L'affaire Bygmalion : un vrai risque pour Sarkozy d'ici la primaire ?

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  719  mots
Malgré la demande du parquet de l'envoyer en correctionnelle dans le cadre de l'affaire "Bygmalion comptes de campagne 2012", Nicaols Sarkozy garde ses chances pour la primaire de droite car le noyeau dur de ses militants lui reste entiètrement acquis.
Le parquet requiert le renvoi de Nicolas Sarkozy en correctionnelle dans le cadre de l'affaire des dépassements des frais de campagne électorale de 2012. Mais un procès est encore loin d'être acquis et l'ex chef de l'Etat peut toujours compter sur son noyau dur de militants dans la campagne de la primaire... même s'il risque de perdre quelques plumes.

Les déboires judiciaires continuent pour Nicolas Sarkozy. Déjà mis en examen dans l'affaire dite des "écoutes" - il avait tenté de se soustraire à une mise sur écoute, destinée à savoir s'il avait cherché à obtenir des informations d'un magistrat de la Cour de cassation dans le cadre de l'affaire Bettencourt - le voilà donc maintenant rattrapé dans l'affaire du dépassement de ses frais de campagne, elle-même issue de l'affaire Bygmalion.... Le parquet de Paris a en effet demandé le 30 août le renvoi en correctionnelle de l'ancien président de la République.

Concrètement, Nicolas Sarkozy est soupçonné de financement illégal de sa campagne électorale de 2012. La fameuse agence de communication Bygmalion aurait émis de fausses factures à régler par l'UMP - parti devenu depuis "Les Républicains"- pour masquer le dépassement des comptes de campagne du candidat Sarkozy. Pour le parquet, Nicolas Sarkozy est suspecté d'avoir "omis de respecter les formalités d'établissement du compte de campagne" et d'avoir "fait état, dans le compte de campagne ou dans ses annexes, d'éléments comptables sciemment minorés".

Pas d'empêchement immédiat pour Sarkozy

Bien entendu, la question se pose de savoir si ces réquisitions du parquet vont gêner Nicolas Sarkozy dans son opération "reconquête" de l'Elysée, et, notamment si elles vont modifier le cours de la primaire de la droite à laquelle participe l'ancien chef de l'Etat.

Juridiquement parlant, les juges d'instruction peuvent rendre leur ordonnance décidant d'un renvoi ou non en correctionnelle de Nicolas Sarkozy, après un délai minimum d'un mois, soit le 30 septembre prochain. Mais ils peuvent, s'ils le souhaitent, prendre davantage de temps. Étant entendu que le parquet peut aussi faire appel de l'ordonnance des juges d'instruction. Bref, il y a un risque d'enlisement juridique.

Nicolas Sarkozy conserve donc toute latitude pour participer à la primaire dont le premier tour aura lieu le 20 novembre et le second le 27 novembre. Et si jamais il en sortait vainqueur, il n'est pas certain du tout que l'instruction aboutisse avant le premier tour de l'élection présidentielle le 23 avril 2017 au regard du calendrier surchargé des tribunaux. Et si jamais, Nicolas Sarkozy était réélu président de la République le 7 mai, il bénéficierait alors de l'immunité présidentielle car le projet de loi constitutionnelle mettant fin à cette immunité, souhaité par François Hollande, déposé en 2013, n'a toujours pas été examiné par le Parlement.

Sur le terrain politique, pour l'instant, les autres candidats à la primaire se gardent bien de tout commentaire. C'est le silence radio sur les tracas de Nicolas Sarkozy. Il faut dire - hasard ? - que François Fillon avait largement anticipé en lançant dès le 28 août : "Qui imagine un seul instant le général de Gaulle mis en examen ? ". François Fillon disposait-il d'informations ? En revanche, dans le camp Sarkozy, on hurle au complot politique. Eric Ciotti dénonce ainsi "à l'heure où débute le procès Jérôme Cahuzac... une concordance des temps qui ne peut pas relever du hasard".

Les électeurs de la primaire vont-ils se détourner de Sarkozy?

Mais les nouveaux soucis judiciaires de Nicolas Sarkozy le gêneront ils dans la campagne des primaires ? Oui... et non.

Comme l'explique à La Tribune un cacique du parti « Les Républicains » :

« Ce qui arrive à Sarkozy ne change pas grand-chose pour le noyau dur des militants du parti qui continuera à lui être totalement acquis. Grosso modo Sarkozy peut donc continuer de compter sur 35% des voix au premier tour. En revanche, pour le second tour, sans doute face à Juppé, ce renvoi en correctionnelle va lui barrer certains ralliements. De nombreux votants, pas sarkomiaques, mais qui étaient prêts à voter pour lui, ne le feront pas. Reste à connaître l'importance de ce phénomène, il faut attendre les prochains sondages ».

Dans les semaines qui viennent, Nicolas Sarkozy va certainement tenter de transformer ce nouvel handicap en argument en sa faveur. Il va se dire la victime de la "justice aux mains du pouvoir socialiste". Quant à ses concurrents pour la primaire, il vont certainement avoir du mal à retenir leurs coups. On entend déjà d'ici leurs discours sur la nécessaire probité du futur représentant de la droite à la présidentielle.