à un « effort », généralement sous forme de promotions temporaires, sur le prix d'« à peu près 1.000 produits » de grandes marques, comme Coca-Cola par exemple. Dans le cas du célèbre soda, des remises de 10% sont accordées depuis le 1er août et pour trois mois, mais uniquement sur certaines références, sans sucres et en grandes bouteilles.

Le nombre de produits concernés est en outre à mettre en regard avec le nombre de références en magasins : 3.000 à 5.000 dans un supermarché, et entre 20.000 et 35.000 dans les hypermarchés. Avant les industriels, les supermarchés s'étaient de leur côté engagés mi-mars, dans le cadre d'une opération commerciale peu contraignante nommée « trimestre anti-inflation » - depuis prolongée -, à vendre une sélection de produits laissée à leur discrétion, au « prix le plus bas possible ».

(Avec AFP)