L'économie française reste à la traîne de la zone euro

Par Fabien Piliu  |   |  986  mots
En dépit d'un retour de la confiance des ménages et des chefs d'entreprises, Emmanuel Macron, le président de la République voit l'économie française empêtrée dans la croissance molle.
Une série de statistiques témoigne de la mollesse de la reprise en cours. La Banque de France, qui a légèrement relevé ses prévisions de croissance, rappelle que la France redémarre moins vite que ses voisins européens.

Tout au long du quinquennat de François Hollande, ou presque, les experts ont expliqué qu'une reprise franche de l'économie française était impossible tant que la confiance des agents économiques, c'est-à-dire les ménages et des chefs d'entreprises, serait absente.

Or, la confiance est de retour, et ce, depuis le début de l'année. C'est-à-dire bien avant l'élection présidentielle. Comme avant chaque élection majeure, les Français espèrent des lendemains qui chantent. La victoire d'Emmanuel Macron est venue confirmer cette remontée des indicateurs de confiance, même si rien n'indique que celle-ci est une tendance lourde. Il faudra attendre l'accueil réservé aux premières réformes, et en particulier celle qui porte sur le marché du travail, pour se prononcer sur ce point.

Les espoirs d'une reprise franche, qui permettrait de résoudre le chômage de masse (quelque 6 millions de personnes sont inscrites à Pôle emploi) sont donc fondés.

Un peu de patience

Mais il faudra patienter un peu. Le gouvernement vient à peine d'être formé. Il ne sait pas encore sur quelle majorité s'appuyer. S'il en a une...

En attendant que la politique économique promise par le candidat Macron se mette en place, les statistiques économiques font du yo-yo. La reprise est palpable mais reste très molle. Et surtout très fragile.

Selon l'Insee, la production industrielle a reculé de 0,5% en avril après avoir signé un rebond de 2,2% en mars. Sur la même période, la production manufacturière s'est repliée de 1,2%, soit 1,6 point de moins qu'en mars.... Sur un an, la production industrielle des trois derniers mois ressort en hausse de 0,8%, et celle de l'industrie manufacturière progresse de 1,6%.

Le commerce extérieur ? Il reste dans le rouge. En avril, le déficit s'est creusé de 760 millions d'euros pour atteindre 5,5 milliards d'euros selon les Douanes. Il s'était élevé à 5,4 milliards le mois précédent.

Le déficit budgétaire ? En avril, toujours, il s'est légèrement creusé par rapport à son niveau un an plus tôt pour atteindre 57,9 milliards d'euros, contre 56,5 milliards fin avril 2016. Heureusement, la consommation des ménages, le principal moteur de l'économie, est repartie à la hausse en avril.

Le commerce international tire la croissance française

Au regard de ces statistiques, la prudence devrait être de mise. Pourtant, la Banque de France, qui révise chaque mois ou presque ses prévisions de croissance, estime que l'activité pourrait être plus forte que prévue. Vendredi, dans ses prévisions macroéconomiques semestrielles, elle a relevé ses prévisions de croissance pour la France de 2017 à 2019, en raison principalement de " l'embellie de l'environnement international ", qui devrait stimuler la demande extérieure et favoriser un rebond des exportations. Précisément, la banque centrale française indique anticiper une hausse du PIB de 1,4% en 2017, avant une légère accélération à 1,6% en 2018 et en 2019.

Jusqu'ici, elle prévoyait une hausse de 1,3% cette année, de 1,4% pour 2018 et de 1,5% pour 2019. Au vu des derniers indicateurs disponibles, le chiffre pour 2017 pourrait même être "un peu plus" élevé que 1,4%, souligne l'institution monétaire.

"La croissance française est en amélioration. Nous n'avions pas connu de croissance aussi forte sur les cinq dernières années", a déclaré François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France sur Radio Classique.

Il a toutefois mis en garde contre toute euphorie, rappelant que l'économie hexagonale restait à la traîne de la zone euro qui, selon la Banque centrale européenne (BCE) devrait afficher une croissance moyenne de 1,9% cette année.

Entre la France et le reste de la zone, "il y a un demi-point de croissance d'écart, ce qui situe le potentiel de rattrapage", a relevé le gouverneur, en insistant une fois de plus sur la nécessité de mettre en oeuvre des réformes pour réduire plus fortement le chômage.

Une faible contribution à la croissance de la zone euro

Eric Dor, le directeur des Etudes Economiques à l'IESEG School of Management de l'
Université Catholique de Lille explique les raisons de retard. "Juste après la Grèce, c'est en France que la croissance annuelle du PIB au 1er trimestre 2017, par rapport au même trimestre de l'année précédente, a été la moins élevée. Plutôt qu'un accident propre à ce trimestre particulier, c'est un phénomène structurel. On retrouve en effet ce résultat en comparant les taux de croissance en année glissante, donc la croissance annuelle du PIB cumulé sur les périodes du 2ème trimestre 2016 au premier trimestre 2017, par rapport au PIB cumulé sur les périodes précédentes du 2ème trimestre 2015 au 1er trimestre 2016. L'Espagne, le Portugal, les Pays Bas, la Finlande, la Slovénie et les pays baltes ont une contribution à la croissance de la zone euro qui est très supérieure à leur poids économique relatif. Par contre, la France et l'Italie ont une contribution à la croissance de la zone euro qui est très inférieure à leur poids économique relatif ", explique l'économiste.

Et de poursuivre  : " Le PIB de la France représente 21,1% de celui de la zone euro. Toutefois, la France n'a apporté que 11,4% de l'augmentation du PIB de la zone euro entre le premier trimestre 2016 et le premier trimestre 2017 ".

Pendant ce temps-là, en Allemagne

L'Allemagne, notre principal partenaire et concurrent est dans une situation plus enviable. Ce vendredi, la Bundesbank a relevé ses prévisions de croissance pour l'Allemagne jusqu'à 2019, tablant notamment sur une hausse de 1,9% du PIB cette année, contre 1,8% jusqu'alors.

"La reprise solide de l'économie allemande se poursuit", estime l'institution dans son rapport de juin. Pour 2018 et 2019, la Bundesbank s'attend à voir la première économie européenne croître de 1,7% et 1,6% respectivement, contre 1,6% et 1,5% de croissance escomptés jusqu'à présent.

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