L'industrie sort de sa torpeur, mais ne crée toujours pas d'emplois

Par Fabien Piliu  |   |  873  mots
Selon l'Insee, la fabrication de matériel de transport est la principale contributrice à la croissance en volume de l'industrie manufacturière, à moitié pour la valeur ajoutée et aux neuf dixièmes pour la production.
Selon l'Insee, la production manufacturière en volume n'a progressé que de 0,8% en 2016. C'est moins qu'en 2015 (+2%) et qu'en 2014 (+ 1,6%). le nombre d'emplois a reculé.

Progressivement, péniblement, l'industrie française sort la tête de l'eau. Selon une étude de l'Insee, la valeur ajoutée de la branche de l'industrie manufacturière a augmenté de 1,5 % en volume en 2016. C'est 0,4 point de plus qu'en 2015.

Fait encourageant, elle progresse pour la quatrième année consécutive. "Ceci ne s'était plus produit depuis la période 2003-2007", indique l'Institut.

Signe que l'industrie peine encore à renouer véritablement avec la croissance, la production manufacturière en volume a nettement décéléré l'année dernière, affichant une hausse de seulement 0,8%. C'est moins qu'en 2015 (+2%) et qu'en 2014 (+ 1,6%).

L'industrie des transports en haut de l'affiche

Une activité a particulièrement tiré son épingle du jeu : la fabrication de matériel de transport. Selon les calculs de l'Insee, "elle est la principale contributrice à la croissance en volume de l'industrie manufacturière, à moitié pour la valeur ajoutée et aux neuf dixièmes pour la production". Plusieurs facteurs ont dynamisé l'activité de cette branche. L'Insee cite d'abord la hausse des ventes de voitures neuves, qui a profité en partie aux constructeurs français, dont les modèles représentent près d'une vente sur deux en France. Quant à la production de matériel aéronautique, elle a continué de croître, grâce à un niveau historique des carnets de commandes, équivalent de cinq années de production. "La hausse est cependant moins soutenue que les années précédentes, certains fournisseurs ne parvenant pas à suivre la cadence imposée par les avionneurs", constate l'Insee, indiquant que cette branche profitait toujours de la croissance de l'aviation de ligne ainsi que d'un rebond dans le domaine de la défense.

De son côté, la construction navale française fut également dynamique, "ayant misé sur le militaire et le haut de gamme en matière civile, dans un contexte d'effondrement au niveau mondial de l'activité dans le domaine civil ", précise l'étude. "Au total, au sein de la fabrication de matériel de transport, seule la fabrication de matériel ferroviaire semble rencontrer quelques difficultés, se traduisant par une baisse de la production", conclut l'Insee.

Un effet indirect sur deux autres secteurs

Par ricochet, cette vigueur de la fabrication de matériel de transport a bénéficié à deux autres branches manufacturières qui contribuent à son processus de production : la chimie et la fabrication d'équipements électriques, électroniques, informatiques et de machines. "Ces deux branches tirent également parti de l'amélioration du marché de la construction et de la fermeté de la consommation des ménages en équipements du logement et en produits de beauté", observe l'Insee. Une consommation des ménages, et plus globalement une demande intérieure qui, par leur dynamisme en 2016, ont tiré la demande de produits manufacturés.

Le commerce extérieur en berne

Si la demande intérieure a été tonique, les exportations ont souffert. En 2016, lcroissance en volume des exportations de biens manufacturés était certes soutenue (+3%) mais elle a décéléré par rapport à 2015 (+4,1%). Bien que les importations aient également reculé, celles-ci étant stimulé par la demande intérieure, le déficit commercial s'est à nouveau accru. Le made in France a déserte certains secteurs, notamment l'électronique. En valeur, le solde du commerce extérieur de l'industrie manufacturière s'est élevé 23,5 milliards d'euros, contre 17,7 milliards un an plus tôt. "La fabrication de matériel de transport, l'industrie chimique, les industries agroalimentaires et l'industrie pharmaceutique sont et restent les seules branches excédentaires. Par ailleurs, seuls l'industrie pharmaceutique, le raffinage et le textile améliorent leur solde commercial ; le premier par une baisse des importations de médicaments, le deuxième en raison de la diminution du prix des hydrocarbures", observe l'Insee.

Pas d'effet sur l'emploi

Ce réveil, relatif, on l'a vu, de l'industrie n'a pas été assez tonique pour stimuler les embauches dans ce secteur qui, rappelons-le, représentaient 2,8 millions d'emplois en 2016, soit 11% de l'ensemble de l'économie. Un nombre auquel s'ajoutent environ 271.000 intérimaires. "En prenant en compte l'ensemble de ces effectifs, l'emploi manufacturier est quasiment stable en 2016. Ainsi, la croissance en volume de l'industrie manufacturière s'est améliorée, mais ne suffit pas à créer de l'emploi. En effet, dans ce secteur, les gains de productivité apparente du travail restent importants, quoique nettement inférieurs à leur niveau d'avant-crise. En 2016, ils s'élèvent à 1,3% et subviennent, à eux seuls, à la croissance de l'activité", précise l'étude.

Pas de ministère de l'Industrie

Concrètement, le travail intérimaire reste donc la variable d'ajustement. De fait, en 2016, le nombre d'intérimaires dans l'industrie manufacturière a augmenté de près de 9%, comme en 2015. Hors intérim, en revanche, l'industrie manufacturière a perdu 14.500 emplois salariés en 2016, soit une baisse de 0,5%. "Le rythme des pertes d'emplois s'atténue toutefois par rapport aux trois années précédentes. (- 1,2% chaque année), relativise l'Insee. Ouf...

Notons que l'industrie, une nouvelle fois, a été la grande absente des réflexions de l'exécutif lors de la composition du gouvernement. Il n'y a en effet pas de ministère de l'Industrie. Pour connaître la vision de l'Etat dans ce secteur, peut-être faut-il interroger directement Matignon. Ou l'Elysée.