Les enseignements des deux dernières élections régionales de 2004 et 2010

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  753  mots
Les élections régionales de 2015 ne devraient pas ressembler aux précédents scrutins de 2004 et 2010 qui avaient vu le triomphe de la gauche.
Pour comprendre à quel point le scrutin régional de 2015 s'annonce inédit, avec l'émergence probable du tripartisme, un retour sur les élections précédentes de 2004 et 2010 s'impose.

Dimanche 6 décembre, les électeurs sont appelés à voter pour le premier tour des élections régionales. Le second tour aura lieu le dimanche suivant 13 décembre. C'est le sixième scrutin de ce type depuis 1986, année où les régions sont devenues des collectivités territoriales à part entière.
Cette année, il faudra désigner 1.914 conseillers régionaux ou territoriaux dans les douze nouvelles régions de France métropolitaine, plus l'Assemblée de Corse, les conseils régionaux de Guadeloupe et de la Réunion et les nouvelles collectivités territoriales uniques de Guyane et de Martinique. On connaît les enjeux de ces élections, normalement les dernières avant la présidentielle de 2017 : Le Front national va-t-il réussir à conquérir une ou plusieurs régions ? Quel va être le degré de résistance de la Gauche qui présidait jusqu'ici 21 des 22 régions métropolitaines ? La droite de gouvernement va-t-elle réussir la même percée qu'aux élections municipales et départementales ?
Pour comprendre, le nouveau contexte de demain, retour sur les deux derniers scrutins régionaux de 2004 et 2010.

Les élections régionales de 2004

Les 21 et 28 mars 2004, 1.880 sièges de conseillers régionaux étaient à pourvoir dans 26 régions (22 en métropole, 4 dans les départements d'Outre-mer).
Au soir du premier tour, la gauche parlementaire (composée par la majorité plurielle PS, PCF, Les Verts, PRG, MRC) arrive en tête avec 39 % des suffrages. En revanche, la majorité de droite - Jacques Chirac est alors président de la République avec une large majorité à l'Assemblée nationale - subit un revers en totalisant moins de 34 % des voix. Le FN est en léger recul mais se maintient à près de 15 %. Dans toutes les régions, la gauche est en ballotage favorable, à l'exception de l'Alsace, de l'Auvergne et de la Corse.

Au second tour, la vague rose déferle. La gauche progresse de onze points et frôle la majorité absolue des suffrages (49,9 %). La droite progresse de 3 points mais n'inverse pas la tendance et perd même largement en Île-de-France (conquise par la gauche en 1998) et en Auvergne, détenue par Valéry Giscard d'Estaing depuis 18 ans. Le Front national enregistre 12,4 % des voix, moins qu'au premier tour mais il faut signaler qu'il était éliminé dans 5 régions. Au total, la gauche rafle 59,9 % des sièges, la droite 27,8 % et le Front National 8,3%. Le reste des sièges revenant à des listes « divers gauche ou divers droite » et régionalistes.

En définitive, 24 régions sur 26 sont remportées par la gauche (en 1986 et 1992, la droite parlementaire en avait remporté 20 sur 22, alors qu'en 1998, elle n'en avait concédé que 7 à la gauche en métropole). Seule l'Alsace et la Corse sont emportées par la droite.
A noter qu'au premier tour, le taux d'abstention s'élevait à 39,16 % et au second tour à 34,34 %.

Les élections régionales de 2010

Les élections régionales ont lieu les 14 et 21 mars 2010. Il s'agissait de renouveler 25 conseils régionaux de France métropolitaine et d'outre-mer ainsi que l'Assemblée de Corse.
Lors du premier tour, la droite parlementaire - Nicolas Sarkozy est alors président de la République - enregistre son plus mauvais score sous la Ve République, tous scrutins confondus, avec 27 % des suffrages exprimés. Le MoDem obtient 4,20 % et le FN 11,42 % (à comparer avec les près de 30 % qu'il pourrait obtenir en 2015 !). Ce premier tour est également marqué par une forte abstention (53,67 %).
Pour sa part, le parti socialiste et ses alliés (PRG et MRC) - la majorité plurielle n'a pas pu être reconstituée à la différence du scrutin de 2004- réalisent 29,14%, alors que les écologistes atteignent 12,8% et que le Front de gauche obtient 5,84%.
Au second tour du 21 mars, la gauche, toutes tendances confondues, confirme nettement son succès du premier tour en atteignant un score national de 54,1 % des voix, tandis que la droite parlementaire est loin derrière avec 35,4 % des voix. Pour sa part, le Front national obtient 9,2 % des voix mais il progresse dans les douze régions où il a pu se maintenir entre les deux tours. Sur les 25 régions restant en jeu, la gauche en remporte 22. En métropole, seule l'Alsace reste à droite. Le taux d'abstention atteint 48,79 %.

On mesure, cinq ans après, à quel point le paysage politique a évolué. Les élections régionales de 2015, sur fond de carte électorale totalement redessinée et inédite, vont voir, sans doute, émerger un nouveau tripartisme inédit : Gauche, Droite et Front National. Un phénomène parti pour durer un certain temps.