La niche fiscale sur le gazole non routier (GNR) pour les agriculteurs et le bâtiment va disparaître

Par latribune.fr  |   |  893  mots
(Crédits : JOHANNA GERON)
Les transporteurs routiers ne seront pas concernés par la disparition de la détaxe sur le gazole dont bénéficient certaines professions. Objectif affiché, préserver leur « compétitivité ». En revanche, les agriculteurs et les entreprises du BTP ne pourront plus en profiter, l'exécutif considérant que cette niche fiscale incite « à consommer des énergies fossiles ».

La décision risque de faire grincer des dents. La détaxe sur le gazole dont bénéficient certaines professions sera supprimée pour les agriculteurs et les entreprises de travaux publics, a confirmé le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, au micro de Franceinfo ce jeudi 7 septembre.

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 « Nous supprimerons la niche fiscale sur le gazole non routier tout simplement pour faire basculer notre fiscalité d'une fiscalité brune - c'est une fiscalité qui incite à consommer des énergies fossiles, donc c'est mauvais pour le climat - à une fiscalité qui valorise les investissements verts », a justifié le locataire de Bercy.

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Interrogé par l'AFP, le ministère a indiqué que la fin de la défiscalisation du gazole non routier s'appliquerait progressivement à partir de 2024 et jusqu'à 2030 pour le BTP, voire un peu au-delà pour les agriculteurs. En revanche, les transporteurs routiers ne seront « pas concernés » par la fin progressive de la défiscalisation du gazole afin de « préserver (leur) compétitivité », a souligné Bruno Le Maire.

« Cela nécessite des solutions », avertit la FNSEA

Il a relevé que pour cette profession, le niveau de taxation du gazole était supérieur à celui pratiqué par d'autres pays européens.

« Le niveau de taxation du gazole est de 3,8 centimes pour les agriculteurs, de 18 centimes pour les travaux publics, donc c'est très inférieur à ce qui existe dans la moyenne de pays européens et en France, a-t-il détaillé. Mais il est de 45 centimes pour les transporteurs routiers, c'est plus élevé que ce qui est pratiqué en Espagne, plus élevé que ce qui est pratiqué en Italie. »

L'Union des entreprises de transport et logistique de France (Union TLF) a indiqué que cette décision était « attendue par les transporteurs ». « Nous sommes déjà parmi les pays d'Europe les plus taxés ! Il faut préserver notre compétitivité car nous sommes un secteur stratégique pour le pays », a déclaré son délégué général, Olivier Poncelet.

Il n'en demeure pas moins que l'exécutif va marcher sur des œufs avec les professions concernées. Des discussions sont en cours avec les représentants des agriculteurs et des entreprises du BTP, afin de « trouver un accord », a confirmé le ministre de l'Economie, précisant qu'il y aura une « compensation pour accompagner la transformation ». « Il ne faut pas procéder par brutalité », a ajouté le ministre.

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Le président de la FNSEA sera reçu à Bercy la semaine prochaine. Le premier syndicat agricole s'est dit prêt à se passer de manière progressive du GNR, à condition qu'une solution alternative soit proposée aux exploitants : des tracteurs roulant à un autre carburant, des aides pour la transition, etc. Son président, Arnaud Rousseau, a encore déclaré ce jeudi sur RMC qu'il n'était « pas question que ce soit supprimé » de « manière abrupte ».

« Demander un effort, une mutation du brun vers le vert, pour reprendre l'expression du ministre de l'Economie, cela nécessite des solutions. Or, aujourd'hui les solutions sont peu nombreuses. Pour nous, c'est un sujet de compétitivité », a-t-il dit.

La majorité réfléchit à supprimer d'autres niches fiscales « brunes »

La suppression de la détaxe sur le GNR pour certaines professions s'inscrit dans le cadre du projet de loi de finances 2024, dont l'examen doit débuter au Parlement fin septembre. Outre le gouvernement, plusieurs députés de la majorité envisagent de s'attaquer aux niches fiscales défavorables à l'environnement, avait expliqué fin août le président du groupe Renaissance à l'Assemblée, Sylvain Maillard, au micro de Radio J.

« Nous allons discuter sur toutes les niches qui ne sont pas écologiques », soit « une bonne trentaine », a indiqué le député de Paris, sans préciser le montant des économies espéré.

Parmi ces « niches fiscales », le Crédit d'impôt recherche (CIR) doit être « regardé à travers le prisme du verdissement de l'économie », avait-il fait valoir, selon qui l'argent public investi à travers les niches fiscales doit participer à « changer le comportement du producteur ou du consommateur », et faire tendre ces derniers vers « un comportement écologique ».

Cette mesure pourrait être un moyen de « d'appuyer la transition » écologique, qui doit être « juste » et « finançable », tout en respectant l'impératif de réduire le déficit, avec pour ambition de repasser sous la barre des 3% du PIB d'ici 2027, conformément aux traités européens. Au-delà des règles imposées par l'UE et la volonté de rassurer ses voisins, l'exécutif doit également composer avec le verdict des agences de notation, dont les prochaines décisions tomberont à l'automne.

« Il faut revenir à une orthodoxie budgétaire forte et dire que chaque euro dépensé est un euro efficace pour les Français », a plaidé Sylvain Maillard, alors que le gouvernement a promis par ailleurs de ne pas augmenter les impôts.

(Avec AFP)