Logement : ce qu'il faut retenir de la loi Élan

Par César Armand  |   |  1011  mots
La loi Élan vient d'être adoptée au Sénat.
Le projet de loi pour l'Evolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Élan) vient d'être définitivement adopté au Sénat ce 16 octobre. Revue de détail des principaux points du texte.

C'est la fin d'un marathon législatif. Six mois après avoir été présenté en Conseil des ministres, le projet de loi Élan a été définitivement été adopté par le Parlement ce 16 octobre. Sur le banc des ministres au Sénat, Julien Denormandie, ex-secrétaire d'Etat chargé de la Cohésion des territoires, a été promu ce 16 octobre ministre de la Ville et du Logement. Jacqueline Gourault, nouvellement ministre de la Cohésion des territoires et - c'est nouveau - des Relations avec les Collectivités territoriales, a, elle, remplacé Jacques Mézard.

Près d'un mois après une commission mixte paritaire Assemblée-Sénat qui a abouti à une conclusion positive, le texte gouvernemental sur l'Evolution du logement, de l'aménagement et du numérique devrait être promulgué par le président Macron fin octobre. En revanche, si des parlementaires de l'opposition déposent un recours devant le Conseil constitutionnel, le projet de loi sera promulgué fin novembre. Au ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les Collectivités territoriales, les ordonnances ainsi que les décrets contenant les quelque 80 mesures réglementaires sont déjà prêts à être publiés.

Texte fourre-tout au regard de nombreux acteurs, la loi Élan réforme tant le secteur du logement social que les questions d'aménagement et d'urbanisme, et traite aussi bien de la revitalisation des centres-villes que du très haut débit dans les collectivités locales. Un an après la présentation d'une stratégie Logement visant à « construire plus, mieux et moins cher » et à « moderniser et simplifier les normes », où en est-on et surtout que reste-t-il des dispositions initiales ?

L'accessibilité des logements

C'est un point qui a fait débat tant en commission que pendant les séances publiques. Le gouvernement rêvait d'en finir avec les 100 % d'accessibilité dans l'immobilier neuf pour les ramener à 10 % et réserver les 90 % restants à du logement évolutif, c'est-à-dire où il est possible de redimensionner les espaces selon les besoins des occupants.

En première lecture, le Sénat a relevé ce pourcentage à 30 %, avant qu'en commission mixte paritaire, les députés et les sénateurs se mettent d'accord sur un taux de 20 %. « La CMP, dans sa sagesse, a trouvé l'équilibre », estime pour sa part le ministère.

La création d'un carnet numérique du logement

Inscrit dans la loi Royal sur la transition énergétique et pour la croissance verte, promulguée en 2015, le carnet d'entretien et de suivi numérique du logement n'a jamais vu le jour, le décret n'ayant jamais été publié.

Initialement, le gouvernement ne voulait pas le réintroduire avant que le député (LREM) Mickael Nogal décide de remettre un carnet numérique dans le projet de loi. Objectif : étudier, dans l'existant comme dans le neuf, les consommations énergétiques des habitants. Le ministère reconnait « s'être interrogé sur son utilité », « les promoteurs le déployant déjà dans le neuf », et promet désormais que le décret paraîtra bien au Journal officiel.

Le déploiement du haut, voire du très haut débit

Dans les zones grises voire blanches de la téléphonie mobile, « un équilibre » a été trouvé entre la nécessaire accélération et le droit d'information du public et des maires concernés, assure-t-on du côté du ministère. L'objectif reste le même : le haut débit en 2020 et le très haut débit en 2022.

Le gouvernement a également obtenu des architectes des bâtiments de France (ABF), qui dépendent du ministère de la Culture, qu'ils donnent un avis simple, et non plus un avis conforme, en matière d'installation des antennes téléphoniques.

La réforme du logement social

Outre la baisse des APL de 5 euros déjà contenue dans le projet de loi finances 2018 et validée par le Conseil constitutionnel le 15 octobre, le gouvernement veut imposer aux organismes HLM de se regrouper à partir d'un certain seuil. Si les députés avaient fixé ce seuil à 10.000 logements sociaux, les sénateurs l'ont remonté à 15.000. La commission mixte paritaire du 19 septembre dernier a tranché : ce sera 12.000.

Autre sujet sur la table : la vente des logements du parc social. Le gouvernement aurait aimé que 40.000 transactions aient lieu chaque année, contre 8.000 aujourd'hui. Entre-temps, l'objectif chiffré ne revient plus précisément. Il est simplement question d'« encourager » les organismes à se lancer dans ce type d'opérations.

La revitalisation des centres-villes

Dès mars dernier, Jacques Mézard, alors ministre de la Cohésion des territoires, lançait l'opération Action Cœur de ville, visant à accompagner 222 communes en proie à la désertification de leur centre-ville, et ce à hauteur de 5 milliards d'euros. Dans le projet de loi présenté le 4 avril, un nouvel outil est apparu : l'opération de revitalisation de territoire (ORT).

Comme prévu initialement, le préfet d'un territoire peut piloter, avec les communes et les intercommunalités en copilotes, les autorisations d'exploitation commerciale dans les collectivités concernées. En revanche, il n'est plus question de moratoire sur l'implantation d'équipements commerciaux nuisibles aux centres-villes, mais de suspension sur une durée de trois ans.

La transformation de bureaux en logements

Le nouveau ministre de la Ville et du Logement, Julien Denormandie, avait signé en mars dernier une charte avec neuf promoteurs afin de les inciter à trouver des bureaux vides et à les transformer en logements. Dans le texte initial, le maire avait le droit d'octroyer un bonus de constructibilité de 10 % pour compenser les surcoûts liés à ce changement de destination.

Au cours du débat, le député (LREM) Mickael Nogal a proposé de rehausser ce pourcentage à 30 %. La disposition a ensuite été validée par les deux chambres et le gouvernement. Le ministère se félicite donc de « permettre une réversibilité aisée ».

A contrario, les professionnels, à l'image de Nordine Hachemi, pdg de Kaufman&Broad, soutiennent la démarche, mais estiment que cela ne va pas créer de « choc d'offres » dans l'immédiat.