Le prélèvement à la source à l'heure de l'évaluation

Par latribune.fr  |   |  854  mots
"Les fonctionnaires ont montré qu'ils étaient capables de faire cette grande transformation sans bug et rendre des services aux Français", a déclaré le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin. (Crédits : Charles Platiau)
Le prélèvement à la source fera l'objet d'une évaluation "après le premier trimestre", a annoncé ce lundi 4 février le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin, en assurant que l'entrée en vigueur de la réforme s'était faite sans "bug" de grande ampleur.

« La fusée est désormais sur orbite » et « tournera tous les mois », a déclaré lors d'une conférence de presse Gérald Darmanin, qui s'était déjà félicité la semaine dernière des conditions de mise en oeuvre de la réforme.

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De rares difficultés selon le ministre

Le ministre a reconnu qu'il faudrait « attendre peut-être un trimestre » pour voir dans le détail comment l'impôt à la source a fonctionné. « On fera une évaluation, sans doute après le premier trimestre, et je la rendrai publique », a-t-il promis. Interrogé sur le cas d'entreprises qui n'ont pas appliqué en janvier les derniers taux envoyés par l'administration fiscale, Gérald Darmanin a rappelé que les "collecteurs" (entreprises, organismes de retraite, etc.) avaient "deux mois" pour appliquer les derniers taux reçus de l'administration.

« Il n'y a pas d'entreprise qui n'a pas reçu les taux de janvier. En revanche, il a pu y avoir des collecteurs qui ont choisi d'appliquer les taux de décembre », notamment « parce qu'ils ont pu considérer que ceux de janvier étaient arrivés tardivement », a-t-il expliqué.

S'il n'a pas évoqué de "bug", le ministre a reconnu des difficultés sur de rares cas particuliers, pour lesquels l'entrée en vigueur du prélèvement à la source a été repoussée d'un mois avec l'aval de l'administration. « Il me semble qu'il y a trois collecteurs sur trois millions qui n'ont pas reçu ou pas souhaité appliquer les taux », a expliqué Gérald Darmanin, évoquant notamment le cas d'un "hôpital", dont il n'a pas donné le nom.

« Ce n'étaient pas des erreurs qui venaient de l'administration » mais des « collecteurs », a précisé le ministre, en indiquant avoir autorisé le fisc dans ces trois cas « à ne pas prélever l'impôt » plutôt que d'appliquer « un taux neutre à tout le monde », au risque de pénaliser les contribuables. Pour les salariés concernés, « il n'y aura pas de double imposition en février, a-t-il toutefois assuré. On reprendra en février l'imposition normale et on régularisera l'impôt que les gens devaient » lors de l'envoi des avis d'imposition, « sans pénalité pour personne ».

Extension aux crédits d'impôt ?

Au total, 38 millions de foyers fiscaux sont passés au prélèvement à la source au cours du mois de janvier, dont 25 millions de salariés, qui ont découvert pour la première fois ces derniers jours leur fiche de paie amputée de leur impôt sur le revenu.

Au-delà du bilan, Gérald Darmanin a rappelé qu'une réflexion avait été engagée, sur la base d'un rapport de l'inspection générale des finances (IGF), pour rendre contemporain le versement des crédits d'impôt, actuellement octroyés avec un décalage de plus d'un an. « J'y suis personnellement favorable, [car] ça rendra service aux Français », a déclaré le ministre, qui proposera au Premier ministre et au président de la République des « avancées » sur cette question « dans les prochaines semaines ».

« C'est une question qu'il faut continuer de creuser », a prévenu Gérald Darmanin, en soulignant qu'une éventuelle bascule du système de crédit d'impôt actuel vers un système contemporain aurait un coût important pour les finances publiques lors de l'année de transition.

« Le rapport de l'IGF le chiffre à peu près à 10 milliards d'euros, [même si] les crédits d'impôt bougent beaucoup d'une année sur l'autre. Ça veut dire qu'il y aurait un effort très important à faire, dans les conditions budgétaires que vous connaissez », a-t-il expliqué.

Pour limiter cet impact, Gérald Darmanin a avancé plusieurs hypothèses, comme d'effectuer la bascule "par tranches" de contribuables ou pour "certains crédits d'impôt" seulement, en précisant qu'elles devaient être étudiées.

Darmanin à l'offensive sur les niches fiscales

À la fin de la conférence de presse, l'ancien maire de Tourcoing a apporté quelques précisions sur sa volonté de s'attaquer aux niches fiscales. Avec le Grand débat et le mouvement social des "Gilets jaunes", les thèmes relatifs à la fiscalité sont revenus sur le devant de la scène :

« Aujourd'hui, il se trouve que les Français sont en soif de justice fiscale. Ce qui est important de répéter sans doute, c'est que seuls 45% d'entre nous payons des impôts sur le revenu et 10% des contribuables paient 70% de cet impôt. Ce qui empêche la progressivité de l'impôt et donc ce qui fait que les riches paient plus d'impôts que les personnes les plus modestes, c'est ce qu'on appelle les niches fiscales. »

Si le ministre des Comptes publics a reconnu qu'elles « sont parfois efficaces en permettant notamment de lutter contre le travail au noir », il constate que « sur 14 milliards d'euros que coûtent les niches fiscales au budget de l'Etat, 9% des contribuables les plus riches captent 7 milliards. Ce qui représente entre trois fois et quatre fois ce que rapportait l'ISF.»

(Avec AFP)