La pauvreté et les inégalités en légère baisse

Par Grégoire Normand  |   |  844  mots
L’évolution de la pauvreté serait principalement liée à la redistribution en faveur des ménages les plus modestes.
[Graphiques] Selon une première estimation de l'Insee, la pauvreté et les inégalités en France auraient légèrement reculé en 2016 en raison de mesures sociales et fiscales. A l'occasion de la journée mondiale de lutte contre la pauvreté, ce constat, qui arrive comme une bonne nouvelle, doit encore être confirmé par les experts de l'institut public.

Le taux de pauvreté a légèrement baissé en 2016, à 13,9% de la population contre 14,2% en  en 2015, du fait des mesures socio-fiscales mises en œuvre, selon une première estimation publiée mardi par l'Insee. Alors que le débat sur les dernières mesures fiscales, jugées favorables aux plus riches par ses détracteurs, fait rage, il semblerait que les décisions prises sous François Hollande n'ont pas forcément aggravé les inégalités en France.

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Une baisse après deux années de hausse

Ce recul du taux de pauvreté, c'est-à-dire la proportion de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté monétaire (60% du niveau de vie médian) de 1.015 euros par mois en 2015, fait suite à plusieurs années consécutives de légère hausse (+ 0,2 point en 2014 et 2015), selon les chiffres définitifs publiés par l'Insee en septembre 2016. La dernière estimation de l'institut public indique même que le taux de pauvreté en 2016 est légèrement inférieur à celui observé en 2012 au moment où François Hollande est arrivé au pouvoir. Le taux de pauvreté en 2016 serait ainsi inférieur de 0,7 point à son point haut de 2011, mais supérieur de 0,7 point à son niveau d'avant la crise de 2008.

Lecture : en 2016, 13,9 % de la population vit avec un niveau de vie au-dessous du seuil de pauvreté (taux de pauvreté). Champ : France métropolitaine, personnes vivant dans un ménage dont le revenu déclaré est positif ou nul et dont la personne de référence n'est pas étudiante.

Une légère baisse des inégalités

Du côté des inégalités, les dernière projections indiquent également une baisse. Selon les experts de l'Insee, l'indice de Gini (*) diminuerait de 0,002, pour atteindre 0,290 en 2016, après deux années consécutives de hausse (+ 0,001 en 2014 et + 0,003 en 2015). En 2016, l'indice de Gini serait ainsi inférieur de 0,015 à son point haut de 2011 et proche de son niveau d'avant la crise de 2008 mais est encore loin des niveaux atteints à la fin des années 90.

Selon les premières projections pour 2016, les inégalités de niveau de vie seraient aussi en très légère baisse, après deux années consécutives de hausse, pour les mêmes raisons. Par ailleurs, "le rapport entre la masse des niveaux de vie détenue par les 20 % les plus riches et celle détenue par les 20 % les plus modestes et le rapport interdécile D9/D1 diminueraient très légèrement (- 0,1)".  Malgré ces bonnes premières estimations d'automne, les économistes de l'institut de statistiques invitent à la prudence sur l'interprétation de ces données.

"Il faut toutefois noter que les évolutions annuelles du taux de pauvreté et des indicateurs d'inégalités présentés sont à la limite du seuil de significativité d'un point de vue statistique."

Une amélioration favorisée par des mesures socio-fiscales

La légère amélioration du taux de pauvreté "serait liée à la redistribution en faveur des ménages les plus modestes". Selon des simulations opérées par l'Insee, le taux de pauvreté calculé à partir des niveaux de vie avant redistribution serait quasi stable entre 2015 et 2016 (contre - 0,3 point après redistribution).

"Les prestations sociales (minima sociaux, prestations familiales, allocations logement et prime d'activité) ainsi que les prélèvements directs expliqueraient l'essentiel" de cette baisse, détaillent-ils. "Cet effet serait surtout dû à la création en 2016 de la prime d'activité", en substitution de la prime pour l'emploi et du RSA-activité, qui "cible davantage les actifs les plus modestes que les deux dispositifs précédents" et dont le taux de recours est "largement plus élevé" que celui au RSA activité, commente l'Insee.

Enfin, concernant le léger recul des inégalités, les auteurs de l'étude avancent des arguments relativement similaires.  "En effet, les inégalités avant redistribution augmenteraient légèrement en 2016, notamment du fait d'une progression des salaires des cadres un peu plus dynamique que celle des employés et ouvriers." Les mesures mises en application lors du dernier quinquennat feraient plus que compenser ce phénomène et entraînerait une baisse des inégalités. Avec l'instauration de la prime d'activité et la nouvelle revalorisation exceptionnelle de 2% du RSA, le niveau de vie des 20 % des individus les moins aisés augmenterait davantage en euros constants que celui des individus situés au-dessus du deuxième décile de niveau de vie. Reste à attendre la publication des données définitives de 2016 prévues ... en septembre 2018 pour tirer des conclusions plus solides sur les mesures gouvernementales de la présidence Hollande.

(**)L'indice (ou coefficient) de Gini est un indicateur synthétique d'inégalités de salaires (de revenus, de niveaux de vie...). Il varie entre 0 et 1. Il est égal à 0 dans une situation d'égalité parfaite où tous les salaires, les revenus, les niveaux de vie... seraient égaux. A l'autre extrême, il est égal à 1 dans une situation la plus inégalitaire possible.